BD·C'est mercredi, on lit avec les petits !

« Enquête au collège » (BD) de Jean-Philippe Arrou-Vignod et Joël Legars

Ce document a été créé et certifié chez IGS-CP, Charente (16)

Je connaissais déjà les « Enquêtes au collège » de Jean-Philippe Arroud-Vignod, pour les avoir lues en roman. Ce sont des enquêtes amusantes, qui ont pour héros trois collégiens : Mathilde, Rémi et Pierre-Paul dit P.P Cul-Vert (le petit intello et assurément le plus drôle des trois).

J’étais très curieuse de découvrir l’adaptation en bande dessinée de ces romans. Dans cette enquête-ci, l’agent d’entretien du collège a été agressé la nuit dans une salle de classe. Les premiers indices accusent Rémi ; il va lui falloir l’aide de ses amis pour être innocenté.

J’ai d’abord été un peu perturbée par les dessins des personnages, qui ne sont pas les mêmes que ceux de la version roman (et en particulier P.P. Cul-Vert a une drôle de tête avec ses énormes lunettes). Mais je me suis vite habituée et j’ai trouvé les personnages attachants comme dans les romans.

Il y a une vraie enquête, avec des fausses pistes, des témoins, des indices, et une fin tout à fait honorable. L’agent d’entretien est juste assommé et il est précisé dès le début qu’il est « hors de danger », ce qui permet de ne pas ajouter de gravité supplémentaire à l’histoire.

J’espère que les autres romans de cette série seront aussi adaptés en BD !

S 3-3Gallimard Bande dessinée, 80 pages, 16,50€ (reçu via « Masse critique »)

Manga

« A la recherche du temps perdu », adaptation en manga par le collectif Variety Artworks d’après Marcel Proust

9782302064089-001-XMa découverte de l’œuvre de Proust est assez originale. Pour ceux qui n’ont pas suivi mes précédentes chroniques, j’avais d’abord commencé par lire le texte original, qui m’est tombé des mains et que je n’ai pas rouvert pendant des années. Puis j’ai découvert les premiers tomes de la formidable adaptation en BD par Stéphane Heuet, un petit bijou visuel qui se base sur le texte original et qui m’a donné envie de réessayer de lire Proust dans le texte. Et quand j’ai lu la chronique d’un lecteur sur cette adaptation en manga, j’ai été intriguée. Quel challenge de synthétiser toute la « Recherche » dans un manga de 384 pages ! Les éditeurs ont pris la précaution de mettre un encart au début du livre pour préciser que c’est une adaptation qui ne dispense pas de la lecture des romans, comme une première approche pour découvrir ces textes. Et c’est exactement comme ça que j’ai abordé ce livre, comme on verrait un film avant de lire le livre. Cela donne les grandes lignes, cela permet de situer les personnages, et pour le reste, allez lire le roman…

Je ne suis pas du tout une experte de Proust et n’ai pas tout lu de son œuvre. Pour ce que j’en connais, je trouve que malgré les larges coupes indispensables pour tenir dans un format court, et malgré un ordre qui me paraît modifié dans le déroulé, on retrouve bien les personnages clés, les passages incontournables, et les conclusions métaphysiques de l’auteur, son rapport au temps,… Donc cela fonctionne plutôt bien et la promesse initiale est tenue !

Une particularité de ce manga est qu’il se lit comme un livre européen et non pas dans le format japonais des mangas.

Je ne suis pas très fan des bruitages écrits et des commentaires pour préciser les attitudes des personnages, qui n’apportent pas grand-chose ici, les dessins étant déjà réussis et expressifs.

Sans forcément reprendre le texte initial comme dans la BD de Stéphane Heuet, quelques phrases incontournables (« longtemps je me suis couché de bonne heure » etc) auraient apporté la cerise sur le gâteau.

En tout cas c’est vraiment une bonne entrée en matière à mettre dans les mains de tous ceux qui n’arrivent pas à lire les romans mais sont curieux d’en découvrir l’histoire et les personnages.

