Roman

« Les Royaumes de feu (tome 1) – La prophétie » de Tui T. Sutherland

Je n’aurais jamais cru me passionner pour une histoire de dragons… et pourtant j’ai adoré ce roman ! Ce qui l’a fait sortir du lot dans les rayonnages, c’est d’abord la magnifique édition collector pour les 10 ans de la sortie du roman (il y a eu 16 autres tomes depuis !), avec sa couverture brillante et son jaspage, qui donnent envie d’ouvrir le livre juste pour le plaisir de regarder et toucher un bel objet.

L’histoire est celle de cinq jeunes dragons, Argil, Tsunami, Comète, Gloria et Sunny, élevés hors de leurs clans respectifs depuis leur naissance. Il faut dire que ces cinq dragonnets ont une particularité : ils sont des élus, ceux qui ont été identifiés pour réaliser une prophétie et ramener la paix entre des clans en guerre depuis des années.

Ce premier tome place Argil au centre de l’histoire ; dans l’interview de l’auteure reprise en fin d’ouvrage, elle explique que chacun des cinq premiers tomes met en avant l’un des dragonnets. Mais les autres ne sont pas pour autant absents de l’histoire ; au contraire, leurs aventures se vivent en groupe, avec la solidarité naturelle de ceux qui traversent des épreuves communes, mais aussi avec des tensions et des désaccords.

Chaque lecteur pourra ainsi préférer le caractère fougueux de Tsunami, la gentillesse d’Argil, ou compatir avec Gloria qui cherche sa légitimité… L’univers dans lequel évoluent les personnages n’est pas tendre, il y a des combats dans l’arène, des affrontements à la vie à la mort, et l’auteure ne prend pas de pincettes quand il faut sacrifier des personnages. L’éditeur conseille la lecture pour les 9-12 ans, ce qui me paraît bien, même s’il faut quand même être un lecteur motivé si tous les tomes de la saga comptent 400 pages ! Quant aux lecteurs adultes, ils ne seront pas déçus par ce roman qui crée tout un univers, des personnages attachants et aux caractères complexes, sans oublier quelques rebondissements et une petite point d’humour qui allège l’ambiance.

Gallimard jeunesses, 416 pages, 25€ pour l’édition collector, 17€ pour la version classique.

Cosy mystery·Policier·Roman

« Le club des amateurs de romans policiers (tome 6) – Meurtre en famille » de C.A. Larmer

J’aime beaucoup cette série de cosy mysteries où les enquêteurs amateurs sont une bande de lecteurs fans d’Agatha Christie. Même si Alicia et Lynette, les deux sœurs qui ont fondé le club de lecture, sont un peu plus présentes que les autres personnages, il en ressort un effet de « troupe » assez sympathique – qui me rappelle d’ailleurs un groupe de lecteurs dont je faisais partie, composé de personnalités différentes mais toutes adorables et complémentaires.

Ronnie, l’une des membres du club, fête son anniversaire dans la magnifique propriété qu’elle a héritée de son mari. Tous ses amis sont invités, et leur présence va s’avérer hélas nécessaire puisque la petite amie du neveu de Ronnie est retrouvée morte sur le cours de tennis. La police, bien sûr, ne s’en sortira pas sans l’enquête parallèle des détectives amateurs…

On s’éloigne de l’univers d’Agatha Christie, contrairement aux premiers tomes où les références étaient très présentes. C’est un peu dommage, mais maintenant que la mayonnaise a pris, le groupe se suffit à lui-même et le club de lecture est devenu un prétexte pour lier des personnages très différents. Il y a évidemment plein de fausses pistes, des personnages détestables, des histoires de famille, d’héritage… La vie privée des membres du club est évoquée en pointillés, mais elle est assez peu présente – ce qui me va bien, je préfère quand il n’y a pas trop de digressions dans l’enquête.

La couverture, comme toutes celles de cette collection, est très mignonne, avec quelques dessins à l’intérieur ; encore une jolie série dans ma bibliothèque…

Le Cherche Midi, 464 pages, 15,90€ (service de presse)

Poésie

« Il n’y a pas de plus grande force que l’amour » de Rainer Maria Rilke

Tout comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, vous avez toutes et tous déjà lu Rilke, peut-être sans le savoir. Nombreuses sont les citations issues de ses écrits qui sont reprises régulièrement. J’ai d’ailleurs largement marqué les pages de ce recueil pour y retrouver facilement les pages qui me marquaient le plus.

