Roman

« Le Complexe d’Eden Bellwether » de Benjamin Wood

lecomplexededenbellwether02ii-hd-572098-380x570J’ai lu récemment un excellent roman psychologique, « Mrs March », et je suis très contente d’en avoir découvert un autre, cette fois-ci chez Zulma.

Oscar est un jeune aide-soignant. Un jour, entendant le son d’un orgue s’échapper d’une église, il entre par curiosité. Il se lie d’amitié avec Eden, le jeune organiste, et sa sœur Iris, dont Oscar tombe amoureux. Mais très vite Oscar découvre que le génie musical d’Eden cache une face plus sombre.

Roman très bien écrit, qui explore à la fois la puissance guérisseuse de la musique, la folie humaine, la maladie et l’espoir, mais aussi des thèmes de société. D’un côté, Oscar, jeune homme simple et responsable, autonome, travaille pour gagner sa vie ; de l’autre, une jeunesse dorée représentée par Eden, Iris et leurs amis, étudiants favorisés, fêtards, intelligents et cultivés, semblent coupés du monde. La confrontation des deux univers est fascinante. Le lecteur peut se mettre à la place d’Oscar, et découvre avec lui un univers à part, et surtout des personnages très complexes. Eden, le musicien brillant, est-il un génie ou un fou ? Sa sœur, Iris, est-elle admirative de son frère, ou croit-elle à l’imposture ?

Ajoutez à ces personnages deux vieux hommes en fin de vie, qui vont être à la fois les passerelles entre ces deux mondes, et une bouée de secours pour Oscar.

Avec une juste dose de suspense, le roman pousse le lecteur dans ses retranchements, et nous oblige à nous interroger sur ce que nous serions prêts à croire ou à accepter face à la maladie ou une blessure. L’écriture est sensible et contribue à faire osciller le lecteur entre réalité et folie. Une réussite.

« Pour ceux qui ont la foi, aucune explication n’est nécessaire. Pour ceux qui ne l’ont pas, aucune explication n’est possible. »

S 3-3Zulma poche, 515 pages, 9,95€

Roman

« Nouvelle Babel » de Michel Bussi

9782258200326ORISi vous pensiez qu’internet avait aboli en partie les frontières, c’est bien peu de chose par rapport à ce que Michel Bussi imagine pour 2097. Les frontières ont vraiment disparu depuis que les humains sont capables de se téléporter. En une fraction de seconde, ils peuvent se déplacer au bout du monde.

Mais l’équilibre de ce monde pourrait être bouleversé depuis que dix personnes ont été assassinée sur leur île privée, et que leur meurtrier a laissé derrière lui plusieurs messages inquiétants. Trois enquêteurs (des personnages bien croqués comme dans tous les romans de l’auteur, avec chacun un tempérament qui le rend attachant à sa manière) sont envoyés sur place. Mais leur enquête va être rendue complexe par un étrange duo, celui formé par un journaliste en quête de scoop et une institutrice nostalgique du « monde d’avant ».

J’ai adoré ce roman à la fois fascinant, inquiétant, qui m’a fait voyager dans le temps mais aussi autour du monde, dans les endroits les plus spectaculaires ou les plus reculés – pas étonnant quand on connaît le passé de géographe de l’auteur. Il est amusant d’imaginer ce monde où avions, voitures, et mêmes vélos n’ont plus leur place ; où l’espagnol, langue des pays du soleil et de la fête, est devenue langue internationale.

Le roman fourmille aussi de clins d’œil au monde d’aujourd’hui (même aux confinements!) et fait aussi réfléchir le lecteur : car si le début du roman montre surtout les avantages de ce monde universel, où l’on peut prendre son petit-déjeuner n’importe où sur la planète, vivre au Japon et travailler en France, petit à petit le lecteur est amené à s’interroger sur les revers de ce monde idyllique.

La fin du roman est plus facilement prévisible que dans d’autres romans de l’auteur, mais cela n’a pas gâché mon plaisir de lecture. Autant vous dire que j’ai dévoré les plus de 400 pages.

Je suis toujours un peu hésitante en commençant la lecture d’un roman d’anticipation : soit c’est caricatural et je n’aime pas du tout ; soit c’est bien dosé et je suis capable de me projeter dans l’histoire. Avec Michel Bussi, une fois de plus, c’est une grande réussite.

S 3-3Presses de la Cité, 456 pages, 21,90€

Roman

« Mrs March » de Virginia Feito

mrs marchDans la catégorie des thrillers psychologiques, « Mrs March » est un très bon cru.

