Roman

« Le festin » de Margaret Kennedy

G07507_LeFestin_CV.inddDès les premières pages, le lecteur sait que ce « festin » se terminera mal.

Au début du roman, le décor est planté : une falaise s’est effondrée sur une pension de famille ; il y a eu des morts. La grande question sera donc : qui a survécu ? qui est mort ?

La pension de famille est tenue par une famille qui est prête à accepter tous les locataires pour gagner un peu d’argent. Se côtoient donc un chanoine irascible, une mère méchante et ses petites filles, des domestiques à la langue bien pendue… J’ai cru ne jamais me repérer parmi les personnages ! Mais tout se met progressivement en place, les personnages et la tension qui monte progressivement.

Certains critiques ont comparé l’ambiance de ce livre à un livre d’Agatha Christie, ce qui est assez pertinent : un groupe d’individus qui ne se connaissent pas, réunis dans une pension de famille, inconscients du drame qui les attend…

Au fil des chapitres, qui suivent les jours de la semaine, la tension monte vers le drame que le lecteur est le seul à anticiper. Les vies des personnages, d’abord traitées indépendamment les unes des autres, finissent par s’entremêler et former un ensemble cohérent.

En conclusion, il faut accepter le début qui est un peu décousu, pour capter ensuite tout le tissage de l’histoire.

S 3-3Folio, 576 pages, 9,70€

BD

« Céleste. Bien sûr, monsieur Proust (partie 1) » de Chloé Cruchaudet

9782302095700-001-XTous les lecteurs de Marcel Proust et ceux qui s’intéressent à sa vie connaissent forcément ce prénom : Céleste.

Car Céleste Albaret a été pendant huit ans la gouvernante de l’écrivain, l’accompagnant au quotidien.

Un livre et un documentaire ont déjà mis en avant le témoignage que la gouvernante a accepté de faire de son vivant. Cette BD s’appuie largement dessus (entre autres sources) pour retracer la relation particulière de cette femme avec Proust. Jeune mariée au chauffeur de Proust, assumant de ne rien savoir faire de ses dix doigts (ce qui était peu courant pour une femme de son époque et de son milieu), elle entre au service de Proust comme coursier et livre ses colis dans tout Paris. Très vite elle se rend indispensable ; admirative de Proust (on comprend aussi qu’elle en était platoniquement amoureuse), elle trouve avec l’écrivain un mode de fonctionnement qui n’appartient qu’à eux. Lui, vit reclus dans sa chambre ; elle, peu conventionnelle et maladroite, vit ses journées dans l’attente qu’il la sollicite, et finit par se rendre indispensable pour la réécriture de « La recherche ».

Première partie d’une courte série qui comptera deux tomes, cette BD réussit à retranscrire la relation si particulière entre ces deux êtres atypiques – et au passage, évoque le mari dans quelques vignettes comiques.

Les dessins sont fidèles aux visages que l’on connaît (celui de Proust, celui de Céleste – qui est d’ailleurs repris en photo en fin de BD). Les dessins sont plutôt monochromes, mais avec un jeu de couleur bien trouvé (1 ambiance, 1 couleur).

J’avais repéré ce livre depuis longtemps, et sa lecture m’a donné envie de rouvrir « La recherche » et sa merveilleuse adaptation en BD par Stéphane Heuet. Et bien sûr, j’attends la seconde partie !

S 3-3Ed. Soleil, 18,95€

Roman

« Mon mari » de Maud Ventura

mariElle habite une jolie maison, est mariée, mère de deux enfants. Après quinze ans de mariage, elle est toujours amoureuse de son mari. Mais c’est un amour maladif, jaloux, possessif, excessif.

Au quotidien, elle note dans des carnets sa vie amoureuse : ce qui s’est passé dans la journée, ses stratagèmes tordus pour entretenir la flamme.

Ecrit à la première personne, le roman nous fait vivre de l’intérieur les pensées de cette femme dérangée, qui cache ses angoisses sous une apparente normalité. Jusqu’où ira sa peur de perdre l’amour de son mari ?

L’ambiance du livre est proche du thriller psychologique, avec une tension qui monte crescendo, jusqu’à l’épilogue particulièrement réussi.

Troublant et redoutablement efficace, le roman lève le voile sur les coulisses de la jalousie et de la folie amoureuse. C’est le premier roman de Maud Ventura, et je suis curieux de retrouver le style de cette auteure sur une autre thématique.

S 3-3L’iconoclaste, collection Proche, 8,50€

Roman

« Demain, et demain, et demain » de Gabrielle Zevin

9782265155602ORICoup de cœur !

