Biographie·Roman

« La valse des arbres et du ciel » de Jean-Michel Guenassia

9782253073710-001-TJean-Michel Guenassia est l’auteur du « Club des incorrigibles optimistes », dont je me souviens avoir apprécié la lecture il y a une dizaine d’années. Je n’avais rien lu de lui depuis cette époque, et c’est le hasard d’une offre promotionnelle du Livre de poche qui m’a permis de découvrir ce roman.

Le point de départ est très original car le roman est construit comme le témoignage de Marguerite Gachet, la fille du célèbre Dr Gachet peint par Van Gogh. Elle y raconte tout d’abord ses rêves de jeune fille en quête de liberté, d’émancipation pour peindre, et de voyage vers l’Amérique. Jusqu’au jour où arrive à Auvers sur Oise un peintre hollandais. Il ne vend pas encore de tableaux, mais se revendique comme un peintre de la modernité. Introduit par Pissaro auprès du Dr Gachet, celui-ci accepte de soigner sa maladie – on imagine une dépression même si le terme n’est jamais explicité – en échange de quelques toiles.

Gachet n’est ni philanthrope ni mécène : son soutien aux artistes est calculé, il espère tirer un jour une fortune des œuvres acquises contre des consultations.

L’arrivée de Van Gogh est une révélation pour Marguerite – révélation artistique autant que sentimentale.

Le roman est bien fait car on oscille entre la biographie et le roman, sans toujours démêler le vrai du faux. Si vous avez la possibilité de consulter des tableaux de Van Gogh en même temps, ce sera assurément un plus. Je me souviens avoir visité enfant Auvers sur Oise et avoir été frappée par la comparaison entre les lieux réels et les peintures de Van Gogh. Ici aussi, entre art et réalité, il faut se laisser porter par des allers et retours. Et au passage, voir quelques certitudes sur la fin de vie de Van Gogh être sérieusement remises en cause. C’est une approche originale et plaisante pour parler d’un artiste en dehors des contraintes de la biographie officielle, tout en apportant des éléments historiques. Entre fiction et réalité, ce roman se lit avec grand plaisir.

S 3-3Le Livre de poche, 288 pages, 7,70€ (le mien était offert dans le cadre d’une promo)

Biographie

« Le Suppléant », Prince Harry

9782213725048-001-TPourquoi ai-je eu envie de lire ce livre ? Ce n’est pas seulement en raison de toute la publicité qui a été faite autour – j’y suis assez peu sensible. En revanche, l’idée de découvrir par un témoin direct les coulisses de l’institution qu’est la monarchie britannique m’a intéressée. Car derrière les dorures et les sourires de façade, il n’est pas difficile d’imaginer les complots, les désillusions, et l’envers moins rose du décor. Et comme, quand même, il semblait acquis que ce livre ne serait pas une ode à la monarchie, cela pouvait être de bon augure.

Premier constat en voyant le livre : c’est un gros pavé de 500 pages, 26,50€ tout de même.

Deuxième constat qui m’a beaucoup inquiétée au début de la lecture (même si j’avais conscience que ce livre n’est pas de la littérature) : dès les premières pages j’ai été gênée par le style ; est-ce mal écrit ou mal traduit, je ne sais pas le dire, mais le début est franchement pénible à lire, à tel point que j’ai même hésité à poursuivre (la curiosité l’a emporté, je l’ai lu en entier).

Le récit du prince Harry commence à la mort de sa mère, la princesse Diana. On se souvient des images de ce garçon, marchant tête baissée derrière le corbillard. Ce que j’ai appris, c’est que ce jeune garçon est resté pendant des années dans le déni le plus total, imaginant que sa mère n’était pas morte mais qu’elle se cachait, quelque part à l’abri des paparazzis. On ne peut que compatir à la douleur de ce gamin qui aurait eu besoin d’être mieux entouré et aidé ; et l’on comprend mieux sa haine (le terme n’est pas trop fort) des paparazzis, qui prend sa source dans son jeune âge et n’a jamais cessé de grandir – c’est un fil rouge du récit.

Presque la moitié du livre est consacrée à sa carrière militaire. Si ses engagements et ses apprentissages, sa quête de liberté, peuvent intéresser, j’ai trouvé toute cette partie beaucoup trop longue et ennuyeuse.

