Cosy mystery·Policier

« Les Trois Dahlia (tome 2) : Lady Detective » de Kate Watson

9782749177793ORIRosalind, Caroline et Posy ont, chacune leur tour, incarné le rôle de Dahlia Levely, la célèbre enquêtrice. Tandis que Rosalind et Posy sont réunies sur un nouveau tournage, Rosalind reçoit des menaces de mort. Elles appellent à la rescousse la « troisième Dahlia », Caroline, et reconstituent ainsi le trio d’enquêtrices que j’avais découvert dans « Meurtres à Aldermere House ».

D’ailleurs si vous aviez aimé le premier tome, celui-ci en reprend tous les codes : un tournage de film, dans une grande et belle maison, avec une enquête qui n’avance pas assez vite et trois enquêtrices de fiction qui décident de prendre les choses en main et de s’unir, malgré leurs différences, pour résoudre l’enquête.

On pense évidemment très fort à Agatha Christie à travers ce personnage de roman (Dahlia) adapté au cinéma et à la télévision, mais aussi à travers l’ambiance en huis-clos de l’enquête. Il est donc très facile d’entrer dans l’histoire et de se familiariser avec les trois héroïnes – en revanche il y a beaucoup d’autres personnages, et je n’ai pas aimé qu’ils soient tous présentés très vite au début (c’est le meilleur moyen pour que je ne les identifie pas). J’ai aussi regretté quelques longueurs dans l’histoire, notamment à la moitié du livre.

Si l’histoire est indépendante du premier tome, je vous conseille quand même de lire les tomes dans l’ordre, pour bien comprendre les relations entre les « Trois Dahlia » (conflictuelles dans le premier, soudées par intérêt dans le deuxième).

A noter, le joli effort sur la couverture sur ce deuxième volume.

S 2-3Le Cherche-Midi, 512 pages, 15,90€ (partenariat)

Policier·Roman

« Dans l’ombre d’April » de Ruth Ware

9782265155992ORIDepuis « La disparue de la cabine n°10 », j’ai attendu chaque roman de Ruth Ware avec impatience. J’aime le côté page turner de ses thrillers psychologiques, cette impatience qu’elle crée chez le lecteur de toujours vouloir poursuivre sa lecture – peu importe l’heure, peu importe ce qu’on a à faire.

April est une it-girl, qui souffle le chaud et le froid sur le microcosme des étudiants de Pelham. Sa colocataire, Hannah, est une fille modeste et sérieuse, quand April est riche et dévergondée. Pourtant les deux étudiantes deviennent amies, et la mort d’April plonge Hannah dans le désespoir, d’autant plus que c’est son témoignage qui envoie un homme en prison.

Les années ont passé, et un événement va remettre en cause le témoignage d’Hannah, et obliger celle-ci à repenser son passé sous un autre angle.

Le roman se lit très bien (comme toujours avec Ruth Ware) ; il n’y a pas de temps mort, même si la tension est beaucoup moins forte que dans ses précédents romans. Ce roman se lit plus comme une enquête que comme un thriller. On apprend à découvrir les personnages, et on s’immerge dans le campus où les étudiants se fréquentent dans une ambiance digne du « Cercle des poètes disparus ».

Les allers-retours entre la vie « avant » la mort d’April, et celle « après » (comprenez : dix ans plus tard) sont plutôt bien amenés – et pourtant vous savez combien je déteste les flash-backs dans les romans !

Au final, même s’il est moins addictif que les précédents, c’est un bon roman d’enquête, dans un décor différent de ceux déjà explorés par l’auteure.

S 2-3Fleuve éditions, 496 pages, 22,90€ (reçu dans le cadre d’un partenariat)

Essai / Document

« L’invention de la couleur par les Lumières » d’Aurélia Gaillard

8626.1723108128Je me souviens d’un document de France Culture intitulé « Pourquoi la couleur a disparu de notre quotidien », où le designer Jean-Gabriel Causse décryptait les raisons de la disparition progressive des couleurs dans l’architecture, la mode, les biens de consommation (dont les voitures). Ce document m’est resté en mémoire, et je continue à m’intéresser au sujet. C’est pourquoi j’étais curieuse de découvrir « L’invention de la couleur par les Lumières ».

