Roman

« Une invitée particulière » de Nelle Lamarr

Ce livre est un pur roman psychologique, où tous les personnages ont des choses à cacher, où la tension est permanente, où l’on sait dès le début que l’on va se faire piéger par l’auteure et qu’on en redemande.

Tanya est une adolescente anglaise qui débarque dans la famille de Natalie et Matt pour passer une année aux Etats-Unis. Très vite, la lycéenne se fait détester par Paige et Will, les enfants du couple, tandis que Natalie la mère se comporte avec la plus grande gentillesse avec elle. Tanya a visiblement des secrets dans son passé. Elle ment. Elle manipule. C’est une peste et j’ai adoré la détester. Les autres membres de la famille ne sont pas exempts de mystères, et tout cela forme un sacré nœud à démêler.

Il est assez facile de deviner les grosses ficelles, mais l’auteure manie l’art de l’intrigue avec dextérité. Impossible de lâcher ce roman, je l’ai dévoré très rapidement malgré ses 400 pages. J’ai pensé à Freida McFadden bien sûr, mais aussi à Ruth Ware.

C’est simple, efficace. Un bon moment de lecture.

J’ai lu, 448 pages, 8,60€

Roman

« Le barman du Ritz » de Philippe Collin

« Dehors on traque les juifs, on fusille des gamins au mont Valérien, on meurt de faim, mais un palace se doit d’être irréprochable pour ce qui est des bigoudis. »

C’est toute l’ambiguïté de l’ambiance au Ritz depuis que la Gestapo en a fait un de ses lieux privilégiés de rendez-vous. On se presse autour du bar de Frank Meier, le talentueux barman qui réalise des cocktails comme personne, sait écouter sans intervenir, affiche toujours une mine impassible.

Pourtant Frank cache un secret : lui-même est juif. D’origine autrichienne, il a fait Verdun du côté de la France – et place encore en Pétain les espoirs d’un ancien combattant envers celui qui était encore considéré comme un héros.

La tension monte crescendo dans le roman ; et la légèreté prudente du début se transforme peu à peu en étau au fil des arrestations et de l’avancée de la guerre. D’abord à l’abri derrière son bar, Frank joue de plus en plus avec le feu. Entre ceux qu’il protège et celles qu’il convoite, il côtoie au quotidien des ennemis qu’il s’évertue à servir en affichant une neutralité bien maîtrisée.

L’histoire est inspirée de personnages ayant réellement existé (celui de Frank d’abord, des officiers allemands, mais aussi de plusieurs célébrités de l’époque, Guitry, Chanel,…). Le personnage de Frank est déstabilisant, son sang-froid et son aisance face à n’importe quel interlocuteur mettent parfois mal à l’aise dans la lecture. Et tandis que l’horreur se produit, le champagne et les cocktails coulent à flot…

Quant à Blanche Auzello, que Frank admire en secret, elle est à la fois évanescente, ombrageuse et rebelle, et finalement la seule capable de fendiller l’armure du barman.

Albin Michel, 416 pages, 21,90€

BD·Biographie

« La dernière nuit d’Anne Bonny » de Claire Richard et Alvaro Ramirez

Une histoire de pirate ? Oui, mais ce pirate-là est une femme !

Élevée dans la campagne irlandaise, assoiffée de liberté, Anne sera pirate et amante du capitaine, à une époque où les femmes n’étaient pas les bienvenues sur un bateau. Au soir de sa vie, alors que la mort s’invite dans le bordel qu’elle tient maintenant d’une main de fer, Anne Bonny décide de dicter ses mémoires et de rétablir sa vérité, n’en déplaise au biographe qui avait fait son portrait lors de son procès.

L’histoire est passionnante, rythmée comme un quotidien de pirate qui navigue d’île en île. Entre sa vie de pirate et celle de tenancière sans scrupule de maison close, difficile de trouver le personnage d’Anne Bonny sympathique, loin de là ! Mais on ne peut qu’admirer le courage dont elle a su faire preuve pour s’émanciper.

J’ai bien aimé aussi les apartés dans le récit, où deux historiens débattent de la véracité du récit, des interprétations possibles, et plus globalement du rapport des historiens aux archives dont ils disposent.

C’est une BD intéressante, documentée, avec des illustrations soignées, qui permet de découvrir un personnage au tempérament fort et indépendant.

