Biographie

« Oeuvres autobiographiques t3 – Du Groenland à Bora-Bora» de Paul-Emile Victor

PEVSi vous avez lu mes dernières chroniques, il ne vous aura pas échappé que je me suis enthousiasmée pour les écrits de Paul-Emile Victor – j’ai déjà chroniqué les 2 premiers tomes de ses « œuvres autobiographiques ».

Hélas le troisième tome (couvrant les années 1937-1995) n’a pas du tout la même saveur que les deux premiers. Finie la biographie d’un jeune homme du Jura parti explorer le Groenland : l’après-guerre sonne l’heure de la conquête à grande échelle, et le récit s’oriente vers davantage d’explications technologiques ou sur les équipes des expéditions polaires, que sur le parcours de Paul-Emile Victor et sur ses questionnements intimes. C’est dommage : d’une part, les explications sur les véhicules à chenilles m’ont ennuyée ; d’autre part, je reste sur ma faim quant aux questions sur « l’homme Paul-Emile Victor ». Sur son mariage : rien. Sur ses trois premiers enfants : à peine quelques lignes à la fin. Sur le choix de son départ à Bora-Bora pour finir sa vie : pas grand-chose de plus. J’ignore si l’auteur n’a jamais écrit sur ces sujets, ou si c’est le choix des textes ici regroupés qui est en cause, mais ce troisième tome est nettement en dessous des deux premiers.

Que cela ne vous empêche pas de découvrir ce coffret, au moins pour les deux premiers tomes qui sont passionnants !

S 1-3Transboreal, coffret de 3 volumes

Biographie

« Oeuvres autobiographiques t2 – L’iglou » de Paul-Emile Victor

PEVEn démarrant cette trilogie, je n’imaginais pas à quel point cette lecture serait captivante et marquante – pour preuve, j’en parle chaque jour autour de moi, tantôt pour raconter une anecdote, tantôt pour partager des étonnements ou des interrogations.

Ce deuxième tome est étrangement intitulé « L’iglou » : je dis « étrangement » car je crois que le mot « iglou » n’est jamais mentionné dans le texte – l’auteur parle seulement de hutte, et il n’y a nulle référence à ce que j’imagine être un iglou, fait de blocs de glace. Qu’importe, Paul-Emile Victor est enfin arrivé au Groenland (1934). Il va y étudier la population eskimo, en ramènera des objets et des notes aujourd’hui en partie conservés au Musée du Quai Branly (après avoir été transférés du Musée de l’homme). Mais surtout, il va vivre avec ces hommes, ces femmes, ces enfants, partager leur quotidien.

Si le premier tome était intéressant car il montrait le cheminement vers la réalisation d’un rêve, ce deuxième tome est celui de la concrétisation. Très vite on comprend que Paul-Emile Victor ne peut être bien qu’ici. Quand il retourne à Paris après son expédition, il est en cage, dans un monde qu’il comprend moins bien que celui des eskimos

« Et ces tonnes de gens qui courent dans les rues, qui sautent dans les autobus et les métros, qui ne s’assoient que pour reprendre assez de force pour courir encore, sauter davantage avec pour seules pensées les fins de mois, le panier de la semaine, la coqueluche ou la diphtérie de leurs enfants ; pour seules joies, le gueuleton et le cinéma du dimanche et pour seul but « gagner leur vie » (c’est-à-dire la perdre) pour s’assurer la croûte et le toit. »

Alors il repart. Il traverse avec trois autres hommes le Groenland, puis se fixe dans un village pour un hivernage. Il s’y trouve une famille de coeur, auprès de Doumidia notamment.

Si son acclimatation ne semble pas poser de problème (sur l’alimentation, la gestion du froid etc), l’auteur ne cache pas ses craintes, lui qui a toujours été sujet au cafard, cette « petite bête grignotante », ni son angoisse récurrente de devoir un jour retourner dans son Jura natal pour reprendre l’usine familiale de pipes et être « le-fils-Victor- successeur de son père ».

J’ai refermé ce tome avec l’envie de démarrer aussitôt le 3e, mais aussi avec beaucoup de questions en tête ; en particulier, pourquoi est-il reparti du Groenland alors qu’il y était si heureux ?