Dans cet essai, l’auteure débute par une analyse bien antérieure aux Lumières du rôle et de la perception de la couleur, d’Aristote au Moyen-Age. Elle analyse également comment l’étude scientifique de la couleur (avec les travaux de Newton) a marqué le début d’une révolution. Le vocabulaire, aussi, s’est enrichi pour rendre compte de l’infinie variété des nuances de couleurs (un lexique en fin d’ouvrage y est d’ailleurs consacré).

Le contenu est très documenté, les sources précises, et le livre fourmille d’informations intéressantes. A noter cependant, cela reste un ouvrage assez formel, de haut niveau, et donc parfois assez ardu à lire. Pour ma part, j’ai dû le reposer et le reprendre à plusieurs reprises pour « digérer » la quantité d’informations.

A ne pas manquer dans votre lecture, le chapitre consacré au rose, qui commence par une analyse lexicale, et fait ensuite (évidemment !) référence aux travaux de Michel Pastoureau (que je cite très souvent sur cette thématique du rose, et du « genre » du rose en particulier).

S 2-3Les Belles lettres, 330 pages, 27€ (livre reçu dans le cadre d’une opération proposée par l’éditeur)

Roman

« Un homme qui savait » d’Emmanuel Bove

I23597J’ai tant de livres qui attendent d’être lus près de ma table de chevet, des livres que j’empile au fur et à mesure de mes coups de cœur, des lectures d’autres chroniqueurs, de mes centres d’intérêt et de mes lubies du moment, que parfois j’oublie comment un livre est arrivé là.

J’ai oublié ce qui m’avait donné envie de lire ce livre.

Le pire, c’est que la lecture de ce roman ne m’a pas aidée à m’en souvenir !

Maurice Lesca, retraité dont on ne sait pas grand-chose, vit dans la misère (ou dans une aisance perdue) avec sa sœur Emily – leur cohabitation étant subie plus que voulue. La seule autre femme avec laquelle Maurice discute, c’est Madame Maze, la libraire, pour laquelle il s’est mis en tête de récupérer de l’argent auprès de l’ex mari de celle-ci.

Le roman raconte le quotidien triste et rébarbatif de cet homme. J’ai attendu jusqu’aux dernières pages une étincelle, un sursaut, une révélation qui aurait donné un autre prisme à la vie de cet homme. Rien n’est venu. Alors si le texte est plutôt bien écrit, cela n’a pas suffi à me convaincre : il m’a manqué un rebondissement, ou un éclairage différent sur Maurice Lesca, pour que je trouve le personnage attachant et l’histoire plus captivante.

S 1-3La table ronde, 224 pages, 7,10€

Essai / Document

« Proust, roman familial » de Laure Murat

9782253908630-001-T« Proust m’a sauvée »

écrit l’auteure en excipit du livre.

Il faut lire les 200 pages de ce texte pour comprendre comme Laure Murat, née aristocrate d’une famille citée à plusieurs reprises dans « A la recherche du temps perdu », reniée par sa mère en raison de son homosexualité, a trouvé dans l’oeuvre de Proust des clés de décryptage de son propre contexte social et familial.

Ne vous découragez pas à la lecture du premier tiers du livre, où sont cités de nombreux membres de sa famille (avec les liens de parenté), apparemment célèbres. Cela ressemble à un Who’s Who assez indigeste, où le name dropping est assez ennuyeux pour qui ne connaît pas l’arbre généalogique de l’auteure.

La suite est plus intéressante. En creusant les marqueurs de l’aristocratie, décrits par Proust et vécus par l’auteure pendant sa jeunesse, en cherchant à définir le snobisme, en analysant ses propres relations familiales, l’auteure ouvre un champ plus personnel, plus touchant. Elle propose alors un récit intime sur ses relations familiales, l’étroitesse d’esprit à laquelle elle a été confrontée en révélant son homosexualité (les passages avec sa mère sont terribles).

Le récit se recentre sur Proust dans la dernière partie, sur l’enseignement que cette professeure en fait à ses étudiants, et surtout sur son amour assumé pour une œuvre exigeante qu’elle défend contre tous les a priori. Et de conclure :

« Aucun livre de la langue française ne provoque autant de préventions et de défiances ».

