Cosy mystery·Policier

« Vingt ans et des poussières » de Ann Granger

9782264081919ORIJ’adore cette série d’enquêtes de « Carter & Campbell ». Je les ai tous lus, mais dans le désordre car, si les visuels des couvertures sont assez reconnaissables, il n’est indiqué nulle part que c’est une série, et il n’y a pas de numéro de tome non plus. Enfin bref , maintenant j’ai rattrapé mon retard et je guette avec impatience les nouvelles parutions.

Le nouveau tome, qui vient de sortir, est aussi réussi que les précédents, même si je l’ai trouvé un peu différent. Une particularité de cette série, contrairement à la plupart des autres « cosy » que je lis, est qu’il y a assez peu de fil rouge d’un tome à l’autre. Le duo d’enquêteurs est discret, sans signe distinctif caricatural. On ne retrouve pas, sur chaque tome, les mêmes pages qui permettent de resituer les personnages, leurs caractéristiques, leurs lubies. C’est assez reposant car ce n’est pas fait avec tact dans toutes les séries. Je m’étais quand même habituée à un certain style d’histoires, et en particulier à une présence forte des lieux, des vieilles maisons.

Ici l’histoire est très différente. Carter, le commissaire, voit une vieille affaire non résolue revenir sur le devant de la scène. Une jeune fille, disparue il y a vingt ans, n’avait jamais été retrouvée. Jusqu’à ce que son bracelet soit retrouvé, et relance l’enquête. Carter va être appuyé d’un autre enquêteur, qui avait mené avec lui l’enquête vingt ans plus tôt, et qui est maintenant à la retraite. Dans la préface, l’auteure raconte comment elle a fait se croiser ces deux personnages, le retraité étant le héros d’une autre série d’enquêtes, « Mitchell et Markby » (publié il y a… vingt ans… en France chez Liana Levi, mais introuvables aujourd’hui hors occasion). Ne pas connaître cette autre série ne change pas grand-chose à la lecture.

L’intrigue est intéressante, les questions autour de la disparition de la jeune fille sont nombreuses. Même si j’ai mis du temps à trouver le coupable, il n’y a pas beaucoup de suspects ni de fausses pistes. Il faut se laisser guider par le récit, tout simplement.

S 3-310/18, 356 pages, 15,90€

C'est mercredi, on lit avec les petits !

« Tête de fesses est plus célèbre que toi » de Bertrand Santini

tetefessesTête de fesses est de retour ! Le chat le plus diabolique de la littérature jeunesse revient dans un 5e tome aussi réussi que les précédents.

Donovan et Cassidy, les jumeaux terribles, « humains » de Tête de fesses, désespèrent de devenir célèbres un jour sur les réseaux sociaux. Tout bascule le jour où une star japonaise relaie sur les réseaux sociaux une vidéo mettant en scène Tête de fesses. Mais les jumeaux vont vite comprendre que la célébrité n’a pas que des bons côtés…

Les adeptes des précédents tomes, et/ou du « Journal de Gurty », son proche cousin littéraire, vont retrouver tout l’humour auquel ils sont habitués. Et comme toujours, ne vous y trompez pas : derrière les blagues pipi-caca, il y a de vrais messages passés aux enfants. Les réseaux sociaux, la quête de célébrité ou même de l’argent facile, sont abordés sans leçon de morale, mais à travers les expériences vécues par les personnages.

C’est drôle, c’est intelligent, ça fait du bien !

S 3-3Sarbacane, 112 pages, 8,90€

Roman

« La femme moderne selon Manet » de Alain Le Ninèze

manetCette collection de petits livres propose un point de vue très attractif : et si les grandes œuvres nous étaient racontées de l’intérieur ? Si par exemple, le célébrissime tableau « Olympia » de Manet était raconté par Victorine Meurent, le modèle qui donne ses traits à Olympia ? C’est très original comme approche !

