BD

« Nellie Bly – Dans l’antre de la folie » de Virginie Ollagnier et Carole Maurel

nellie blyeFin du XIXème siècle aux Etats-Unis. Nellie Bly se fait interner volontairement, pour dénoncer dans la presse les mauvais traitements subis par les femmes de l’asile psychiatrique de Blackwell. Dans cet asile vivent des femmes qui ont toute leur tête, mais que la misère ou une vie familiale compliquée ont rendu dépendantes ou fragiles.

Le traitement de l’histoire est bien mené. On entre tout de suite dans le « reportage » de Nellie, puis l’histoire revient sur son enfance et les raisons de son engagement. L’ensemble se lit assez bien, même si j’ai trouvé la BD un peu longue. Les dessins sont très bien réalisés, les visages des personnages expressifs, et les décors restituent bien l’ambiance.

Ne terminez pas cette BD sans lire les interviews intéressantes de la scénariste et de la dessinatrice, qui racontent comment elles se sont approprié le projet et comment elles ont abordé le personnage de Nellie Bly, la première femme journaliste d’investigation.

S 2-3Glénat, 176 pages, 22€

BD

« Le Château de mon père », de Labat, Véber, Lemardelé, Vitrebert

versaillesSi le clin d’œil du titre à Pagnol est évident, le château dont il est question dans cette BD n’a rien à voir avec un petit château de Provence. Sous titrée « Versailles ressuscité », cette BD raconte en effet la vie du conservateur qui a redonné vie et lettres de noblesse à l’un des plus célèbres châteaux de France.

Remettons les événements dans leur contexte : en 1887, quand Pierre de Nolhac arrive en poste comme conservateur de Versailles, le château est un bel endormi. Symbole de la royauté dans une France qui célèbre la République, il n’est voué qu’à sommeiller pour l’Histoire. Ce qu’on attend de Pierre de Nolhac ? Qu’il poursuive un travail d’historien, qu’il s’amuse un peu avec les archives, et surtout qu’il n’en fasse pas trop. Mais ce n’est pas ainsi que le nouveau conservateur envisage sa tâche…

BD très originale sur une histoire qui m’était inconnue, j’ai beaucoup aimé suivre ce conservateur, qui arrive avec femme et enfants dans un château que eux vont détester, mais que lui va faire revivre. Les épreuves de la vie n’épargneront pas leur famille, plusieurs fois endeuillée, mais Pierre de Nolhac continue inlassablement sa mission. Humble, dévoué, il avance à petits pas, mais à pas sûrs. Les dessins en noir et blanc sont très réussis (si la Galerie des glaces nous est familière, je ne l’avais jamais vue en noir et blanc). C’est d’ailleurs un choix très judicieux : en couleurs, l’œil du lecteur se serait attardé sur les dorures de Versailles, alors qu’en noir et blanc le lecteur se concentre davantage sur Pierre de Nolhac et son travail.

S 3-3La boîte à bulles, 168 pages, 24€

BD

« Du côté de chez Swann » de Marcel Proust, adaptation BD de Stéphane Heuet

Du côté de chez SwannLire Proust… Beaucoup s’y sont aventurés, nombreux sont ceux qui y ont renoncé. Je me souviens avoir lu un tome de la « Recherche » il y a bien longtemps – j’avoue ne plus me souvenir duquel il s’agissait. C’est une lecture que j’appréhendais, et à juste titre puisque je n’ai pas poursuivi au-delà de ce premier essai.

Alors quand j’ai découvert qu’un scénariste et illustrateur s’était attaqué au « monstre » de la littérature française en bande dessinée, je me suis dit que c’était peut-être l’occasion de me réconcilier avec cette œuvre et, enfin, de comprendre de quoi elle parle !