S 3-3Transboreal, coffret de 3 volumes

Biographie

« Oeuvres autobiographiques t1 – La Mansarde » de Paul-Emile Victor

PEVC’est une exposition qui m’a donné envie de découvrir les écrits de Paul-Emile Victor. Hésitant entre plusieurs titres, dont certains proposés en poche, j’ai finalement choisi un coffret contenant les trois tomes de ses « Oeuvres autobiographiques ».

Dans ce premier tome, « La Mansarde », ce sont les années 1907-1934 qui sont racontées, c’est-à-dire les années de jeunesse de l’explorateur, jusqu’à son départ au Groenland. Ce que j’aime le plus dans les biographies et les autobiographies, c’est justement de remonter aux sources, pour comprendre à quel moment a eu lieu le « déclic » qui a transformé une vie en destin. Paul-Emile Victor explique très bien ce moment-là de sa vie (page 261), je vous laisse le découvrir.

Paul-Emile Victor a grandi dans le Jura, dans une famille d’industriels bourgeois (son père était à la tête d’une usine de pipes). Très jeune il a deux rêves : les Pôles et la Polynésie. Et si ses années d’adolescent puis de jeune homme l’ont amené à faire des études (poussé par son père qui trouvait que des études lui seraient toujours utiles), puis à naviguer (il espérait voir le monde), ce rêve est resté le fil rouge de ses pensées.

« La plupart des hommes apprennent à tempérer leurs aspirations d’enfants ou d’adolescents, grâce aux leçons de l’expérience. Les gens dans mon genre s’y refusent. : de l’expérience, ils ne retiennent que ce qui peut servir leurs projets d’enfant. Le jour venu, ils les réalisent avec toutes les ressources de l’adulte. »

Le récit n’est pas complètement chronologique, même si les chapitres sont bornés dans le temps par cette période « avant » le Groenland. Les chapitres ont plutôt des thèmes, parfois familiaux ou anecdotiques, des portraits de personnages rencontrés dans son enfance (le rémouleur etc). Seules sont passées plutôt sous silence les amours de sa jeunesse.

Habitué très jeune à prendre des notes sur ses journées, on sent que l’auteur s’en est servi pour alimenter ses souvenirs de détails. Le climat jurassien est décrit avec autant de précision que les roulis et tangages des bateaux sur lesquels il a navigué. L’écriture est fluide et le texte se lit comme un roman d’aventure. J’ai hâte de lire le deuxième tome !

S 3-3Transboreal, coffret de 3 ouvrages

Cosy mystery·Policier

« Les enquêtes d’Hannah Swensen (tome 3) : Meurtres et muffins aux myrtilles » de Joanne Fluke

9782749164496ORIAh le bonheur des « lectures doudou », ces lectures que l’on retrouve pour passer juste un bon moment ! Clairement cette série des « Enquêtes d’Hannah Swensen », dont j’ai lu trois tomes jusqu’ici, fait maintenant partie de ces lectures que je vois arriver sur ma PAL avec gourmandise (et pas seulement parce qu’il y est question de pâtisserie), à côté des « Agatha Raisin » et autres « Espionne royale ».

Il s’en passe des choses à Eden Lake, ce petit village où vit Hannah Swensen, experte en cookies, et qui se retrouve malgré elle dans des histoire de meurtres. Cette fois-ci, c’est une vedette de la télé, présentatrice d’une émission culinaire culte, qui est retrouvée morte. Or, loin de son image télévisée, elle était exécrable avec ses collaborateurs, et détestée par la plupart des gens qui la rencontraient… Autant dire que les suspects ne manquent pas !

L’enquête avance bien, sans embrouiller le lecteur, en éliminant les pistes une à une. La construction est bien faite. Et autour de cela, il y a tout cet univers de gourmandise qui est aussi plaisant que l’enquête elle-même. Bon, j’avais trouvé le coupable très très tôt dans l’histoire, mais peu importe cela n’a rien gâché à mon plaisir de lecture.

S 3-3Le Cherche Midi, 432 pages, 15€

Policier

« Les sept châtiments » de Jordi Llobregat

sept châtimentsAlex Serra est inspectrice à Barcelone. Ecartée de son équipe à cause d’une bavure (qui restera assez bizarrement inexpliquée d’ailleurs), sa dernière chance de se racheter est de mener à bien une nouvelle enquête. Pour cela, elle doit élucider le meurtre d’un homme retrouvé mort avec les paupières cousues. Elle va devoir faire équipe avec un policier français.