On découvre l’envers du travail de l’artiste, mais aussi ses fréquentations, ses relations avec son modèle, et l’accueil peu chaleureux qui fut réservé au tableau. Le lecteur voit aussi graviter au fil des pages quelques uns des noms d’artistes les plus célèbres du XIXe siècle, de Baudelaire à Zola, de Pissaro à Monet. Le livre est court (une centaine de pages). On aurait pu imaginer suivre encore plus de détails de la création de cette œuvre ; c’est visiblement un parti pris de se concentrer sur un résumé assez succinct. On sent que ce texte a nécessité un certain travail de documentation ; en revanche le style et les dialogues ne sont pas des plus recherchés et ce décalage m’a un peu gênée à la lecture. Cela donne quand même envie de revoir les tableaux de Manet. J’ai apprécié d’ailleurs que le tableau « Olympia » soit reproduit sur la couverture intérieure, avec même un détail agrandi. « Le déjeuner sur l’herbe », auquel il est aussi largement fait référence (et pour lequel Victorine Meurent a aussi servi de modèle), n’est en revanche pas repris en illustration – il faudra aller le chercher vous-mêmes.

S 2-3Ateliers Henry Dougier, 128 pages, 12,90€

Cosy mystery·Policier

« Les thés meurtriers d’Oxford (tome 2) : Beau thé fatal » de H.Y. Hanna

thés2bisCassie, la meilleure amie de Gemma, file le parfait amour avec un galeriste. Mais lors d’un vernissage, une femme s’effondre, morte. Elle était amoureuse du galeriste, qui repoussait ses avances trop pressantes. Par ailleurs c’était une vraie peste, détestée de tous ceux qui la connaissaient. Les suspects ne manquent pas !

Bien que Devlin, l’inspecteur en charge de l’affaire (et au passage, son ex) essaie de la dissuader, Gemma, mise en confiance par la réussite de sa première enquête, décide de jouer à nouveau les détectives amateurs.

Je retrouve dans cette série beaucoup de codes de la série des « Hannah Swensen » : une jeune femme qui tient un magasin de cookie / un salon de thé, amoureuse de l’inspecteur en charge de l’enquête, avec un chat, une mère envahissante, etc. La trame est assez proche.

La lecture est sympathique, le groupe de vieilles dames qui fait son apparition dans quelques chapitres est toujours aussi drôle et décalé. C’est une lecture simple, par forcément inoubliable, mais qui permet de passer un moment sympa.

S 2-3City, 14,90€

Cosy mystery·Policier

« Les thés meurtriers d’Oxford (tome 1) : Chou à la crim » de H.Y. Hanna

thés1Dans la catégorie des cosy mysteries sur fond de pâtisserie, j’étais déjà une grande adepte de la série des « Hannah Swensen » (déjà 8 tomes lus et j’attends le 9e avec impatience cet automne). Et voilà que j’entame une nouvelle série, « Les thés meurtriers d’Oxford » (je n’avais pas immédiatement saisi le jeu de mots… à l’oral c’est plus évident). Le thème est très similaire : une jeune femme à la tête d’un salon de thé est mêlée à des enquêtes criminelles et décide d’enquêter à sa manière. Ajoutez un inspecteur séduisant, une mère envahissante et quelques commères dans le village, et vous aurez les ingrédients de ces deux séries.

Dans le 1er tome des « Thés meurtriers d’Oxford », Gemma revient tout juste d’Australie. Elle a laissé en plan sa carrière pour un retour sur ses terres natales, et y ouvrir un salon de thé. Il faut absolument que son affaire marche ; or un homme est retrouvé mort dans son salon de thé. Et pas n’importe quel homme : un touriste qu’elle a servi la veille, et avec qui tout le monde l’a vue avoir un échange houleux et peu cordial. Pour sa réputation et celle de son salon de thé, Gemma décide de participer à l’enquête, d’autant plus que l’inspecteur en charge du dossier est son ancien grand amour – et qu’elle ne le trouve pas très objectif dans cette affaire…

C’est une lecture plutôt agréable, facile, avec un schéma de narration classique mais qui fonctionne bien. Il y a pas mal d’indices qui permettent au lecteur d’enquêter – il y a même des indices répétés tellement de fois qu’ils en deviennent évidents.