« Demain, et demain, et demain » est un roman qui ne ressemble à rien de ce que j’avais lu jusqu’ici. Il mêle amitié, quête de soi, jeux vidéo, mais aussi un mélange bien dosé d’ambition et de destruction. La grande réussite de ce livre est de m’avoir happée dès les premières pages, avec les retrouvailles fortuites de Sally et Sam dans le métro. Ils ne se sont pas vus depuis des années, pourtant ils ont partagé des heures et des heures dans la salle de jeux d’un hôpital.

Devenus étudiants, ils décident de réunir leurs talents pour créer ensemble un jeu vidéo.

Je ne suis pas joueuse et ne connaît pas grand-chose aux jeux vidéo, et pourtant j’ai adoré suivre ce duo atypique dans son projet, avec leur fantastique créativité et avec les doutes qui l’accompagnent.

Impossible de lâcher ce livre avant la fin ! Car finalement, derrière l’histoire de la création de jeux, c’est l’histoire entremêlée de deux êtres différents mais complémentaires, qui ne savent pas vivre ensemble mais ne savent pas non plus vivre l’un sans l’autre. C’est dérangeant, étonnant, captivant : le meilleur livre que j’ai lu depuis longtemps.

S 3-3Fleuve éditions, 528 pages, 22,90€

Roman

« Vidocq et l’énigme du temple» de Louis Bayard

9782749176376ORIJ’avais quelques hésitations avant d’entamer ce livre, car je n’avais pas gardé un excellent souvenir du premier roman que j’avais lu de cet auteur (« Un œil bleu pâle »). Mais celui-ci n’a rien à voir ! Dès les premières pages, j’ai trouvé l’histoire intéressante, mêlant récit historique et roman, et j’ai eu envie de voir comment l’auteur allait faire progresser son récit.

Ce roman est bien plus réussi que le premier, plus clair, plus dynamique : les chapitres sont courts et rythmés, l’écriture est fluide. Il y a une fois encore deux personnages principaux, qui se complètent : d’un côté Vidocq, un « monstre », puissant, géant ; de l’autre côté le Dr Carpentier, timide, un peu maladroit, mais homme réfléchi et loyal. Leurs chemins se croisent autour d’un mystère : celui du fils de Louis XVI, le petit Dauphin qui a suscité bien des interrogations et autour duquel les romanciers ont plaisir à inventer des récits tant son histoire offre une large palette romanesque.

Ce roman est une bonne surprise, une lecture prenante à laquelle je ne m’attendais pas, mais que j’ai appréciée jusqu’à la fin.

S 3-3Le Cherche Midi, 496 pages, 19,95€

BD

« Automne en Baie de Somme » de Philippe Pelaez et Alexis Chabert

Capture d’écran 2023-09-03 185756Lire une bande dessinée est souvent pour moi une « pause » entre des lectures de romans très épais ou très marquants, un peu comme une transition douce.

« Automne en Baie de Somme » est une bande dessinée élégante, au style recherché et à l’histoire efficace et sans fioriture.

En 1896, l’inspecteur Amaury Broyan enquête sur la mort d’un capitaine d’industrie. L’homme était marié, respecté par ses ouvriers, et plutôt visionnaire. Il avait bien une maîtresse, mais c’était monnaie courante à l’époque et dans son milieu. Pas de quoi alerter l’inspecteur. Mais alors, qui a pu le tuer, et pourquoi ?

Deux choses m’ont marquée dans cette bande dessinée.

La première, c’est l’attention portée aux personnages féminins. Leurs dessins sont particulièrement soignés (les coiffures, le port de tête, …). Dans ces univers très masculins à l’époque (l’industrie, la police), elles sortent du lot et apportent du relief à l’histoire.

La deuxième, c’est le travail réalisé sur les personnalités des protagonistes. Ils ont chacun leur part d’ombre, leurs nuances. C’est plutôt malin.

L’histoire se lit assez vite (une soixantaine de pages), avec des passages plus poétiques et des citations de Nelly Roussel particulièrement bien choisies pour appuyer le récit. J’aurais bien prolongé cette lecture, pour l’intérêt de l’histoire et pour la qualité du récit.

S 3-3Grand Angle, 64 pages, 15,90€

Cosy mystery·Policier

« Le club des amateurs de romans policiers (tome 2) : Le crime du SS Orient » de Christina Larmer

9782749176598ORIJ’avais beaucoup aimé le 1er tome du « Club des amateurs de romans policiers » : avec « Ils étaient sept », c’était un clin d’œil malin et intelligemment construit à Agatha Christie qui servait de base à cette série.