Le Lombard, 160 pages, 22,95€

Roman

« Les Royaumes de feu (tome 1) – La prophétie » de Tui T. Sutherland

Je n’aurais jamais cru me passionner pour une histoire de dragons… et pourtant j’ai adoré ce roman ! Ce qui l’a fait sortir du lot dans les rayonnages, c’est d’abord la magnifique édition collector pour les 10 ans de la sortie du roman (il y a eu 16 autres tomes depuis !), avec sa couverture brillante et son jaspage, qui donnent envie d’ouvrir le livre juste pour le plaisir de regarder et toucher un bel objet.

L’histoire est celle de cinq jeunes dragons, Argil, Tsunami, Comète, Gloria et Sunny, élevés hors de leurs clans respectifs depuis leur naissance. Il faut dire que ces cinq dragonnets ont une particularité : ils sont des élus, ceux qui ont été identifiés pour réaliser une prophétie et ramener la paix entre des clans en guerre depuis des années.

Ce premier tome place Argil au centre de l’histoire ; dans l’interview de l’auteure reprise en fin d’ouvrage, elle explique que chacun des cinq premiers tomes met en avant l’un des dragonnets. Mais les autres ne sont pas pour autant absents de l’histoire ; au contraire, leurs aventures se vivent en groupe, avec la solidarité naturelle de ceux qui traversent des épreuves communes, mais aussi avec des tensions et des désaccords.

Chaque lecteur pourra ainsi préférer le caractère fougueux de Tsunami, la gentillesse d’Argil, ou compatir avec Gloria qui cherche sa légitimité… L’univers dans lequel évoluent les personnages n’est pas tendre, il y a des combats dans l’arène, des affrontements à la vie à la mort, et l’auteure ne prend pas de pincettes quand il faut sacrifier des personnages. L’éditeur conseille la lecture pour les 9-12 ans, ce qui me paraît bien, même s’il faut quand même être un lecteur motivé si tous les tomes de la saga comptent 400 pages ! Quant aux lecteurs adultes, ils ne seront pas déçus par ce roman qui crée tout un univers, des personnages attachants et aux caractères complexes, sans oublier quelques rebondissements et une petite point d’humour qui allège l’ambiance.

Gallimard jeunesses, 416 pages, 25€ pour l’édition collector, 17€ pour la version classique.

Cosy mystery·Policier·Roman

« Le club des amateurs de romans policiers (tome 6) – Meurtre en famille » de C.A. Larmer

J’aime beaucoup cette série de cosy mysteries où les enquêteurs amateurs sont une bande de lecteurs fans d’Agatha Christie. Même si Alicia et Lynette, les deux sœurs qui ont fondé le club de lecture, sont un peu plus présentes que les autres personnages, il en ressort un effet de « troupe » assez sympathique – qui me rappelle d’ailleurs un groupe de lecteurs dont je faisais partie, composé de personnalités différentes mais toutes adorables et complémentaires.

Ronnie, l’une des membres du club, fête son anniversaire dans la magnifique propriété qu’elle a héritée de son mari. Tous ses amis sont invités, et leur présence va s’avérer hélas nécessaire puisque la petite amie du neveu de Ronnie est retrouvée morte sur le cours de tennis. La police, bien sûr, ne s’en sortira pas sans l’enquête parallèle des détectives amateurs…

On s’éloigne de l’univers d’Agatha Christie, contrairement aux premiers tomes où les références étaient très présentes. C’est un peu dommage, mais maintenant que la mayonnaise a pris, le groupe se suffit à lui-même et le club de lecture est devenu un prétexte pour lier des personnages très différents. Il y a évidemment plein de fausses pistes, des personnages détestables, des histoires de famille, d’héritage… La vie privée des membres du club est évoquée en pointillés, mais elle est assez peu présente – ce qui me va bien, je préfère quand il n’y a pas trop de digressions dans l’enquête.

La couverture, comme toutes celles de cette collection, est très mignonne, avec quelques dessins à l’intérieur ; encore une jolie série dans ma bibliothèque…

Le Cherche Midi, 464 pages, 15,90€ (service de presse)

Poésie

« Il n’y a pas de plus grande force que l’amour » de Rainer Maria Rilke

Tout comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, vous avez toutes et tous déjà lu Rilke, peut-être sans le savoir. Nombreuses sont les citations issues de ses écrits qui sont reprises régulièrement. J’ai d’ailleurs largement marqué les pages de ce recueil pour y retrouver facilement les pages qui me marquaient le plus.