S 3-3Editions Soleil, 384 pages, 8,50€

BD

« Céleste. Bien sûr, monsieur Proust (partie 1) » de Chloé Cruchaudet

9782302095700-001-XTous les lecteurs de Marcel Proust et ceux qui s’intéressent à sa vie connaissent forcément ce prénom : Céleste.

Car Céleste Albaret a été pendant huit ans la gouvernante de l’écrivain, l’accompagnant au quotidien.

Un livre et un documentaire ont déjà mis en avant le témoignage que la gouvernante a accepté de faire de son vivant. Cette BD s’appuie largement dessus (entre autres sources) pour retracer la relation particulière de cette femme avec Proust. Jeune mariée au chauffeur de Proust, assumant de ne rien savoir faire de ses dix doigts (ce qui était peu courant pour une femme de son époque et de son milieu), elle entre au service de Proust comme coursier et livre ses colis dans tout Paris. Très vite elle se rend indispensable ; admirative de Proust (on comprend aussi qu’elle en était platoniquement amoureuse), elle trouve avec l’écrivain un mode de fonctionnement qui n’appartient qu’à eux. Lui, vit reclus dans sa chambre ; elle, peu conventionnelle et maladroite, vit ses journées dans l’attente qu’il la sollicite, et finit par se rendre indispensable pour la réécriture de « La recherche ».

Première partie d’une courte série qui comptera deux tomes, cette BD réussit à retranscrire la relation si particulière entre ces deux êtres atypiques – et au passage, évoque le mari dans quelques vignettes comiques.

Les dessins sont fidèles aux visages que l’on connaît (celui de Proust, celui de Céleste – qui est d’ailleurs repris en photo en fin de BD). Les dessins sont plutôt monochromes, mais avec un jeu de couleur bien trouvé (1 ambiance, 1 couleur).

J’avais repéré ce livre depuis longtemps, et sa lecture m’a donné envie de rouvrir « La recherche » et sa merveilleuse adaptation en BD par Stéphane Heuet. Et bien sûr, j’attends la seconde partie !

S 3-3Ed. Soleil, 18,95€

BD

« Automne en Baie de Somme » de Philippe Pelaez et Alexis Chabert

Capture d’écran 2023-09-03 185756Lire une bande dessinée est souvent pour moi une « pause » entre des lectures de romans très épais ou très marquants, un peu comme une transition douce.

« Automne en Baie de Somme » est une bande dessinée élégante, au style recherché et à l’histoire efficace et sans fioriture.

En 1896, l’inspecteur Amaury Broyan enquête sur la mort d’un capitaine d’industrie. L’homme était marié, respecté par ses ouvriers, et plutôt visionnaire. Il avait bien une maîtresse, mais c’était monnaie courante à l’époque et dans son milieu. Pas de quoi alerter l’inspecteur. Mais alors, qui a pu le tuer, et pourquoi ?

Deux choses m’ont marquée dans cette bande dessinée.

La première, c’est l’attention portée aux personnages féminins. Leurs dessins sont particulièrement soignés (les coiffures, le port de tête, …). Dans ces univers très masculins à l’époque (l’industrie, la police), elles sortent du lot et apportent du relief à l’histoire.

La deuxième, c’est le travail réalisé sur les personnalités des protagonistes. Ils ont chacun leur part d’ombre, leurs nuances. C’est plutôt malin.

L’histoire se lit assez vite (une soixantaine de pages), avec des passages plus poétiques et des citations de Nelly Roussel particulièrement bien choisies pour appuyer le récit. J’aurais bien prolongé cette lecture, pour l’intérêt de l’histoire et pour la qualité du récit.

S 3-3Grand Angle, 64 pages, 15,90€

BD·Biographie

« Simone Veil, l’immortelle » de Bresson et Duphot

Capture d’écran 2023-08-18 132932Dans ma liste de livres à lire « un jour » figure depuis longtemps d’autobiographie de Simone Veil. Mais jusqu’ici je n’ai jamais réussi à me lancer dans cette lecture car la vie de cette femme, incroyable par certains aspects, est aussi marquée d’événements tragiques et en particulier sa déportation en 1944 avec sa mère et sa sœur.