Le roman se lit bien, il y a des rebondissements, des fausses pistes, et un mélange entre l’enquête actuelle et le passé mystérieux du village construit en haut de la montagne, en terre inhospitalière. Par contre le fil rouge du roman (attention je spoile un peu, quoique le titre oriente déjà beaucoup) autour des sept pêchés capitaux fait un peu vu et revu.

Au final, c’est un roman agréable à lire, avec des personnages intrigants (les moines, la femme recluse loin de toute lumière) mais un peu trop classique dans le genre – et donc je crains de l’oublier assez vite…

S 2-3Le cherche midi, 464 pages, 21€

Roman

« La huitième vie « de Nino Haratischwili

huitième vieJe suis très friande de sagas familiales, et j’avais hâte de démarrer la lecture de « La huitième vie ». Le fil rouge du roman est de retracer l’histoire d’une famille, à travers ses figures féminines emblématiques au fil des générations. L’histoire est racontée par une femme qui vit de nos jours et veut transmettre cette histoire familiale à sa nièce.

Je craignais un peu les allers-retours temporels, et donc de me perdre dans les personnages qui constituent l’arbre généalogique. Heureusement c’est assez bien fait pour que l’on arrive à suivre, génération après génération, la vie de cette famille. Par contre j’ai trouvé le livre trop dense sur la durée, j’ai été obligée de reposer le livre à plusieurs reprises car pour tenir 1200 pages d’un coup il m’a manqué plus de rebondissements, plus de « drames » qui donnent envie de passer au chapitre suivant.

S 1-3Folio, 1200 pages, 12,90€, traduit de l’allemand par Barbara Fontaine et Monique Rival

Roman

« Le serpent majuscule » de Pierre Lemaitre

9782226392084-jJ’adore les romans de Pierre Lemaitre. J’ai découvert cet auteur avec ses polars, bien avant son prix Goncourt pour « Au revoir là-haut ». Depuis « Couleurs de l’incendie », roman qui m’avait subjuguée, je dis souvent que c’est mon auteur préféré.

Alors je ne pouvais pas passer à côté de ce « nouveau » roman, qui est en fait la publication d’un livre écrit en 1985 et jusqu’ici jamais proposé à un éditeur. L’auteur, dans la préface, est assez lucide sur l’accueil qui peut être fait à un livre écrit il y a plus de trente-cinq ans : « il sera jugé avec sévérité par le lecteur intransigeant et avec bienveillance par le lecteur amical ».

Je dois dire que ce n’est pas, et de loin, mon roman préféré de l’auteur. Je n’en reconnais même pas le style, la précision du mot juste que j’aime tant habituellement, ni la construction qui donne envie de tourner les pages frénétiquement dans la plupart de ses autres romans.

L’histoire est celle de Mathilde, une veuve un peu grosse, un peu banale, qui cache bien son jeu. Car Mathilde est tueuse à gages. Par contrat, elle tue sans scrupule, et avec une efficacité redoutable. Mais le lecteur comprend vite que Mathilde a une faille : sa mémoire lui joue des tours…

Bien que quelques bonnes trouvailles parsèment le récit ici ou là, l’essentiel est assez lent, un peu redondant… bref j’ai été déçue. Donc si par hasard vous n’avez encore jamais lu de roman de Pierre Lemaitre, ne commencez pas par celui-ci, j’en ai de bien meilleurs à vous conseiller.

Malgré tout, je suis une lectrice « amicale », et je garde bien à l’esprit que c’était une œuvre de jeunesse.

S 1-3Albin Michel, 336 pages, 20,90€

BD

« Nellie Bly – Dans l’antre de la folie » de Virginie Ollagnier et Carole Maurel

nellie blyeFin du XIXème siècle aux Etats-Unis. Nellie Bly se fait interner volontairement, pour dénoncer dans la presse les mauvais traitements subis par les femmes de l’asile psychiatrique de Blackwell. Dans cet asile vivent des femmes qui ont toute leur tête, mais que la misère ou une vie familiale compliquée ont rendu dépendantes ou fragiles.

Le traitement de l’histoire est bien mené. On entre tout de suite dans le « reportage » de Nellie, puis l’histoire revient sur son enfance et les raisons de son engagement. L’ensemble se lit assez bien, même si j’ai trouvé la BD un peu longue. Les dessins sont très bien réalisés, les visages des personnages expressifs, et les décors restituent bien l’ambiance.