Ce livre est composé de poèmes, lettres et courts textes, pour la plupart destinés aux femmes que Rilke a aimées. Ce sont des textes qui se lisent très bien, j’ai puisé dedans par touches comme dans un recueil de poésie – et comme je n’arrive pas à lire de la poésie de manière linéaire, j’ai commencé ce livre par la fin comme à mon habitude, jusqu’à arriver à quelques pages de contexte en milieu de livre qui m’ont obligée à reprendre ma lecture de façon plus classique.

J’ai envie de vous citer plein d’extraits !

Amour, solitude, manque,… Les thèmes sont abordés avec beaucoup de justesse. Seul élément perturbant, le livre regroupe de manière condensée (une centaine de pages) des lettres destinées à neuf femmes différentes. Rilke n’est évidemment pas le seul poète a avoir écrit de grandes déclarations à plusieurs femmes dans sa vie, mais les voir regroupées côté à côté dans un si petit ouvrage ôte un peu de puissance aux sentiments.

Le livre n’en reste pas moins une mine de réflexions sur les relations amoureuses, dans un style poétique quelle que soit la forme utilisée. J’avais depuis longtemps identifié « Lettres à un jeune poète » dans mes envies de lecture, il est probable que cette lecture arrive plus tôt que prévu !

Les Belles lettres, 136 pages, 11€ (service de presse)

Policier·Roman

« La Psy » de Freida McFadden

Comme beaucoup d’entre vous, j’ai lu « La femme de ménage ». Comme beaucoup, j’ai aussi lu le deuxième volet, « Les secrets de la femme de ménage ». Et puis je me suis arrêtée là, j’ai choisi de ne pas lire les tomes suivants, par crainte de lire « l’histoire de trop » construite sur le même modèle.

Quand on m’a prêté « La Psy », j’ai quand même accepté le roman. Lecture facile, qui ne m’engageait à rien.

C’est un roman psychologique, comme « La femme de ménage » de la même auteure, mais construit différemment. Tricia et Ethan, deux jeunes mariés, sont coincés par le brouillard et la neige dans une maison inhabitée qu’ils devaient visiter avec leur agent immobilier. Cette maison a appartenu à une célèbre psychiatre, disparue sans laisser de trace, et que les policiers croient morte – même s’ils n’ont jamais trouvé les preuves de la culpabilité de son petit ami.

Mais la maison va révéler bien des secrets au jeune couple qui la visite… Je ne vous dis rien de plus sur l’histoire ; ce serait dommage car tout l’intérêt de ce genre de livre est de se laisser berner, de faire des découvertes et de pousser des « oh » de surprise.

J’ai passé le premier quart du livre à me laisser porter par le début de l’intrigue, puis une bonne moitié à penser que j’avais « tout deviné », je me suis cru maline, j’ai recoupé des indices qui collaient « forcément » avec ma théorie… jusqu’au dernier quart du livre, où j’ai compris que je m’étais fait avoir !

Et c’est très bien ainsi.

C’est donc un roman qui se lit facilement (400 pages mais avec une police assez grande et des interlignes très espacés), des rebondissements réguliers, et une fin qui ne déçoit pas. Me voilà prête à lire les prochains livres de cette auteure !

J’ai lu, 416 pages, 8,60€

En anglais·Roman

« The restaurant of lost recipes » de Hisashi Kashiwai


A Kyoto, Nagare et sa fille Koishi tiennent un restaurant d’un genre particulier ; à la demande de ses clients, le chef recrée des recettes oubliées, vecteurs de souvenirs. Nori Ben, ramen, ten don… au total, six recettes font l’objet de recherches dans ce roman (qui est en réalité le deuxième tome, mais nul besoin d’avoir lu le premier pour comprendre l’histoire). Le rituel est bien rodé : accueillir le visiteur, le mettre en confiance en lui proposant un bon repas ; puis écouter son histoire, la recette qu’il veut redécouvrir, et surtout les raisons pour lesquelles il cherche à retrouver les sensations provoquées par cette recette. Car derrière un plat, c’est avant tout un souvenir que les client du restaurant veulent faire revivre – et bizarrement, malgré la complexité de certaines demandes, le chef Nagare n’échoue jamais !