C’était quitte ou double. Et finalement cette lecture s’est avérée une très agréable surprise ! J’avais opté pour le premier tome de l’intégrale, regroupant trois textes (« Combray », « Un amour de Swann », « Nom de pays »). Le premier permet de se plonger dans l’univers de Proust enfant ; on y retrouve des personnages connus (même quand on connaît mal l’œuvre), comme la tante Léonie, et bien sûr l’épisode de la madeleine… Mais la partie que j’ai préférée est l’adaptation d’ « Un amour de Swann », que j’ai dévorée, et qui relate les mésaventures amoureuses de Monsieur Swann, entiché d’une « cocotte » pour qui il serait prêt à tout – y compris à faire bonne figure dans une petite société d’entre-soi bourgeois qui finira par le rejeter.

La grande réussite de cette adaptation en BD est d’avoir conservé une partie du texte original, ce qui permet de ne pas trop édulcorer l’œuvre et d’en faire découvrir l’essence même à des néophytes comme moi. Quant aux illustrations, elles sont tout simplement très réussies, à la fois colorées (je n’aime pas les BD trop sombres) et renvoyant une certaine douceur qui s’accorde très bien avec le thème des souvenirs. Elles rendent aussi certains passages plus digestes – je continue à penser que certaines phrases du texte original sont d’une grammaire douteuse, en tout cas à plusieurs reprises j’ai dû en relire certaines pour les comprendre…

J’ai découvert cette BD parce qu’un autre tome a reçu un prix France Télévisions cet été. Et quand je suis allée sur le site de l’éditeur (Delcourt) j’ai découvert que le premier tome de la série date de… 1998. Autant dire que cette adaptation ressemble (aussi) à l’œuvre d’une vie !

S 3-3Delcourt, 240 pages, 39,95€

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« Culottées II, 1 » de Pénélope Bagieu

culottées IIJ’avais déjà chroniqué sur ce blog « Culottées », le tout premier tome, de Pénélope Bagieu. Hommage à des femmes plus ou moins célèbres, mais qui chacune à leur manière ont marqué l’Histoire.

Dans la première partie de ce livre II, j’ai retrouvé tout ce que j’avais aimé dans le premier tome : des portraits intéressants, marquants, forts. Les femmes mises en avant ici viennent d’horizons différents, et ont imposé leurs choix de femmes dans toutes sortes de domaine : sport, musique, combat pour l’égalité ou engagement sur le bien-être animal. Chacune s’est battue contre sa culture, sa famille, les préjugés sur ce que l’on imagine qu’une femme peut ou ne peut pas faire.

C’est un livre plein d’espoir et teinté de l’humour de Pénélope Bagieu ; mais c’est aussi un livre parfois très dur (le portrait de Phulan Devi coupe le souffle). Le pari de faire passer des messages essentiels tout en le faisant de manière accessible et parfois amusante, est évidemment réussir. On ne peut que se réjouir que des femmes aussi inspirantes soient ainsi mises en avant auprès d’un large public. A découvrir, à s’offrir, à offrir !

S 3-3Folio, 104 pages, 7,65€

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«La fille de Vercingétorix» de Jean-Yves Ferri et Didier Conrad

fille de verLa sortie d’un nouvel album d’Astérix est toujours un événement pour moi. Et tant pis si depuis bien longtemps ce sont de nouveaux auteur et dessinateur qui ont repris le flambeau à la suite d’Uderzo et de Goscinny. Si les nouvelles aventures des dernières années ont été plus ou moins réussies selon les années, je dois dire que « La fille de Vercingétorix » est plutôt un bon cru.

Tous les ingrédients sont réunis, évidemment : Astérix et Obélix en mission, Obélix qui râle un peu, le druide de bon conseil, les romains pas courageux… Et c’est ce qui fait que cela fonctionne, car après tout on continue à lire Astérix pour entretenir nos souvenirs d’enfance, non ? Alors quoi de plus plaisant que de retrouver tous les codes que l’on a aimés…

Cette fois-ci, les deux Gaulois les plus célèbres sont chargés de protéger la fille de Vercingétorix. Vercingétorix, comme l’Histoire s’en souvient, a perdu la bataille d’Alésia face à Jules César : autant dire que c’est un personnage dont le nom ne se prononce qu’à voix basse chez les irréductibles Gaulois (j’ai pensé à Harry Potter et à Voldemort Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom).