Ne terminez pas cette BD sans lire les interviews intéressantes de la scénariste et de la dessinatrice, qui racontent comment elles se sont approprié le projet et comment elles ont abordé le personnage de Nellie Bly, la première femme journaliste d’investigation.

S 2-3Glénat, 176 pages, 22€

Policier

« Les beaux mensonges » de Céline de Roany

beaux mensongesJ’étais assez intriguée par cette couverture sombre. Qui était donc cette femme au visage à moitié caché ? Très vite le début du roman nous éclaire sur ce point : Céleste Ibar, brillante policière réputée pour son excellence à mener des interventions, a aussi été une victime, et son visage balafré témoigne encore d’une agression qu’elle a affrontée.

Dans la nouvelle équipe qu’elle intègre, elle est envoyée sur une affaire qui ressemble a priori à un suicide : la mort d’une femme célibataire, industrielle de renom, bienfaitrice, très pieuse, sur laquelle personne ne trouve rien à redire. Sauf que des indices amènent Céleste à douter du suicide : et si c’était un meurtre ?

Roman impossible à lâcher, dévoré très rapidement et que j’ouvrais avec impatience comme les meilleurs page turner, c’est très réussi. Le personnage de Céleste est complexe, son histoire un peu mystérieuse. Quant à l’enquête, elle offre de multiples pistes – jusqu’à la fin et les rebondissements des dernières pages.

J’ai bien noté quelques petites imperfections (comme la répétition de certaines scènes : par exemple quand les deux policiers s’assoient dans un canapé qui fait face au fauteuil dans lequel leur interlocuteur a choisi de s’installer), et un peu trop de personnages selon moi, mais c’est anecdotique par rapport à l’efficacité du récit. La présentation du livre laisse supposer qu’il y aura d’autres tomes, je sais déjà que je les lirai – car s’ils sont aussi bien menés que cette histoire, je suis sûre de passer encore de bons moments de lecture.

S 3-3Presses de la cité, 496 pages, 21€

Audio·Cosy mystery·Policier

« Les Enquêtes de Lady Rose : Volume 1 – Meurtre et séduction » de M.C. Beaton

ladyRoset1Vous connaissez le plaisir que j’ai à lire la série des « Agatha Raisin », dont j’ai déjà chroniqué une bonne vingtaine de tomes. De la même auteure, j’avais testé la série des « Hamish McBeth », mais je n’avais pas accroché et je me suis arrêtée au deuxième tome.

Avec « Les enquêtes de Lady Rose », je démarre une troisième série de M.C.Beaton. Et quelle bonne surprise ! Le style est très différent des deux autres séries. Même s’il s’agit à nouveau d’enquêtes, la tonalité est moins légère, mêlant à l’intrigue beaucoup de réflexions sociales (sur l’éducation des femmes, le mariage, les inégalités de classe…). Lady Rose est un personnage intéressant, pas aussi léger que ne le laisse le supposer la couverture du livre, toute en froufrous roses. Non, Lady Rose n’est pas juste une jolie jeune femme. Elle a compromis son entrée dans le monde en militant auprès des suffragettes, puis en dénonçant publiquement un homme qui voulait la séduire.

Elle est envoyée par ses parents dans une partie de campagne, où ils espèrent qu’elle pourra trouver un mari malgré ses débuts manqués dans la bonne société. Mais pendant le séjour, une jeune femme est retrouvée morte. Lady Rose est la seule à soupçonner un meurtre. Aidée du capitaine Harry Cathcart, qu’elle ne porte pourtant pas dans son cœur, elle va mener son enquête.

C’est une belle découverte, une histoire et un style très différents de ce que j’avais imaginé. Du coup je n’avais pas du tout l’impression de lire une redite des « Agatha Raisin » dans une version début 20ème siècle.

« Marque de fabrique » de M.C Beaton, les nombreux dialogues auraient pu rendre l’écoute difficile, mais Claire Tefnin réalise une belle performance en donnant sa voix à de nombreux personnages, femmes et hommes, aristocrates ou bonnes.

S 3-3Audiolib, 19,95€, 6h22 d’écoute, traduit par Amélie Juste-Thomas