Dès les premières pages, on comprend que Mrs March n’est pas la femme au foyer aussi lisse qu’elle pourrait le laisser penser. Alertée par sa boulangère, qui pense que son mari s’est inspirée d’elle pour décrire l’héroïne prostituée de son nouveau roman, Mrs March est dans tous ses états. A partir de là, le lecteur devient le témoin du quotidien de Mrs March, et le confident de ses interrogations. Qui est vraiment George March, le célèbre écrivain ? Que cache-t-il à sa femme ?

Je me suis posé beaucoup de questions au fil des chapitres ; j’ai plaint Mrs March, je l’ai redoutée, j’ai essayé de la comprendre. La lecture est très addictive, une pelote psychologique que l’on s’amuse à dénouer.

Le personnage de Mrs March est aussi attachant qu’inquiétant ; George son mari écrivain est assez mystérieux, la gouvernante Martha, la boulangère, la voisine, les amis de George, sont autant de personnages qui donnent de la profondeur au texte, et qui contribuent à semer le doute dans l’esprit du lecteur.

La fin n’est pas complètement surprenante, elle est une conclusion assez logique à tout ce que l’auteure a créé au fil des chapitres.

Il en faut du talent, pour écrire un premier roman d’une telle qualité ! J’espère qu’il y en aura d’autres.

S 3-3Le Cherche Midi, 352 pages, 22€

Roman

« L’Hôtel du cygne » de Zhang Yueran

LHôtelDuCygne-375x570Chine, de nos jours.

Yu Ling est nourrice dans une famille très aisée. Elle s’occupe du petit Dada, un garçon gentil mais gâté et sans ami. Avec son fiancé, Yu Ling a organisé un improbable kidnapping de l’enfant, pour obtenir de l’argent en rançon – mais sans faire le moindre mal à Dada, qu’au fond elle aime bien.

Or leur plan est contrarié par l’arrestation du père et du grand-père de Dada – la mère, quant à elle, est partie à Hong Kong, une histoire de botox sans doute…

Seule avec l’enfant, le personnage de Yu Ling évolue progressivement vers plus de tendresse maternelle, et on s’attache à ce duo.

Je ne connais pas la littérature chinoise contemporaine, et comme souvent c’est en faisant une confiance quasi aveugle à Zulma que ce livre avait retenu mon attention – j’adore cette maison d’édition, qui m’a déjà amenée vers d’étonnantes découvertes… et je ne parle même pas de leurs couvertures toujours très belles. En tout cas j’ai bien fait d’aller vers ce court roman, une lecture à la fois plaisante, instructive (sur la Chine aisée) et parsemée de tendresse. Dada, malgré son côté « enfant gâté », est un personnage attachant. Dans son « hôtel du cygne », une tente au milieu du salon, il reçoit toutes sortes d’amis qu’il se crée – jouets et animaux. Quant à Yu Ling, la complexité de son personnage transparaît avec parcimonie, sans cliché ni facilité. En 160 pages, c’est un résultat réussi !

S 3-3Zulma, 160 pages, 17,50€, traduit du chinois par Lucie Modde

Roman

« Le mystère Caravage » de Peter Dempf

9782749166148ORIC’est un gros pavé, près de 600 pages cachées sous une couverture rouge foncé qui met en lumière les détails d’un tableau. Du Caravage, je ne connaissais pas grand-chose, j’ai vu certains de ses tableaux mais il n’appartient pas aux courants artistiques auxquels je suis le plus sensible. Et pourtant, ce roman historique, inspiré de la vie du peintre mais avec une bonne dose de romanesque, m’a totalement conquise.

Le roman s’ouvre dans les premières années de 1600. Michelangelo Merisi, « Caravaggio », est déjà un peintre célèbre. Ses tableaux font régulièrement scandale, et sa dernière œuvre, où il s’est inspiré du cadavre d’une prostituée comme modèle pour la Vierge Marie, achève de déchaîner les passions autour de sa peinture.

Très vite apparait dans le roman une galerie de personnages passionnants : Nerina, sa jeune apprentie, qui veille sur le peintre et ses excès ; les Borghese, dont l’oncle ambitionne de devenir pape, tandis que le neveu défend la modernité du peintre ; Enrico, le précepteur du jeune Ferdinando Gonzaga, très ambigus au début du roman, et dont le rôle s’éclaircit au fil du roman. Car c’est tout le plaisir de cette lecture : Caravaggio suscite la controverse, et les personnages qui l’entourent sont souvent ambigus, parfois partagés eux-mêmes entre l’admiration pour le talent du peintre, et le rejet de ses provocations. La démarche du peintre, ses choix créatifs, sont très bien racontés dans le roman. C’est un roman historique, artistique, qui m’a transportée dans l’Italie de 1600. C’est passionnant, cela se lit comme un roman d’aventures car l’on suit les fuites successives de Caravaggio, persécuté par deux mystérieux personnages religieux, jusqu’au dénouement final qui réserve d’ultimes rebondissements.