Ce livre est composé de poèmes, lettres et courts textes, pour la plupart destinés aux femmes que Rilke a aimées. Ce sont des textes qui se lisent très bien, j’ai puisé dedans par touches comme dans un recueil de poésie – et comme je n’arrive pas à lire de la poésie de manière linéaire, j’ai commencé ce livre par la fin comme à mon habitude, jusqu’à arriver à quelques pages de contexte en milieu de livre qui m’ont obligée à reprendre ma lecture de façon plus classique.

J’ai envie de vous citer plein d’extraits !

Amour, solitude, manque,… Les thèmes sont abordés avec beaucoup de justesse. Seul élément perturbant, le livre regroupe de manière condensée (une centaine de pages) des lettres destinées à neuf femmes différentes. Rilke n’est évidemment pas le seul poète a avoir écrit de grandes déclarations à plusieurs femmes dans sa vie, mais les voir regroupées côté à côté dans un si petit ouvrage ôte un peu de puissance aux sentiments.

Le livre n’en reste pas moins une mine de réflexions sur les relations amoureuses, dans un style poétique quelle que soit la forme utilisée. J’avais depuis longtemps identifié « Lettres à un jeune poète » dans mes envies de lecture, il est probable que cette lecture arrive plus tôt que prévu !

Les Belles lettres, 136 pages, 11€ (service de presse)

Policier·Roman

« La Psy » de Freida McFadden

Comme beaucoup d’entre vous, j’ai lu « La femme de ménage ». Comme beaucoup, j’ai aussi lu le deuxième volet, « Les secrets de la femme de ménage ». Et puis je me suis arrêtée là, j’ai choisi de ne pas lire les tomes suivants, par crainte de lire « l’histoire de trop » construite sur le même modèle.

Quand on m’a prêté « La Psy », j’ai quand même accepté le roman. Lecture facile, qui ne m’engageait à rien.

C’est un roman psychologique, comme « La femme de ménage » de la même auteure, mais construit différemment. Tricia et Ethan, deux jeunes mariés, sont coincés par le brouillard et la neige dans une maison inhabitée qu’ils devaient visiter avec leur agent immobilier. Cette maison a appartenu à une célèbre psychiatre, disparue sans laisser de trace, et que les policiers croient morte – même s’ils n’ont jamais trouvé les preuves de la culpabilité de son petit ami.

Mais la maison va révéler bien des secrets au jeune couple qui la visite… Je ne vous dis rien de plus sur l’histoire ; ce serait dommage car tout l’intérêt de ce genre de livre est de se laisser berner, de faire des découvertes et de pousser des « oh » de surprise.

J’ai passé le premier quart du livre à me laisser porter par le début de l’intrigue, puis une bonne moitié à penser que j’avais « tout deviné », je me suis cru maline, j’ai recoupé des indices qui collaient « forcément » avec ma théorie… jusqu’au dernier quart du livre, où j’ai compris que je m’étais fait avoir !

Et c’est très bien ainsi.

C’est donc un roman qui se lit facilement (400 pages mais avec une police assez grande et des interlignes très espacés), des rebondissements réguliers, et une fin qui ne déçoit pas. Me voilà prête à lire les prochains livres de cette auteure !

J’ai lu, 416 pages, 8,60€

En anglais·Roman

« The restaurant of lost recipes » de Hisashi Kashiwai


A Kyoto, Nagare et sa fille Koishi tiennent un restaurant d’un genre particulier ; à la demande de ses clients, le chef recrée des recettes oubliées, vecteurs de souvenirs. Nori Ben, ramen, ten don… au total, six recettes font l’objet de recherches dans ce roman (qui est en réalité le deuxième tome, mais nul besoin d’avoir lu le premier pour comprendre l’histoire). Le rituel est bien rodé : accueillir le visiteur, le mettre en confiance en lui proposant un bon repas ; puis écouter son histoire, la recette qu’il veut redécouvrir, et surtout les raisons pour lesquelles il cherche à retrouver les sensations provoquées par cette recette. Car derrière un plat, c’est avant tout un souvenir que les client du restaurant veulent faire revivre – et bizarrement, malgré la complexité de certaines demandes, le chef Nagare n’échoue jamais !

On a tous des recettes d’enfance ou qui sont capables de réveiller des souvenirs – évidemment j’ai pensé à Proust et à sa madeleine, à la capacité qu’un aliment ou un plat peut avoir de nous faire revivre des souvenirs marquants.

