De Pierre Lemaitre, j’avais déjà lu plusieurs polars, et le désormais incontournable « Au-revoir là haut », couronné par le Prix Goncourt en 2013. « Couleurs de l’incendie » se veut une suite, et la deuxième partie d’une trilogie annoncée. Mais n’ayez crainte si vous n’avez pas lu le premier, celui-ci peut se lire totalement indépendamment.
Se lire… ou s’écouter. En ce qui me concerne, j’ai découvert « Couleurs de l’incendie » en version audio. Et quelle version ! Je redoutais au départ la longueur de l’écoute (plus de quatorze heures, quand même…), mais que ces moments d’écoute furent finalement agréables !
Tout y est. D’abord, le texte et son écriture d’orfèvre. Chaque mot est précis, juste, choisi par l’auteur comme un joaillier choisirait pierre après pierre les pièces qui vont constituer une pièce majestueuse et éblouissante. La langue est riche, mais jamais précieuse. Les phrases sont comme tissées, mais jamais emmêlées.
Quelques mots sur l’histoire. Dans l’entre deux-guerres, Madeleine Péricourt hérite de la banque familiale. Mais le jour de l’enterrement de son père, un drame survient : son fils Paul fait une chute par la fenêtre. Accident, tentative de suicide ?
Déboires financiers, jeux politiques, influence de la presse, mais aussi montée du nazisme en Allemagne, le livre est riche en décors et en rebondissements.
Je crois que je n’aurais pas autant apprécié cette élégance de l’écriture si je l’avais lu comme je lis tant d’autres romans. En écoutant le texte, j’ai pu déguster les mots, et ils étaient savoureux. Le roman est lu par l’auteur lui-même ; Pierre Lemaitre nous livre une lecture qui est une interprétation. Sans caricature, sans maquiller sa voix, il réussit à donner un ton à chaque personnage, qui fait que chacun des personnages, Madeleine, Paul, la nurse polonaise, le patron du journal… sont reconnaissables, même mieux que si plusieurs lecteurs se relayaient. J’ai trouvé génial que ce soit l’auteur qui lise lui-même son texte, parce qu’aucune autre personne mieux que l’auteur ne peut restituer le corps d’un personnage. C’est une écoute aussi délicieuse qu’une écoute d’enfant à qui on fait la lecture.
Le seul (tout petit) reproche que je peux faire à ce livre audio est d’avoir sacrifié certains temps de respiration dans la lecture – vous savez, ces coupures à l’intérieur des chapitres, qui permettent la pause nécessaire pour changer de situation ou de personnages (ça a sûrement un nom mais je l’ignore). Ce qui fait que j’ai parfois été surprise d’entendre parler d’un personnage qui n’était pas du tout cité depuis le début d’un chapitre.
A part ça, il n’y a rien à dire : sur le texte comme sur la lecture, ce livre audio est sublime.
Audiolib, lu par l’auteur, avec la participation de Zygmunt Mioszewski pour les mots lus en polonais.
Je suis en train de lire le roman et apprécie, mais je te dirais à la fin… En tous cas, pour suivre tes pas ou ton ouïe pour la lecture audio, il me faudra progresser en capacité à m’isoler… Amitiés vives. Eric
Cher Eric, j’espère que tu apprécieras cette lecture jusqu’à la fin ! Je me souviens de ta chronique sur le premier opus, « Au-revoir là-haut », et ton récit très touchant sur les lettres de ton arrière grand-père… J’y ai pensé pendant ma lecture de ce deuxième livre, même si ici la cadre est celui de l’entre deux guerres.