Cette bande dessinée est donc un bon moyen de découvrir son parcours.

Elle s’ouvre sur les débats autour de la légalisation de l’avortement, projet de loi porté par Simone Veil. On y voit Simone Veil, forte, droite, pleine de sang froid face aux insultes qui sont proférées à son encontre.

Pour comprendre cette femme, les auteurs retracent en parallèle son enfance dans une famille aimante, son adolescence studieuse et déjà rebelle, puis l’horreur des camps.

Je n’ai pas appris grand-chose sur la vie de Simone Veil, la plupart des grands événements de sa vie ayant souvent été rapportés dans des documentaires. Mais le récit est clair et bien amené, et j’ai apprécié le travail sur les dessins, très réalistes (on reconnaît bien tous les personnages connus, Simone Veil bien sûr mais aussi Jacques Chirac, Valéry Giscard d’Estaing, etc). Le jeu sur les couleurs est aussi très pertinent, et permet par un code couleur simple de suivre plusieurs temporalités en parallèle et en donnant le juste rythme aux flash-back.

C’est un livre intéressant, poignant, à lire et à faire lire pour découvrir celle qu’on appelait alors Madame « le » ministre. Que de chemin parcouru…

S 3-3Marabulles, 22,95€

BD

« La couleur des choses » de Martin Panchaud

arton231-a8cb0Feuilleter ce livre m’a tout de suite envie de le lire. Quel était donc cet étrange objet littéraire non identifié, ni roman, ni bande dessinée, ni vraiment roman graphique… inclassable, quoi. Une preuve ? Les personnages sont… des ronds.

Un rond pour Simon, un rond pour sa mère, pour son père, un rond pour les ado qui zonent dans le parc…

Le concept est très original, car basé sur le graphique. Tout en n’incarnant jamais les personnages, on les distingue bien, on suit facilement leurs aventures. Ne vous fiez pas au côté ludique de l’approche, ni aux couleurs gaies de la couverture : l’histoire est sombre (je ne m’y attendais pas, je n’avais pas lu le résumé). J’ai même failli reposer le livre ! Mais j’aurais eu tort car le concept mérite d’être suivi jusqu’au bout. Il y a quelques très bonnes trouvailles visuelles, et en tout cas ce livre ne ressemble à rien de ce que j’avais lu jusqu’ici. Il a reçu le Fauve d’or à Angoulême cette année, et c’est mérité.

S 3-3Ed. çà et là, 236 pages, 24€

BD

« Peau d’homme » de Hubert et Zanzim

9782344010648-001-TRenaissance. Bianca va bientôt se marier, mais elle déplore de ne rien connaître de son futur époux. Sa marraine lui confie alors un secret : depuis des générations, les femmes de la famille se transmettent une peau d’homme. En enfilant cette peau, une femme peut se faire passer pour un homme. Bianca décide de s’en servir pour infiltrer le quotidien de son futur mari, et ainsi mieux le connaître.

Les dessins sont bien faits, les pages pleines de rythme (avec même parfois plusieurs actions dessinées sur une même vignette en pleine page).

L’histoire s’empare des qualificatifs que l’on attribue / attribuait traditionnellement aux femmes ou aux hommes, et les démonte un par un, en apportant des arguments par les situations vécues. Le propos est donc complètement dans l’air du temps, l’histoire aurait presque pu être transposée telle quelle de nos jours.

Sans être trop moralisatrice, la BD aborde plein de sujets, tout en montrant que si l’on accepte de sortir un peu du cadre et de ne pas chercher à reproduire à tout prix les modèles de la société, il est possible de trouver des voies où chacun peut être heureux sans nuire au bonheur de l’autre sexe.

S 3-3Glénat, 27€

Manga

« Spy x Family 1 » de Tatsuya Endo

Spy-x-FamilyJ’avais vu des affiches sur la série adaptée de ces mangas ; c’est ce qui m’a donné envie de découvrir la version livre.

Twilight est un espion, dont la prochaine mission nécessite d’infiltrer une très select école, où est scolarisé l’enfant de celui qu’il doit espionner. Pour y parvenir, il décide d’adopter une petite fille, qu’il inscrira dans cette école. Et pour faire bonne impression, il se choisit aussi une jolie jeune femme, élégante et discrète.