A part ça, je souligne le sympathique groupe d’adolescents, qui apporte beaucoup d’humour à cette aventure. Et, comme d’habitude, on cherche les clins d’oeil à l’actualité – celui à Charles Aznavour, décédé en octobre 2018, est plus qu’appuyé).

A vous de vous faire votre propre avis ; j’imagine que les inconditionnels des aventures originales trouveront de quoi redire, mais pour ma part j’ai aimé cette aventure assez simple mais plaisante.

S 3-3Editions Albert René, 9,99€

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«Les Zola» de Méliane Marcaggi et Alice Chemama

les-zolaIl m’a suffi de voir une seule planche de cette BD pour être séduite et pressée de découvrir la BD au complet. Et je n’ai pas été déçue, bien au contraire !

Cette biographie de Zola est incroyablement bien dessinée, avec des aquarelles aux couleurs tantôt vives, tantôt plus douces, et des détails qui rendent les personnages très expressifs (allez voir les regards page 6 ou page 83 par exemple). L’histoire commence dans la jeunesse d’Émile Zola, qui vit encore chez sa mère et fréquente des artistes comme Cézanne ou Manet. Le mouvement impressionniste est en marche et fait scandale. Zola se rêve écrivain, et c’est la rencontre avec Gabrielle qui va l’aider à s’engager sérieusement et méthodiquement dans cette voie.

Les amours de Zola, mais aussi les lieux et les scènes qui inspirent ses romans, sont au cœur de cette BD qui s’achève après la mort de l’écrivain. J’aurais volontiers pris plus de temps sur certains passages qui sont traités un peu vite (notamment l’affaire Dreyfus et le rôle de Zola sont sans doute incompréhensibles pour qui n’a pas déjà des éléments historiques en tête). Une vie si riche aurait pu sans difficulté remplir deux tomes, et j’aurais lu le deuxième avec grand plaisir, tant cette BD est réussie.

C’est aussi une BD que l’on peut prendre plaisir à relire plusieurs fois, pour revoir les dessins et en regarder les détails de chaque planche. Pour un premier album, la jeune Alice Chemama qui signe les dessins frappe fort : on en redemande !

S 3-3Dargaud, 116 pages, 19,99€

BD

«  Culottées » de Pénélope Bagieu

culottéesNous connaissons tous des portraits de femmes célèbres qui ont marqué l’histoire, mais Pénélope Bagieu a fait le choix de mettre en valeur des femmes moins connues, mais dont les vies ne sont pas moins passionnantes.

Dans son style tout particulièrement reconnaissable, elle croque dans de courtes BD de quelques pages des portraits à la fois sérieux sur le fond et un peu décalés sur la forme. Ces femmes qui, selon le sous-titre de l’ouvrage, « ne font que ce qu’elles veulent » sont des anonymes ou des femmes d’affaires, rebelles, chamane, actrice… L’intérêt du livre réside dans la variété des portraits.

J’ai particulièrement aimé deux portraits parmi les huit présentés dans cette première partie.

Le premier, c’est celui de Margaret Hamilton, actrice américaine qui a interprété notamment la méchante sorcière dans « Le magicien d’Oz » ; les anecdotes autour du rôle phare de sa carrière sont très amusantes et redonnent beaucoup d’humanité à celle qui a effrayé des générations d’enfants !

Le second est celui de Annette Kellerman, championne de natation après avoir vaincu la polio, et qui a contribué à sa manière à libérer le corps des femmes en créant un maillot de bain à l’origine des maillots de bain moderne.

Et voilà encore un livre qui va augmenter ma pile de lectures, car maintenant je suis à la recherche d’une biographie de Annette Kellerman. Un livre qui donne envie d’autres livres, c’est toujours un bonheur.