Son coup de foudre pour Meghan est raconté vers la page 350, et quand on lit tous les déboires que les tabloïds ont fait vivre au jeune couple, on comprend mieux pourquoi Harry a cherché à tout prix à préserver sa femme et sa famille, jusqu’au renoncement et à la fuite.

Les membres de la famille royale se font tous un peu égratigner, mais cela reste nuancé (il témoigne aussi de l’amour qu’il a pour son père, son frère, sa famille), et il faut se méfier des extraits sortis de leur contexte.

On sent surtout beaucoup de détresse, un terrible sentiment d’impuissance face au pouvoir médiatique mais aussi face aux personnages les plus influents du Palais.

Je n’ai pas à juger, c’est un récit autobiographique, la vérité d’un homme dont on ne peut que ressentir l’énorme besoin de s’exprimer enfin, de vider son sac. Ce n’est pas irrespectueux de la monarchie, ni aussi méchant envers sa famille que l’on pourrait le penser quand on n’a lu que des extraits.

S 2-3Fayard, 544 pages, 26,50€

Biographie

« Je suis le carnet de Dora Maar » de Brigitte Benkemoun

9782253820444-001-TC’est le hasard le plus complet qui a mis ce carnet d’adresses entre les mains de Brigitte Benkemoun. Ayant acheté un carnet à un antiquaire, elle y a trouvé, glissé à la fin, ce vieux répertoire. Après enquête et croisement des noms qui y figurent, elle en déduit que sa propriétaire était Dora Maar.

D’abord par jeu et par curiosité, puis par volonté d’aller au bout de ses recherches pour mieux comprendre Dora Maar, l’auteure a fait des recherches sur quasiment chacun des contacts du répertoire. Quels étaient les liens de chacun avec Dora Maar, leur place dans sa vie ? Au fil des pages, courts chapitres tous très intéressants, j’ai plongé dans un univers d’art et de création, le groupe surréaliste des années 1950, et l’on fréquente le temps d’un livre Eluard ou Picasso. Picasso n’en ressort pas grandi, Dora Maar est présentée aussi bien avec ses talents que ses zones d’ombre, et c’est tout à l’honneur de l’auteure, une fois passée la joie de découvrir ce carnet, d’avoir pris la distance nécessaire sur les personnalités qui y figurent.

J’ai beaucoup aimé, à travers un simple répertoire, me plonger dans cette époque. Le récit me parlait, j’avais l’impression d’observer leur groupe. J’ai aussi beaucoup appris sur leurs liens, leurs personnalités, et de Paris à la Côte d’Azur j’ai voyagé dans le temps et dans la France de l’époque.

J’ai aussi pensé au « Madeleine Project » de Clara Beaudoux, qui avec une autre approche, reconstituait aussi des morceaux de vie d’une personne à partir d’objets du quotidien.

J’ai regretté qu’il n’y ait pas de fac simile du carnet, juste pour le plaisir de voir l’écriture de Dora Maar. Cela n’a pas nui à mon plaisir de lecture mais j’ai été un peu déçue car je m’attendais à en voir.

S 3-3Le livre de poche, 288 pages, 7,70€

Biographie

« Romy et les lumières de Paris » de Michelle Marly

9782265155466ORIDe l’histoire d’amour entre Romy Schneider et Alain Delon, je ne connaissais que quelques images maintes fois diffusées à la télévision, celles où l’on voit Delon accueillir Romy à sa descente de l’avion, juste avant le tournage de « La Piscine ». Ce sont d’ailleurs ces images qui m’avaient donné envie de voir le film. A ce moment-là, ils étaient déjà séparés.

Mais quelques années auparavant, ils avaient vécu une belle et longue histoire d’amour. C’est un parti pris original d’avoir centre cette biographie sur les quelques années de leur amour, à Paris. Romy, étouffée par sa mère et par son rôle de Sissi, sort à peine de l’adolescence lorsqu’elle rencontre Delon. Il sera son premier vrai amour. Lui est au début de sa carrière, alors qu’elle est une star. Il dit volontiers que s’il n’avait pas été acteur, il serait devenu gangster : il est loin de l’image du gendre que les parents de Romy espèrent !

Au-delà de son histoire avec Delon, cette biographie raconte aussi la rencontre entre Romy et la France, mais aussi ses tiraillements entre sa famille et son légitime besoin d’émancipation.

J’ai appris beaucoup de choses dans ce livre ; ajouter quelques photos du couple auraient été une bonne idée.