Je vous conseille ce livre pour bien commencer l’année !

S 3-3Le Cherche Midi, 592 pages, 22€

Audio·Roman

« Les possibles » de Virginie Grimaldi

CaptureJ’ai mis du temps à écrire cette chronique, car j’étais assez partagée par ce roman, et un peu gênée comme si je devais chroniquer un livre d’une amie – ce qui n’est pas le cas, je ne connais pas du tout l’auteure, mais j’ai une tendresse particulière pour la sincérité qu’elle met dans ses livres.

J’aime beaucoup la sensibilité des romans de Virginie Grimaldi. Chacun de ses livres aborde un thème fondamental de la vie, la famille, les enfants… Le tout avec humour et un mélange de détachement et de profondeur. Tant pis si certains critiques littéraires n’ont pas encore compris pourquoi ses livres touchent autant les lecteurs.

Première bonne surprise de ce livre, l’auteure a abandonné les longs titres qui ne rendait pas hommage aux romans qu’ils représentaient.

Cette fois, l’auteure aborde le thème de la mémoire, ou plus précisément de la perte de mémoire. Le père de la narratrice souffre d’Alzheimer. Et cette maladie va à la fois rapprocher la famille et parfois la fâcher, se remémorer les souvenirs et s’inquiéter pour l’avenir.

Si j’ai trouvé le livre un peu trop long, et si j’ai été moins touchée que d’autres romans de l’auteure, il s’inscrit complètement dans l’exploration des sentiments que Virginie Grimaldi semble avoir entrepris. Elle alterne d’ailleurs romans autour de la maternité ou la vieillesse avec beaucoup d’aisance. La lecture de celui-ci m’a moins marquée, mais je mesure à quel point son écriture a été importante pour l’auteure – et sa lecture, ou son écoute, émouvante pour nombre de lecteurs.

S 1-3Audiolib, lu par Audrey Sourdive, durée d’écoute : 7h03, 21,90€ en version CD

Roman

« Les étoiles brillent plus fort en hiver » de Sophie Jomain

Les-etoiles-brillent-plus-fort-en-hiverIl y a quelques jours, je vous parlais d’un roman de Noël qui m’avait beaucoup déçue. Ce n’est pas le cas de celui-ci, bien au contraire ! J’ai passé un très bon moment de lecture !

Si vous aimez l’ambiance des grands magasins qui se parent de leurs plus beaux atours pour faire briller les yeux des petits et des grands devant des vitrines chaque année plus créatives, ce roman est fait pour vous !

Les Galeries Hartmann, à Lille, sont en pleine ébullition : c’est la dernière ligne droite avant de dévoiler aux clients les décorations de Noël… mais le nouveau patron, qui prend la relève après le décès de son père, en a décidé autrement. Rien ne lui plaît, il trouve les choix trop classiques, et demande à Agathe Murano, la décoratrice, de tout revoir…

Chabadabada…

Bien sûr à la clé il y aura une histoire d’amour entre ces deux-là, je ne vous spoile pas vraiment car que pourrait-on attendre d’autre ? La réussite du livre est de ne pas avoir fait tourner toute l’histoire autour de cette romance, mais d’y avoir ajouté plusieurs personnages secondaires très attachants, et une histoire « parallèle » puisqu’Agathe a la garde de son adolescente de nièce.

Le grand magasin en décor de l’histoire est aussi une bonne idée, un quasi huis-clos dans une fourmilière à quelques jours de Noël.

Ajoutez à la recette une petite touche de magie, apportée par le mystérieux chat du Père-Noël, et vous avez tout pour passer un bon moment. Et cerise sur le gâteau, je trouve la couverture plutôt jolie !

S 3-3Charleston poche, 368 pages, 8,50€

Roman

« Le petit jardin du bonheur » de Felicity Hayes McCoy

51nB6nOK4vL._SX195_Les romans de Noël, c’est un peu comme les bûches à la crème au beurre : soit la crème est légère et gourmande et on se régale, soit c’est une crème bas de gamme, limite tranchée, sucrée et écoeurante.