On n’aurait pas dit mieux.

S 2-3Le Livre de poche, 264 pages, 8,40€

Roman

« Aux marges du palais » de Marcus Malte

PLAT1MargesDuPalais-scaledD’un côté, il y a un palais, une cage dorée dans laquelle vit Aneth, seize ans, héritière protégée qui n’est jamais sortie de chez elle.
De l’autre côté des grilles du palais, c’est un autre monde qui vit : peuple pauvre, affamé, parfois sans domicile. C’est dans cette partie-là du monde que vivent la Baronne, Mo, Zap, La Souris, Doc, autant de marginaux qui se sont regroupés pour partager un logement (et leurs galères). C’est aussi ce groupe-là, mené par la Baronne, qui projette de bousculer le monde établi en s’attaquant à la Tour F le 1er mai.

    « Je veux que tous ces hommes, toutes ces femmes, tous ceux qui se joindront à nous, je veux qu’ils aient l’occasion de se montrer, de sortir de leur trou à rat, de relever la tête, de faire entendre leur voix. Je veux qu’au moins une fois dans leur vie ils puissent hurler : J’existe ! »

L’écriture est riche, pleine de jeux de mots et de doubles sens : c’est un beau travail de précision, qui se déguste pour le plaisir du bon mot, de la petite phrase bien trouvée. Le texte est écrit de façon à créer une certaine proximité entre l’auteur et le lecteur ; l’auteur se met à notre niveau comme s’il racontait cette histoire de vive voix, avec ses commentaires, comme s’il était pleinement concerné par le récit et nous le racontait avec son regard et sa sensibilité. C’est assez efficace pour conserver l’attention du lecteur (malgré quelques longueurs) et le mettre dans la confidence de la préparation de ce 1er mai révolutionnaire. Le royaume de Frzangzwe ressemble beaucoup à une certaine critique de la France (même s’il m’a fallu une bonne partie du livre pour voir le jeu de mot sur le pays!).
La couverture, faut-il encore le mentionner quand on parle de Zulma, est une fois de plus très réussie.
Petit regret, les titres des chapitres sont formulés comme des définitions de mots croisés, et je n’en ai résolu qu’un seul ! Mettre les solutions en fin d’ouvrage aurait été une bonne conclusion.

S 2-3Zulma, 496 pages, 24€ (reçu dans le cadre d’une « masse critique »)

Policier

« Ténèbres, prenez-moi la main » de Dennis Lehane

51tAzpYd0RL._SY445_SX342_Après « Un dernier verre avant la guerre », j’ai eu envie de poursuivre la lecture des aventures de Patrick Kenzie et Angela Gennaro, tous les deux détectives à Boston. J’avais trouvé le premier tome sombre mais efficace. J’ai eu plus de mal à entrer dans ce deuxième tome : trop de personnages, histoire trop compliquée, ou tout simplement une moindre concentration de ma part ? Sans doute un peu des trois !

L’histoire en tout cas est assez longue à démarrer, et passe par de sinueux détours avant que l’on comprenne quelle sera l’intrigue centrale.

Patrick est appelé auprès d’une psychiatre, qui pense que l’une de ses patientes est menacée, et dont le propre fils est en danger. Tout le début du roman tourne autour de ces personnages, avant que l’histoire prenne un tournant qui nous éloigne d’eux. Le passé de Patrick, et son enfance traumatisée auprès d’un père violent et pervers, est encore plus présente que dans le premier tome – et on ne sait pas encore tout de cette relation destructrice entre un père et son fils. Quant aux liens entre Angela et Patrick, ils prennent encore un peu d’épaisseur. Leur quête profonde de justice s’ancre dans la durée, et leur intimité se renforce. Il y a de la matière à exploiter pour les prochains tomes.

S 2-3Ed Payot, coll. Rivages Noir, 498 pages, 11,50€

Biographie·Essai / Document

« Agir et penser comme la Reine d’Angleterre » de Dorica Lucaci

6ccf73ec2e34288f6cde38bb0e01Une fois n’est pas coutume, la recommandation de cette lecture me vient… du Guide du Routard ! L’idée étant, pour un séjour à Londres, de se plonger via la lecture dans une ambiance toute british.