S 3-3Fleuve éditions, 416 pages, 20,90€

Biographie

« Ce que Frida m’a donné » de Rosa Maria Unda Souki

CequeFridamadonneLa première fois que j’ai vu ce livre, j’ai cru que les reproductions de tableaux qui forment la couverture étaient des tableaux de Frida Khalo. L’univers artistique, coloré, avec des meubles du quotidien, rappelle beaucoup celui de la peintre mexicaine.

Dans cet ouvrage qui ne ressemble à aucun autre, Rosa Maria Unda Souki raconte son arrivée à Paris et l’organisation d’une exposition de tableaux qu’elle a consacrés à Frida et à sa « maison bleue » au Mexique.

J’avais imaginé que l’auteure nous raconterait son expérience en visitant la « maison bleue », ses impressions sur place, ce qu’elle avait ressenti. En réalité le récit est très centré autour de l’exposition, entre rétrospective de ce qui l’a inspirée et projection dans un futur proche (l’exposition) : où accrocher les tableaux, quel texte écrire pour l’exposition ?

Il est très intéressant de suivre ses doutes, ses interrogations, une certaine forme de flemme aussi.

Le livre est en soi un joli objet à lire et à feuilleter : chaque page comporte soit des reproductions des tableaux de l’auteure, soit des croquis illustratifs de son quotidien. Même la mise en forme du texte est pensée pour s’articuler avec les dessins. C’est très original, et bien sûr cela me donne envie de ressortir mon livre sur Frida pour revoir quelques détails de ses tableaux. Un bon livre en appelle toujours un autre.

S 3-3Zulma, 22,50€

Biographie

« Oeuvres autobiographiques t3 – Du Groenland à Bora-Bora» de Paul-Emile Victor

PEVSi vous avez lu mes dernières chroniques, il ne vous aura pas échappé que je me suis enthousiasmée pour les écrits de Paul-Emile Victor – j’ai déjà chroniqué les 2 premiers tomes de ses « œuvres autobiographiques ».

Hélas le troisième tome (couvrant les années 1937-1995) n’a pas du tout la même saveur que les deux premiers. Finie la biographie d’un jeune homme du Jura parti explorer le Groenland : l’après-guerre sonne l’heure de la conquête à grande échelle, et le récit s’oriente vers davantage d’explications technologiques ou sur les équipes des expéditions polaires, que sur le parcours de Paul-Emile Victor et sur ses questionnements intimes. C’est dommage : d’une part, les explications sur les véhicules à chenilles m’ont ennuyée ; d’autre part, je reste sur ma faim quant aux questions sur « l’homme Paul-Emile Victor ». Sur son mariage : rien. Sur ses trois premiers enfants : à peine quelques lignes à la fin. Sur le choix de son départ à Bora-Bora pour finir sa vie : pas grand-chose de plus. J’ignore si l’auteur n’a jamais écrit sur ces sujets, ou si c’est le choix des textes ici regroupés qui est en cause, mais ce troisième tome est nettement en dessous des deux premiers.

Que cela ne vous empêche pas de découvrir ce coffret, au moins pour les deux premiers tomes qui sont passionnants !

S 1-3Transboreal, coffret de 3 volumes

Biographie

« Oeuvres autobiographiques t2 – L’iglou » de Paul-Emile Victor

PEVEn démarrant cette trilogie, je n’imaginais pas à quel point cette lecture serait captivante et marquante – pour preuve, j’en parle chaque jour autour de moi, tantôt pour raconter une anecdote, tantôt pour partager des étonnements ou des interrogations.

Ce deuxième tome est étrangement intitulé « L’iglou » : je dis « étrangement » car je crois que le mot « iglou » n’est jamais mentionné dans le texte – l’auteur parle seulement de hutte, et il n’y a nulle référence à ce que j’imagine être un iglou, fait de blocs de glace. Qu’importe, Paul-Emile Victor est enfin arrivé au Groenland (1934). Il va y étudier la population eskimo, en ramènera des objets et des notes aujourd’hui en partie conservés au Musée du Quai Branly (après avoir été transférés du Musée de l’homme). Mais surtout, il va vivre avec ces hommes, ces femmes, ces enfants, partager leur quotidien.