S 3-3Folio, Livre I, partie 1

BD

« Meurtre au Mont-Saint-Michel » de Djian et Jaffredo

501 MEURTRES MT ST MICHEL[VO].inddAh, l’influence d’une couverture de livre pour se décider à le lire… On pourrait écrire inlassablement dessus. Et ce qui est vrai pour les romans l’est a fortiori encore plus pour les bandes dessinées. Si j’ai décidé de lire « Meurtre au Mont-Saint-Michel », c’est d’abord parce que le dessin de couverture m’a séduite. Et aussi, c’est vrai, parce que je lis pas mal de romans policiers en ce moment et que j’avais envie de lire une BD policière.

L’histoire se passe en 1936. Alors que l’Europe est en plein tourment, le Mont-Saint-Michel est encore préservé, vase clos que seules les nouvelles qui arrivent en lisant le journal viennent perturber. Ici tout le monde se connaît. Lorsque la petite Lucie disparaît mystérieusement, juste après le meurtre de la bonne du curé, ses parents sont fous d’inquiétude. Le maire prend la direction des recherches, et entraîne avec lui tous les habitants du Mont. On a vu un étranger vagabonder depuis plusieurs jours, il n’est sans doute pas innocent…

Tout au long de la BD, les dessins ont été à la hauteur de la promesse de la couverture. Quiconque a déjà eu le bonheur de se « perdre » dans les ruelles du Mont (je ne parle pas de la rue principale noyée sous les touristes et les boutiques de « souvenirs »), retrouvera dans cette BD le charme des ruelles, des escaliers interminables, et cette sensation d’être dans un monde à part.

Même si le format de la BD (une quarantaine de pages) est un peu juste pour avoir le temps d’installer des fausses pistes et des rebondissements, et creuser un peu plus la psychologie des personnages, le scenario tient la route et forme, avec les dessins, un ouvrage cohérent et plutôt plaisant à lire.

S 2-3Glénat, scénario : Jean-Blaise Djian, dessins : Marie Jaffredo

BD

«Bidochon – Maison, sucrée maison » de Christian Binet

bidochon04_1034J’ai lu cette BD pour la première fois il y a bien des années, et je me souviens qu’elle m’avait déjà bien fait rigoler. En parcourant une bibliothèque cet été, je suis tombée par hasard dessus et je l’ai relue, avec autant de plaisir que la première fois (même si je me souvenais de certaines blagues), un peu comme on revoit un film comique devenu un classique.

Robert et Raymonde Bidochon sont décidés : fini l’appartement en HLM, ils vont faire construire leur maison. Après une escroquerie et des châteaux en Espagne, ils redescendent sur Terre pour un projet plus modeste. Mais la construction de leur maison ne va pas (du tout) se passer comme prévu : entrepreneurs, agents immobiliers, promoteurs, semblent tous se liguer contre les Bidochon ! Les rebondissements cocasses s’enchaînent jusqu’à la toute dernière page de cette BD qui sent le vécu. C’est culte !

S 3-3Fluide glacial

BD

«Les Cahiers d’Esther, histoires de mes 10 ans» de Riad Sattouf

estherEsther a neuf ans (oui, passons sur cet étrange décalage avec le titre), et sur la base de son quotidien, Riad Sattouf a écrit cette BD pleine de charme.

Esther va à l’école, a des copines, déteste les garçons (sauf son papa), part en vacances chez sa grand-mère, aime Kendji Girac et Black M. C’est une petite fille de son époque, plutôt bien dans sa peau… et qui rêve d’avoir un iPhone. Chroniques d’une pré-adolescente ordinaire, les « Cahiers d’Esther » peuvent plaire aussi bien aux jeunes lectrices qu’à leurs parents, et peut rappeler aux autres adultes leurs souvenirs de cour de récréation. Car si Esther est bien ancrée dans les années 2010, on pourrait la transposer assez facilement la transposer dans d’autres époques (il suffirait de changer les noms des chanteurs stars!).

Sans être une BD humoristique, c’est une lecture agréable et plutôt positive. Je ne connaissais Riad Sattouf que de nom, et cette première lecture me donne envie de découvrir d’autres titres du même auteur. J’ai d’ailleurs découvert qu’il existe deux autres tomes des « Cahiers d’Esther » : à découvrir !

S 3-3Allary Editions