Bonne nouvelle, ce 2e tome est tout aussi réjouissant ! Cette fois-ci, Alicia et ses amis du club de lecture embarquent pour une mini croisière à bord du SS Orient, la réplique d’un ancien bateau de croisière. Anders, l’amoureux d’Alicia, y officie comme médecin.

Les amis auraient préféré un voyage à bord de l’Orient Express, en hommage à leur auteure préférée, mais après tout une croisière c’est déjà pas mal… S’ils trouvent l’ambiance très « croisière s’amuse », à bord les passagers sont davantage guindés. Habitués des croisières, vieilles filles et danseurs payés pour divertir les passagers se côtoient au rythme des repas gargantuesques et des soirées dansantes.

Mais la croisière tourne progressivement au cauchemar : après un premier décès, jugé accidentel, c’est ensuite la femme du capitaine qui est tuée ; et cette fois-ci, ce n’est sûrement pas un accident.

Comme dans le premier tome, la bonne idée de ce roman est de faire plusieurs clins d’œil aux romans d’Agatha Christie sans que cela ne soit jamais lourd, jamais une pâle copie : et c’est très malin ! Ainsi les lecteurs qui apprécient les romans de la « Reine du crime » ne chercheront pas la comparaison, mais pourront plutôt s’imaginer comme membres du club de lecture mené par Alicia.

J’ai encore une fois passé un très bon moment de lecture, immergée à bord de ce bateau de croisière en huis-clos (tiens, tiens). Et j’ai déjà noté la date du prochain tome ! (sortie en avril 2024).

S 3-3Le Cherche Midi, 368 pages, 15,90€

C'est mercredi, on lit avec les petits !

« Le journal de Gurty (tome 11) : Moi j’adore être heureuse » de Bertrand Santini

Gurty11Voilà un titre bien trouvé ! Car Gurty est bien la seule qui pourra redonner sa joie de vivre à Gaspard. En effet, son humain est profondément déprimé, ce qui a pour conséquence de le faire délaisser sa petite chienne. Mal nourrie, affublée de toutes sortes de gadgets inutiles, Gurty a décidé de reprendre les choses en main !

Il y a beaucoup d’émotion dans ce tome, car on n’était pas habitués à voir Gaspard délaisser sa complice Gurty de la sorte, et on a de la peine pour Gurty. Mais c’est la vie, on ne peut pas être joyeux tout le temps (sauf si on s’appelle Gurty), et il faut apprendre aussi à gérer les moments tristes. Heureusement, dans le monde de Gurty, il y a toujours de l’humour, des blagues, des gags décalés, et le sourire n’est jamais loin !

Après leur escapade en Angleterre, on retrouve le décor habituel de Gurty, ses amis (et ennemis) dans un nouveau tome toujours aussi savoureux.

S 3-3Sarbacane, 224 pages, 12,50€

C'est mercredi, on lit avec les petits !

« Le journal de Gurty (tome 10) : Vacances en Angleterre » de Bertrand Santini

Gurty 10« Dog save the Queen », voici Gurty et Gaspard de l’autre côté de la Manche ! Changement d’ambiance, entre brouillard écossais et protocole royal. Gurty se fait de nouveaux amis, se régale de saucisses et de fish and chips. Jusqu’à recevoir une invitation assez inattendue !

Les jeunes lecteurs habitués à retrouver toujours la même ambiance et le même rythme (trajet en train ou en avion, arrivée à Aix-en-Provence, retrouvailles avec Fleur, etc) peuvent être déçus de ne pas beaucoup voir Fleur et ses congénères provençaux dans ce tome. Mais ce voyage en Angleterre est aussi l’occasion de renouveler les gags et l’intrigue. J’ai bien aimé ce changement de décor !

S 3-3Sarbacane, 288 pages, 12,50€

C'est mercredi, on lit avec les petits !

« Le journal de Gurty (tome 9) : La revanche de Tête de Fesses » de Bertrand Santini

Gurty 9Tête de Fesses est papa ! Trois chatons débarquent sur le territoire de Gurty. Ils ont l’air adorables, mais leur parents ont décidé de leur apprendre à anéantir les chiens ! Autant dire que la guerre entre Gurty et Tête de Fesses est loin d’être terminée…

Peut-on vivre ensemble quand on est différents ? Est-on obligés de se détester parce que nos parents se détestent ? Encore un tome avec de belles questions existentielles pour Gurty, sa copine Fleur, et leurs ennemis qu’elles adorent détester. Car en plus de la famille chat de Tête de Fesses, il ne faut pas oublier l’infernal écureuil qui fait hi-hi, qui réclame toujours des Pims Framboises, des Figolu, des BN vanille et des pop corn Baff… amis des années 1980, bienvenue chez Gurty !

S 3-3Sarbacane, 256 pages, 12,50€