Si le premier tome était intéressant car il montrait le cheminement vers la réalisation d’un rêve, ce deuxième tome est celui de la concrétisation. Très vite on comprend que Paul-Emile Victor ne peut être bien qu’ici. Quand il retourne à Paris après son expédition, il est en cage, dans un monde qu’il comprend moins bien que celui des eskimos

« Et ces tonnes de gens qui courent dans les rues, qui sautent dans les autobus et les métros, qui ne s’assoient que pour reprendre assez de force pour courir encore, sauter davantage avec pour seules pensées les fins de mois, le panier de la semaine, la coqueluche ou la diphtérie de leurs enfants ; pour seules joies, le gueuleton et le cinéma du dimanche et pour seul but « gagner leur vie » (c’est-à-dire la perdre) pour s’assurer la croûte et le toit. »

Alors il repart. Il traverse avec trois autres hommes le Groenland, puis se fixe dans un village pour un hivernage. Il s’y trouve une famille de coeur, auprès de Doumidia notamment.

Si son acclimatation ne semble pas poser de problème (sur l’alimentation, la gestion du froid etc), l’auteur ne cache pas ses craintes, lui qui a toujours été sujet au cafard, cette « petite bête grignotante », ni son angoisse récurrente de devoir un jour retourner dans son Jura natal pour reprendre l’usine familiale de pipes et être « le-fils-Victor- successeur de son père ».

J’ai refermé ce tome avec l’envie de démarrer aussitôt le 3e, mais aussi avec beaucoup de questions en tête ; en particulier, pourquoi est-il reparti du Groenland alors qu’il y était si heureux ?

S 3-3Transboreal, coffret de 3 volumes

Biographie

« Oeuvres autobiographiques t1 – La Mansarde » de Paul-Emile Victor

PEVC’est une exposition qui m’a donné envie de découvrir les écrits de Paul-Emile Victor. Hésitant entre plusieurs titres, dont certains proposés en poche, j’ai finalement choisi un coffret contenant les trois tomes de ses « Oeuvres autobiographiques ».

Dans ce premier tome, « La Mansarde », ce sont les années 1907-1934 qui sont racontées, c’est-à-dire les années de jeunesse de l’explorateur, jusqu’à son départ au Groenland. Ce que j’aime le plus dans les biographies et les autobiographies, c’est justement de remonter aux sources, pour comprendre à quel moment a eu lieu le « déclic » qui a transformé une vie en destin. Paul-Emile Victor explique très bien ce moment-là de sa vie (page 261), je vous laisse le découvrir.

Paul-Emile Victor a grandi dans le Jura, dans une famille d’industriels bourgeois (son père était à la tête d’une usine de pipes). Très jeune il a deux rêves : les Pôles et la Polynésie. Et si ses années d’adolescent puis de jeune homme l’ont amené à faire des études (poussé par son père qui trouvait que des études lui seraient toujours utiles), puis à naviguer (il espérait voir le monde), ce rêve est resté le fil rouge de ses pensées.

« La plupart des hommes apprennent à tempérer leurs aspirations d’enfants ou d’adolescents, grâce aux leçons de l’expérience. Les gens dans mon genre s’y refusent. : de l’expérience, ils ne retiennent que ce qui peut servir leurs projets d’enfant. Le jour venu, ils les réalisent avec toutes les ressources de l’adulte. »

Le récit n’est pas complètement chronologique, même si les chapitres sont bornés dans le temps par cette période « avant » le Groenland. Les chapitres ont plutôt des thèmes, parfois familiaux ou anecdotiques, des portraits de personnages rencontrés dans son enfance (le rémouleur etc). Seules sont passées plutôt sous silence les amours de sa jeunesse.

Habitué très jeune à prendre des notes sur ses journées, on sent que l’auteur s’en est servi pour alimenter ses souvenirs de détails. Le climat jurassien est décrit avec autant de précision que les roulis et tangages des bateaux sur lesquels il a navigué. L’écriture est fluide et le texte se lit comme un roman d’aventure. J’ai hâte de lire le deuxième tome !

S 3-3Transboreal, coffret de 3 ouvrages

Audio·Biographie·Essai / Document

«Une farouche liberté» de Gisèle Halimi

farouche libertéJe me souviens très bien comment j’ai découvert le parcours de Gisèle Halimi pour la première fois. J’étais adolescente et fréquentais avec assiduité la bibliothèque municipale ; j’y allais avec une longue liste de livres que j’avais envie de lire et qui n’y étaient jamais, alors j’en choisissais d’autres, souvent au hasard, parce qu’un titre ou une couverture avaient attiré mon attention.