Côté roman de Noël, celui-ci tombe dans la catégorie des mauvaises bûches. A tel point que je me suis dit « mais pourquoi tu lis ça ? ». Les bons sentiments, les chocolats chauds et autres décorations scintillantes, j’aime bien. Mais là, que de longueurs… Après cinquante pages, j’étais perdue dans tous les personnages (avec cette manie qu’ont certains auteurs de donner un nom à tous leurs personnages, même ceux qu’on ne reverra jamais dans tout le reste du roman). L’histoire de base pouvait pourtant tenir la route pour cette catégorie de romans : une jeune femme en soif d’aventures et de découvertes, part pour les fêtes dans le village où habitent ses grands-parents qu’elle connaît à peine. Le grand-père est grognon, la grand-mère fait tout ce qu’elle peut pour rattraper le temps perdu et nouer des liens avec sa petite-fille.

Je me suis ennuyée, je me suis agacée tellement j’avais envie de supprimer la moitié des phrases.

Vite, passons à autre chose !

S 1-3Prisma, 416 pages, 19,95€ (existe aussi en format poche)

Roman

« Vous reprendrez bien un peu de magie pour Noël ? » de Carène Ponte

9782265155619ORILa saison des romans de Noël bat son plein ! J’ai une tendresse particulière pour ces lectures saisonnières, légères comme de la guimauve, sucrées à souhait, réconfortantes comme le chocolat chaud que l’on boit avec.

Victoria est une business woman redoutable. A la tête de sa propre agence de communication, elle mène son équipe d’une main de fer et ne s’autorise aucun temps mort. Victime d’un accident, elle tombe dans le coma. Deux elfes (oui, il faut accepter quelques bizarreries dans un roman de Noël) lui proposent un pacte : si elle veut sortir du coma, elle doit se réconcilier avec une personne qu’elle a blessée par le passé. Les elfes lui donnent donc une chance et lui fixent un ultimatum pour se rattraper.

Nouveau choix étrange : alors que le personnage de Victoria est suffisamment détestable pour trouver dans son entourage (famille, collègues) quelqu’un à qui faire du bien, son choix se porte sur une ancienne camarade de lycée qu’elle n’a pas revu depuis des années. Et voilà la business woman embarquée dans la vie de Dakota – qui n’a rien demandé – et qui se retrouve à garder une grand-mère atteinte d’Alzheimer.

Le personnage de Victoria est odieux, mais encore une fois il faut accepter un peu de bizarrerie et de caricature. J’ai bien aimé que ce roman ne soit pas de la pure romance, mais soit au départ une histoire de femmes (Victoria / Dakota / la grand-mère – et même la pauvre Lucienne que je vous laisse découvrir). Noël est un prétexte pour le décor, mais l’histoire est aussi celle d’une famille blessée par le passé, qui s’est reconstruite autour d’une adorable grand-mère, et qui va hélas devoir affronter une maladie sans retour arrière possible. C’est tendre et drôle, le livre se lit très vite, comme on dévore une petite gourmandise de Noël.

S 3-3Fleuve Editions, 17,90€

Roman

« Les derniers jours de nos pères » de Joël Dicker

derniers joursParfois je choisis de lire un livre juste pour son auteur, sans même lire le résumé. C’est clairement comme ça que j’ai choisi ce livre – je garde un bon souvenir de mes précédentes lectures de romans de Joël Dicker. Et je dois dire que ce n’est pas la quatrième de couverture qui m’aurait encouragée : au contraire, le récit du SOE créé par Churchill me semblait éloigné de ce que j’avais envie de lire à ce moment-là. Comme quoi, parfois, ce qui est censé vendre un livre ne lui rend pas forcément service !

Mais peu importe, puisqu’au final je l’ai lu, et j’ai trouvé que c’était un très bon livre, où les personnages sont beaux et attachants, courageux et faibles parfois, humains quoi. C’est d’ailleurs l’un des mots qui revient le plus dans ce livre : l’humain, les Hommes avec un grand H.

Paul-Emile, dit Pal, abandonne son père du jour au lendemain. Il part faire la guerre, engagé un peu malgré lui dans une section des services secrets britanniques. Là-bas, il va y rencontrer un groupe très hétérogène (Cul-Cul le curé, Gros le gentil, la belle Laura dont ils tombent tous un peu amoureux…), auprès de qui il va apprendre à combattre. Et toujours reviendra dans son esprit le souvenir de son père qu’il a laissé derrière lui (le personnage du père est particulièrement attachant).

Très beau roman sur l’amour filial et l’amitié, le sens des responsabilités, le nécessaire affranchissement des fils vis-à-vis de leur père. C’est beau, sensible (mais sans sensiblerie), et pour un premier roman, quelle réussite !

S 3-3Ed de Fallois (poche), 456 pages, 8,20€