Ce sont souvent les recettes les plus simples qui font revivre les souvenirs les plus forts, parce que ce qui compte c’est la personne qui les a préparées, ou le lieu où on les a découvertes.

J’ai acheté ce livre dans une librairie londonienne, et c’est donc en anglais que je l’ai lu (traduit du japonais). Je n’ai pas toujours réussi à traduire en détail les composants des bentos ni les ingrédients spécifiques de la cuisine japonaise, certains termes m’ont résisté… mais j’ai compris l’ensemble, et au passage j’ai appris à dire « anguille » et à nommer quelques poissons (« Hamo eel » est une sorte d’anguille typique de Kyoto ; « Ayu sweetfish » un poisson à la chair sucrée…).

Les chapitres sont en fait des nouvelles (1 client = 1 chapitre), qui peuvent se lire séparément ou avec des pauses. L’ensemble est sympathique, le concept de « détectives culinaires » est amusant et aurait même pu être développé encore plus.

Pan Macmillan, 200 pages, 14£99

Essai / Document

« Le gaslighting, ou l’art de faire taire les femmes » d’Hélène Frappat

Coup de cœur !

Après la grosse déception de ma lecture de « Mangeuses », j’avais un peu d’appréhension à commencer la lecture de ce livre édité en poche dans la même collection.

Inutile de faire durer le suspense, cette crainte a été levée dès les premières pages grâce au style très clair et très pédagogique de l’auteure. Ouf !

Elu « mot de l’année » en 2022 par le Merriam Webster, le « gaslighting » peut sembler un concept abstrait, et l’auteure l’explique de manière très claire et avec de nombreux exemples. Elle cite le dictionnaire états-unien en ligne : « manipulation psychologique d’une personne, généralement pendant une longue période, qui pousse la victime à remettre en cause la validité de ses propres pensées […] et conduit en général à un état de confusion, de perte de confiance et d’estime de soi ».

L’auteure s’appuie beaucoup sur le cinéma, en particulier via une analyse très poussée du film « Gaslight » de 1944 (et autant vous dire que j’ai très très envie de le voir). D’autres créations, films d’Hitchcock, pièces de théâtre classiques, ou sujets politiques (le Watergate et Martha Mitchell) sont aussi pris en exemple.

J’ai beaucoup appris dans ce livre. J’ai pris des notes. Je me suis documentée en parallèle. Voilà ce qui a rendu pour moi ce livre utile, précieux, et qui fait que j’en parle quasiment tous les jours autour de moi depuis que j’en avais commencé la lecture.

Je savais par exemple que (hélas) les femmes sont moins bien soignées que les hommes. J’ai appris que cela avait un nom, « le syndrome de Yentl » et j’ai découvert avec effroi comment et pourquoi les symptômes de certaines maladies sont moins bien étudiés chez les femmes (cf la partie effarante sur les crises cardiaques).

J’ai envie de voir le film qui a inspiré le titre de ce livre. J’ai envie de voir les autres films cités dans ce livre, de lire les textes complets dont j’ai découvert des extraits, d’approfondir les inégalités hommes-femmes dans la prise en charge médicale.

J’ai envie, tout simplement, de relire ce livre, plus tard, quand le sujet aura encore plus cheminé et mûri en moi (et quand j’aurai vu « Gaslight », évidemment).

Points, 256 pages, 8,40€

Policier·Roman

« Les assassins de l’aube » de Michel Bussi

Direction la Guadeloupe pour ce roman de Michel Bussi qui vient de sortir en format poche. La police locale est à cran : un meurtrier s’en prend à des touristes ; trois d’entre eux ont été tués avec un harpon dans le coeur et un message politique comme signature. Valéric, à la tête de l’enquête, est un… Lire la suite « Les assassins de l’aube » de Michel Bussi

Cosy mystery·Policier·Roman

« Son Espionne royale vole au secours de Belinda (tome 14) » de Rhys Bowen

Avec le temps, cette série est devenue une de mes lectures doudous, de celles que je mets de côté pour les moments où j’ai besoin d’une lecture pas trop sérieuse et de lire juste pour me détendre. Si parfois les séries ont tendance à se répéter, je trouve au contraire que celle-ci se bonifie au fil des tomes. Lady Georgiana est devenue une vraie jeune femme, courageuse, s’assumant de plus en plus, s’affirmant au fil des tomes. Les personnages agaçants (désolée Queenie!) sont complètement passés au second plan.