Je ne me souviens plus du livre que j’avais lu, je pense que c’était « Le lait de l’oranger ». Mais je me souviens d’avoir été frappée par le parcours de cette femme, courageuse, tellement engagée, dont je découvrais les combats.

En écoutant «Une farouche liberté», j’ai retrouvé dès les premiers instants d’écoute tout ce qui avait forcé mon admiration dans le parcours de cette femme. Interrogée par Annick Cojean, Gisèle Halimi raconte – par la voix de Françoise Gillard dans la version audio – sa jeunesse, sa prise de conscience de ce qu’implique d’être une femme, les rencontres décisives de son parcours féministe (dont celui avec Simone de Beauvoir) puis les combats qu’elle a menés et son entrée en politique pour continuer à faire évoluer la cause des femmes par d’autres moyens.

C’est passionnant ! J’aurais voulu que cette écoute dure des heures, j’aurais adoré assister aux échanges entre Annick Cojean et Gisèle Halimi, et chaque question posée me donnait envie d’en poser deux autres.

Il est captivant de suivre le parcours de cette pionnière, et surtout que ce soit elle qui le raconte, qui explique les « déclics » mais aussi certaines de ses difficultés. Son récit d’un avortement raté et d’un curetage « à vif » fait froid dans le dos ; j’ai pensé à celui d’Annie Ernaux dans « L’Evénement », qui est un livre qu’on n’oublie jamais.

Françoise Gillard interprète Gisèle Halimi plus qu’elle ne lit ses propos ; elle porte avec sa voix tout l’enthousiasme et toute la révolte de l’avocate, et rend ce livre d’autant plus agréable à écouter.

Gisèle Halimi est décédée en juillet 2020, mais son témoignage doit continuer à être entendu et transmis.

S 3-3Audiolib, 3h21 d’écoute, 18,90€. L’écoute en classe de ce CD est autorisée par l’éditeur.

Biographie

« Le roman des Guerlain » de Elisabeth de Feydeau

guerlainLes sagas familiales ont quelque chose de passionnant, et celle des Guerlain n’échappe pas à la règle. L’histoire commence avec Pierre-François-Pascal Guerlain, qui a créé sa propre parfumerie à une époque (1828) où le parfum était vu davantage comme un remède d’apothicaire (pour se frictionner) que comme un luxe ou un plaisir pour les sens. Le début du livre est particulièrement intéressant en ce qu’il décrit cette « révolution » que Guerlain, comme quelques autres, perçoivent dans l’évolution de la société, et dans l’orientation nouvelle qu’ils vont donner à la parfumerie, changeant ainsi la représentation et l’usage que l’on fait du parfum.

« Depuis la révolution de 1789, les signes distinctifs traditionnels – coiffures, costumes – s’étaient peu à peu estompés. Les apparences étaient devenues plus trompeuses que jamais. Aussi, d’autres signaux avaient dû prendre le relais, et les Guerlain s’étaient montrés redoutablement habiles à décrypter, puis à accompagner ce nouveau jeu des apparences. »

Installé à Paris, Guerlain est aussi un redoutable homme d’affaires, qui gère sa distribution (réservant la vente de ses produits dans Paris à sa propre boutique, ce qui est toujours le cas aujourd’hui).

J’aurais aimé lire le livre avec quelques échantillons à portée de main, pour mieux appréhender les descriptions des parfums les plus emblématiques de la maison. N’avez-vous pas la même envie de « sentir » en lisant ceci :

« Avec subtilité et douceur, L’heure bleue allie les notes poudrées de l’iris et gourmandes de la vanille, mariées au musc, à la chaleur de l’œillet et de l’anis, lui donnant un velouté sensuel très particulier. »

Plusieurs générations (d’hommes) se succéderont à la tête de la maison Guerlain. Je me suis un peu perdue dans l’arbre généalogique, et j’ai surtout regretté que le livre s’arrête dans les années 1960 – seules quelques informations succinctes sont données dans l’épilogue pour poursuivre l’histoire familiale jusqu’à aujourd’hui. Toute la famille s’est en tout cas attachée pendant des générations à suivre un principe :

« Faites de bons produits, ne cédez jamais sur la qualité. Pour le reste, ayez des idées simples et appliquez-les scrupuleusement ».

Sur ce conseil, « transmis de génération en génération », c’est tout un empire qui s’est créé.

S 2-3Flammarion, 354 pages, 23€