Les relations entre Gemma et sa mère sentent le déjà-vu, en revanche les commères du village, des mamies qui se mêlent de tout, sont assez amusantes et provoquent quelques situations cocasses. J’espère qu’on les retrouvera dans le tome 2 !

S 2-3City, 14,90€

Audio·Roman

« Les gens de Bilbao naissent où ils veulent » de Maria Larrea

bilbaoQuel beau roman autobiographique !

La narratrice raconte son histoire familiale, celle de sa mère, celle de son père, deux gamins pas très aimés, pas très désirés, nés en Espagne. Adultes, leur vie se poursuit à Paris, dans la loge d’un théâtre parisien, où ils élèvent une petite fille – la narratrice.

J’ai lu ou écouté beaucoup de récits autobiographiques, et celui-ci est particulièrement incisif. La très bonne idée de cette version audio est d’avoir confié la lecture à l’auteure elle-même : le récit en est d’autant plus touchant, et l’auteure porte ses mots avec une telle énergie ! J’ai adoré sa lecture, tantôt sensible, tantôt révoltée, et son espagnol parfait (notamment pour les insultes et les cris d’énervement!).

L’histoire est particulièrement touchante. C’est une quête familiale, une quête de l’histoire personnelle, que je ne vous raconte pas en détail pour ne pas interférer dans votre découverte de ce beau texte. La première moitié de l’histoire est un récit assez classique (mais très bien mené) d’une histoire familiale ; la seconde partie est beaucoup plus personnelle, plus intime. J’ai adoré ce roman, et j’ai adoré le découvrir en version audio.

Pour un premier roman, l’auteure frappe fort. J’ai hâte de découvrir sa plume dans un prochain roman.

S 3-3Audiolib, lu par l’auteur, 4h16 d’écoute, 21,90€ en version CD

Roman

« Le festin » de Margaret Kennedy

G07507_LeFestin_CV.inddDès les premières pages, le lecteur sait que ce « festin » se terminera mal.

Au début du roman, le décor est planté : une falaise s’est effondrée sur une pension de famille ; il y a eu des morts. La grande question sera donc : qui a survécu ? qui est mort ?

La pension de famille est tenue par une famille qui est prête à accepter tous les locataires pour gagner un peu d’argent. Se côtoient donc un chanoine irascible, une mère méchante et ses petites filles, des domestiques à la langue bien pendue… J’ai cru ne jamais me repérer parmi les personnages ! Mais tout se met progressivement en place, les personnages et la tension qui monte progressivement.

Certains critiques ont comparé l’ambiance de ce livre à un livre d’Agatha Christie, ce qui est assez pertinent : un groupe d’individus qui ne se connaissent pas, réunis dans une pension de famille, inconscients du drame qui les attend…

Au fil des chapitres, qui suivent les jours de la semaine, la tension monte vers le drame que le lecteur est le seul à anticiper. Les vies des personnages, d’abord traitées indépendamment les unes des autres, finissent par s’entremêler et former un ensemble cohérent.

En conclusion, il faut accepter le début qui est un peu décousu, pour capter ensuite tout le tissage de l’histoire.

S 3-3Folio, 576 pages, 9,70€

BD

« Céleste. Bien sûr, monsieur Proust (partie 1) » de Chloé Cruchaudet

9782302095700-001-XTous les lecteurs de Marcel Proust et ceux qui s’intéressent à sa vie connaissent forcément ce prénom : Céleste.

Car Céleste Albaret a été pendant huit ans la gouvernante de l’écrivain, l’accompagnant au quotidien.