On a tous des recettes d’enfance ou qui sont capables de réveiller des souvenirs – évidemment j’ai pensé à Proust et à sa madeleine, à la capacité qu’un aliment ou un plat peut avoir de nous faire revivre des souvenirs marquants.

Ce sont souvent les recettes les plus simples qui font revivre les souvenirs les plus forts, parce que ce qui compte c’est la personne qui les a préparées, ou le lieu où on les a découvertes.

J’ai acheté ce livre dans une librairie londonienne, et c’est donc en anglais que je l’ai lu (traduit du japonais). Je n’ai pas toujours réussi à traduire en détail les composants des bentos ni les ingrédients spécifiques de la cuisine japonaise, certains termes m’ont résisté… mais j’ai compris l’ensemble, et au passage j’ai appris à dire « anguille » et à nommer quelques poissons (« Hamo eel » est une sorte d’anguille typique de Kyoto ; « Ayu sweetfish » un poisson à la chair sucrée…).

Les chapitres sont en fait des nouvelles (1 client = 1 chapitre), qui peuvent se lire séparément ou avec des pauses. L’ensemble est sympathique, le concept de « détectives culinaires » est amusant et aurait même pu être développé encore plus.

Pan Macmillan, 200 pages, 14£99

Essai / Document

« Le gaslighting, ou l’art de faire taire les femmes » d’Hélène Frappat

Coup de cœur !

Après la grosse déception de ma lecture de « Mangeuses », j’avais un peu d’appréhension à commencer la lecture de ce livre édité en poche dans la même collection.

Inutile de faire durer le suspense, cette crainte a été levée dès les premières pages grâce au style très clair et très pédagogique de l’auteure. Ouf !

Elu « mot de l’année » en 2022 par le Merriam Webster, le « gaslighting » peut sembler un concept abstrait, et l’auteure l’explique de manière très claire et avec de nombreux exemples. Elle cite le dictionnaire états-unien en ligne : « manipulation psychologique d’une personne, généralement pendant une longue période, qui pousse la victime à remettre en cause la validité de ses propres pensées […] et conduit en général à un état de confusion, de perte de confiance et d’estime de soi ».

L’auteure s’appuie beaucoup sur le cinéma, en particulier via une analyse très poussée du film « Gaslight » de 1944 (et autant vous dire que j’ai très très envie de le voir). D’autres créations, films d’Hitchcock, pièces de théâtre classiques, ou sujets politiques (le Watergate et Martha Mitchell) sont aussi pris en exemple.

J’ai beaucoup appris dans ce livre. J’ai pris des notes. Je me suis documentée en parallèle. Voilà ce qui a rendu pour moi ce livre utile, précieux, et qui fait que j’en parle quasiment tous les jours autour de moi depuis que j’en avais commencé la lecture.

Je savais par exemple que (hélas) les femmes sont moins bien soignées que les hommes. J’ai appris que cela avait un nom, « le syndrome de Yentl » et j’ai découvert avec effroi comment et pourquoi les symptômes de certaines maladies sont moins bien étudiés chez les femmes (cf la partie effarante sur les crises cardiaques).

J’ai envie de voir le film qui a inspiré le titre de ce livre. J’ai envie de voir les autres films cités dans ce livre, de lire les textes complets dont j’ai découvert des extraits, d’approfondir les inégalités hommes-femmes dans la prise en charge médicale.

J’ai envie, tout simplement, de relire ce livre, plus tard, quand le sujet aura encore plus cheminé et mûri en moi (et quand j’aurai vu « Gaslight », évidemment).

Points, 256 pages, 8,40€

Policier·Roman

« Les assassins de l’aube » de Michel Bussi

Direction la Guadeloupe pour ce roman de Michel Bussi qui vient de sortir en format poche. La police locale est à cran : un meurtrier s’en prend à des touristes ; trois d’entre eux ont été tués avec un harpon dans le coeur et un message politique comme signature. Valéric, à la tête de l’enquête, est un… Lire la suite « Les assassins de l’aube » de Michel Bussi