Ce que Twilight ignore, c’est que la petite fille lit dans les pensées, et que sa nouvelle épouse est en réalité une tueuse à gages !

Le point de départ est original, et le traitement de l’histoire est réussi, avec des scènes drôles et cocasses. La petite fille, Anya, est toute mignonne, et elle a le « beau  rôle » dans ce trio, puisque sa télépathie va l’aider à sauver certaines situations – mais aussi provoquer des quiproquos. Le personnage de Yor Briar, la femme de Twilight, est aussi très bien fait, mélange d’élégance et de détermination. La série commence bien !

S 3-3Kurokawa, 6,90€

Manga

«Le maître des livres 2 » de Umiharu Shinoara

maitre2Ce deuxième tome est la parfaite continuité du premier.

D’ailleurs il commence au chapitre 10 !

On retrouve tout d’abord Myamoto, qu’une jolie mère de famille esseulée tente de séduire à tout prix… ce qui déplaît forcément à Mizuho, la timide bibliothécaire. Car bien sûr, toutes les histoires des personnages convergent à un moment ou à un autre vers cette bibliothèque pour enfants, où règne en maître ès littérature enfantine le taciturne Mikoshiba. Ce deuxième tome s’appuie moins sur des références de livres, et fait la part belle aux histoires personnelles des personnages. La bibliothèque reste le lieu central de l’histoire, et j’aime beaucoup cette idée qu’un lieu aussi feutré – et parfois impressionnant – puisse à ce point être un lieu de vie, où se croisent des personnes très différentes, qui viennent parfois pour chercher un livre, mais parfois aussi pour une raison qui n’a rien à voir avec la lecture ! Moi qui cherchais un manga accessible et à la thématique positive, me voilà servie car cette série est faite pour les amateurs de livres ! En plus les dessins sont très bien faits, expressifs, clairs.

Ma seule hésitation à poursuivre avec le prochain tome est qu’il y a 15 tomes dans cette série, et je ne suis pas sûre de vouloir lire tout ça… La série n’est pas toute récente (le dernier tome est sorti il y a six ans au Japon), mais elle est intemporelle car elle se passe dans une bibliothèque et n’a quasiment aucune référence à notre société contemporaine.

C’est une très belle série, je vous la recommande vivement !

S 3-3Komikku Editions, 8,50€

Manga

«Le maître des livres 1 » de Umiharu Shinoara

maitre1Quand Myamoto entre dans la bibliothèque de « La Rose trémière », c’est tout un univers qu’il y découvre : il y a cette maman surprotectrice qui y passe des heures avec son fils, des enfants, deux jeunes filles charmantes qui y sont employées. Mais surtout, il y fait la connaissance de Mikoshiba – le personnage central de l’histoire. C’est lui, le « maître des livres ».

Mikoshiba est un bibliothécaire acariâtre mais passionné par les livres. Il est aussi un parfait conseiller, qui sait répondre à toutes les demandes.

Les premiers chapitres sont consacrés à la découverte de certaines œuvres classiques, comme « L’île au trésor » ou « Le Merveilleux Voyage de Nils Holgersson à travers la Suède ». J’ai d’ailleurs cru au début que tout le livre serait construit ainsi, 1 chapitre pour 1 classique – ce qui aurait pu être lassant. Heureusement il y a aussi des histoires annexes, quand la vie s’invite à la bibliothèque.

Je ne suis pas familière des mangas ; j’en avais déjà lu quelques uns qui m’avaient laissé de bons souvenirs. J’avais envie de réessayer une lecture de ce genre. Je pensais être gênée par le sens de lecture car je manque d’entraînement, mais finalement la lecture s’est faite facilement. L’histoire plaira forcément à tous ceux qui aiment les livres, et en particulier à ceux qui fréquentent les bibliothèques.

La série compte quinze tomes. A ce stade, je n’envisage pas de tous les lire, mais je me demande comment sera construit le deuxième. A suivre…

S 3-3Komikku Editions, 8,50€