Un livre et un documentaire ont déjà mis en avant le témoignage que la gouvernante a accepté de faire de son vivant. Cette BD s’appuie largement dessus (entre autres sources) pour retracer la relation particulière de cette femme avec Proust. Jeune mariée au chauffeur de Proust, assumant de ne rien savoir faire de ses dix doigts (ce qui était peu courant pour une femme de son époque et de son milieu), elle entre au service de Proust comme coursier et livre ses colis dans tout Paris. Très vite elle se rend indispensable ; admirative de Proust (on comprend aussi qu’elle en était platoniquement amoureuse), elle trouve avec l’écrivain un mode de fonctionnement qui n’appartient qu’à eux. Lui, vit reclus dans sa chambre ; elle, peu conventionnelle et maladroite, vit ses journées dans l’attente qu’il la sollicite, et finit par se rendre indispensable pour la réécriture de « La recherche ».

Première partie d’une courte série qui comptera deux tomes, cette BD réussit à retranscrire la relation si particulière entre ces deux êtres atypiques – et au passage, évoque le mari dans quelques vignettes comiques.

Les dessins sont fidèles aux visages que l’on connaît (celui de Proust, celui de Céleste – qui est d’ailleurs repris en photo en fin de BD). Les dessins sont plutôt monochromes, mais avec un jeu de couleur bien trouvé (1 ambiance, 1 couleur).

J’avais repéré ce livre depuis longtemps, et sa lecture m’a donné envie de rouvrir « La recherche » et sa merveilleuse adaptation en BD par Stéphane Heuet. Et bien sûr, j’attends la seconde partie !

S 3-3Ed. Soleil, 18,95€

Roman

« Mon mari » de Maud Ventura

mariElle habite une jolie maison, est mariée, mère de deux enfants. Après quinze ans de mariage, elle est toujours amoureuse de son mari. Mais c’est un amour maladif, jaloux, possessif, excessif.

Au quotidien, elle note dans des carnets sa vie amoureuse : ce qui s’est passé dans la journée, ses stratagèmes tordus pour entretenir la flamme.

Ecrit à la première personne, le roman nous fait vivre de l’intérieur les pensées de cette femme dérangée, qui cache ses angoisses sous une apparente normalité. Jusqu’où ira sa peur de perdre l’amour de son mari ?

L’ambiance du livre est proche du thriller psychologique, avec une tension qui monte crescendo, jusqu’à l’épilogue particulièrement réussi.

Troublant et redoutablement efficace, le roman lève le voile sur les coulisses de la jalousie et de la folie amoureuse. C’est le premier roman de Maud Ventura, et je suis curieux de retrouver le style de cette auteure sur une autre thématique.

S 3-3L’iconoclaste, collection Proche, 8,50€

Roman

« Demain, et demain, et demain » de Gabrielle Zevin

9782265155602ORICoup de cœur !

« Demain, et demain, et demain » est un roman qui ne ressemble à rien de ce que j’avais lu jusqu’ici. Il mêle amitié, quête de soi, jeux vidéo, mais aussi un mélange bien dosé d’ambition et de destruction. La grande réussite de ce livre est de m’avoir happée dès les premières pages, avec les retrouvailles fortuites de Sally et Sam dans le métro. Ils ne se sont pas vus depuis des années, pourtant ils ont partagé des heures et des heures dans la salle de jeux d’un hôpital.

Devenus étudiants, ils décident de réunir leurs talents pour créer ensemble un jeu vidéo.

Je ne suis pas joueuse et ne connaît pas grand-chose aux jeux vidéo, et pourtant j’ai adoré suivre ce duo atypique dans son projet, avec leur fantastique créativité et avec les doutes qui l’accompagnent.

Impossible de lâcher ce livre avant la fin ! Car finalement, derrière l’histoire de la création de jeux, c’est l’histoire entremêlée de deux êtres différents mais complémentaires, qui ne savent pas vivre ensemble mais ne savent pas non plus vivre l’un sans l’autre. C’est dérangeant, étonnant, captivant : le meilleur livre que j’ai lu depuis longtemps.

S 3-3Fleuve éditions, 528 pages, 22,90€