Le concept du livre est le suivant : à partir d’éléments autobiographiques sur Elizabeth II (qui était encore vivante quand le livre a été publié pour la première fois), l’auteure propose quelques conseils de vie sur des thématiques variées.

Ainsi il est question, en vrac, d’éducation, de vie publique, de courage, de famille, de relation aux autres, de lâcher-prise, de couple, de dignité… n’en jetez plus !

J’ai bien aimé redécouvrir des anecdotes sur la reine Elizabeth II (même si je n’ai rien appris… moi aussi j’ai vu « The Crown »). L’idée de départ du livre (aller chercher de l’inspiration dans la vie de la monarque sans doute la plus célèbre de notre époque) est assez plaisante. Mais les conseils proposés manquent de profondeur, ce sont au mieux des conseils dignes de magazines de psychologie bas de gamme, au pire de simples lapalissades. J’ai fini par survoler les parties avec les conseils (sans intérêt) pour concentrer ma lecture sur les parties biographiques et les anecdotes.

S 2-3Editions de l’Opportun, 240 pages, 12,90€

BD

« Bergères guerrières – La relève (tome 1) » de Jonathan Garnier et Amélie Fléchais

9782344016459-001-TIl y a dix ans, les hommes du village sont partis à la guerre. Depuis, nul n’est revenu. Comment s’organiser quand la moitié du village disparaît du jour au lendemain ? Comment défendre les terres ? Les femmes qui sont restées auraient pu être des victimes collatérales de cette guerre ; elles ont décidé de refuser leur sort et de prendre le destin de leur village en main.

Cette année, c’est la jeune Molly, accompagnée de ses copines, qui va intégrer l’entraînement pour devenir elle aussi une « bergère guerrière » et apprendre à défendre son village.

Cette BD fort réussie raconte le rite initiatique que vivent ces jeunes filles – elles vont apprendre à tirer à l’arc, à se battre, à manier l’épée. Si Molly est effrontément courageuse, toutes ses copines ne le sont pas autant, et l’histoire raconte aussi la pression qui pèse sur ces enfants qui doivent passer un cap dans leur vie. Ensemble, unies par l’appartenance à ce groupe, elles deviennent fortes. Et je ne parle pas de Liam, le petit garçon qui ne devrait pas faire partie de ce groupe de filles, mais qui va peu à peu gagner sa place à force de détermination.

Une jolie leçon de courage, d’engagement, de solidarité ! Cette lecture m’a d’autant plus plu qu’elle m’a été conseillée par une ado (merci Alix !) dont je ne peux que saluer la qualité des lectures.

S 3-3Glénat, 72 pages, 15,50€

Cosy mystery·Policier

« Les dames de Marlow enquêtent (tome 3) – Poison en huis clos » de Robert Thorogood

Capture d’écran 2024-10-10 203854Il y a une vraie différence entre les livres que je lis et ceux que j’écoute en version audio. La série des « Dames de Marlow » en est un bon exemple. J’ai adoré les deux premiers tomes en version audio – la lecture de Rachel Arditi était un plus, elle interprétait à merveille chacune des enquêtrices amatrices, Judith la verbicruciste octogénaire, Becks la femme de vicaire un peu coincée, et l’inénarrable Suzie, gardienne de chiens et animatrice sur la radio locale, la plus drôle des trois. Dans les deux premiers tomes, la seule voix de Suzie suffisait à me faire rire.

Alors forcément, le troisième tome en version papier n’a pas la même saveur… Les trois héroïnes sont égales à elles-mêmes, l’enquête est assez similaire dans sa construction (le maire de Marlow meurt empoisonné pendant un conseil municipal, ce qui fait de ses collègues présents ce soir-là les principaux suspects). C’est sympathique et gentillet, il y a des fausses pistes, des détails à ne pas manquer, des déductions, qui font le job pour un bon cosy mystery. Mais il m’a manqué le petit plus d’une narration réussie, de l’incarnation dans les personnages comme je l’avais aimée dans la version audio. Dommage !

S 2-3La Martinière, 400 pages, 14,90€