Dans ce quatorzième tome, Georgie est mariée depuis trois mois au séduisant Darcy. Celui-ci doit repartir en mission secrète, et Georgie ne goûte guère à la vie domestique est s’ennuie seule dans sa grande propriété. Elle cherche de la compagnie et se retrouve embarquée par Belinda, sa meilleure amie, au fin fond des Cornouailles, où Belinda vient d’hériter d’un cottage en piteux état. Sur place, Belinda retrouve des amis d’enfance, et le séjour va virer au cauchemar pour elle…

Comme toujours, l’enquête semble surtout un prétexte (le meurtre n’a lieu qu’au milieu du roman)… et cela ne me dérange pas ! On est dans le pur esprit du « cosy mystery ». J’aime avant tout lire les escapades de Georgie, ici dans une riche demeure des Cornouailles, ses promenades, les petites conspirations, la description de son quotidien de lady et les cérémonies du thé…

J’ai trouvé ce tome dépaysant, entre belles propriétés mystérieuses qui donneraient presque envie de devenir châtelaine, et cottages charmants quoique défraîchis.

Précision importante, il faut lire les tomes dans l’ordre pour comprendre la psychologie des personnages et leurs relations.

Deux coups de griffes pour finir : dans mon édition j’ai trouvé beaucoup de coquilles, à croire que le texte n’a pas bénéficié du regard d’un correcteur ; quant au nom de l’auteure, il ne figure même pas sur la couverture de mon livre, quelle maladresse !

Robert Laffont, coll. « La Bête noire », 378 pages, 14,90€

Roman

« Le Chardonneret » de Donna Tartt

Coup de cœur !

J’avais entendu beaucoup de bien sur ce livre il y a longtemps (grâce à une chronique de Caroline sur le blog qu’on partageait précédemment), mais il m’aura fallu attendre cet été pour le découvrir. Le bon moment n’arrive pas toujours quand on l’attend.

Theo Decker n’a que treize ans lorsqu’il est victime d’un attentat dans un musée. Sa mère, comme de nombreux visiteurs, décède dans l’attaque. Theo s’en sort, et se voit confier par un vieil homme mourant un tableau de valeur du musée : « Le Chardonneret ». Durant toutes les années qui vont suivre (et les 1100 pages de ce livre), Theo va être hanté par ce tableau.

Roman impressionnant par sa construction et sa densité, il entraîne le lecteur à la suite de Theo, de Manhattan à Las Vegas, d’un vieil atelier d’antiquaire jusqu’au riche appartement d’une famille d’accueil. Theo est un personnage attachant mais troublant, un enfant plein de potentiel qui se transforme au fil des chapitres en un adolescent puis un jeune homme dont la déchéance m’a souvent mise mal à l’aise.

Le récit ne souffre d’aucun temps mort ; j’ai su dès les premières pages que j’enchaînerais sans difficulté la lecture des chapitres – ce qui ne s’est pas démenti. J’ai aimé lire cette fresque d’une jeunesse esseulée et paumée, mais aussi toute la beauté apportée par les œuvres d’art et les antiquités qui parsèment le roman. Tous les personnages autour de Theo apportent une touche particulière à l’histoire : tantôt la douceur ou la confiance (Hobie l’antiquaire, Pippa la jeune rescapée, la mère de Theo), tantôt l’instabilité et le déclin (Boris l’ami russe, le père de Theo et sa compagne,…)

Récompensé par le Prix Pulitzer en 2014, ce roman a été aussi été l’objet de censure à travers la loi « HB 1467 » adoptée par certains Etats américains – et si vous ne deviez retenir qu’un argument pour lire ce roman, ce serait peut-être celui-là : qu’elle dérange ou qu’elle mette mal à l’aise, la littérature trouve toujours sa place quand les lecteurs continuent de la faire vivre.

Pocket, 1120 pages, 12,90€

Essai / Document

« Mangeuses : histoire de celles qui dévorent, savourent, ou se privent à l’excès » de Lauren Malka

Je ne sais pas quoi penser de ce livre, et cela m’embête. J’aime bien cette collection de livres féministes chez Points, reconnaissables à leur couverture violette ; et l’idée de départ de ce livre-ci me semblait séduisante : analyser le rapport des femmes à la nourriture, et comment (dans le passé et aujourd’hui encore) elles ont été… Lire la suite « Mangeuses : histoire de celles qui dévorent, savourent, ou se privent à l’excès » de Lauren Malka