Roman

« Un animal sauvage » de Joël Dicker

Screenshot_2024-01-18_at_13.44.56Voilà un page turner comme je les aime, qui m’a tenue en haleine jusqu’à l’épilogue ! Je l’avais bien sûr remarqué dès sa sortie, ayant lu (je crois) tous les précédents romans de Joël Dicker ; mais il m’a fallu patienter un peu, au milieu de toutes mes lectures en attente, pour me décider à l’acheter. Et je ne regrette pas cet achat ! J’ai passé un excellent moment de lecture. L’ambiance m’a un peu rappelé celle de « L’énigme de la chambre 622 », qui se déroulait aussi en Suisse.

Près de Genève, dans une bourgade chic, on fait la connaissance de deux couples : Sophie et Astrad, respectivement avocate et financier ; et Karine et Grégoire, respectivement vendeuse et policier d’intervention. Les premiers habitent la « Maison en verre », ils ont une vie parfaite, de belles situations professionnelles, et beaucoup d’argent à la banque. Les seconds, plus modestes, habitent « La Verrue » et sont en admiration devant leurs voisins. D’espionnage malsain en barbecue faussement amical, les rapports entre les deux couples sont complexes et tortueux – pour le plus grand plaisir du lecteur, qui ne sait jamais à quoi s’attendre.

Le retour d’un homme, qui s’était fait discret depuis plusieurs années, va ajouter de la confusion et créer de multiples rebondissement.

C’est un roman psychologique parfaitement bien construit, où toutes les apparences sont trompeuses, et qui ne laisse aucun détail au hasard. Je l’ai dévoré en quelques jours, ravie de cette lecture captivante.

S 3-3Rosie & Wolfe, 400 pages, 23€

Cosy mystery·Policier·Roman

« Le crime parfait d’Agatha Christie » de Bénédicte Jourgeaud

9782264082978ORIOn n’en finit pas de publier des livres autour d’Agatha Christie. Entre les rééditions de ses romans, les BD qui en sont des adaptations, les cosy crimes qui se revendiquent de l’héritage Christie, le choix est vaste.

Dans « Le crime parfait d’Agatha Christie », c’est cette fois-ci Agatha Christie elle-même qui est l’héroïne de l’histoire.

Soyons honnête : c’est d’abord la couverture qui m’a fait de l’œil. Et bien que je la trouve un peu trop copiée des sublimes couvertures de Monsieur Toussaint Louverture, une fois le livre entre les mains pour le feuilleter, c’était trop tard le piège s’était refermé sur la fan d’Agatha Christie que je suis.

Le point de départ est aussi déjà vu, puisque l’histoire se situe dans un moment très particulier de la vie de l’auteure, lorsque celle-ci a mystérieusement disparu quelques jours après la demande de divorce de son mari Archie. Comme personne n’a jamais vraiment su ce qui s’était passé pendant ces jours, c’est un matériau propice au roman.

Dans sa fuite, elle rencontre plusieurs personnes aux personnalités très fortes – autant de personnages de romans potentiels. L’idée est amusante, puisque le roman crée de multiples sources d’inspiration pour la romancière. On découvre (pour la fiction) les personnages qui auraient pu inspirer les intrigues les plus célèbres de la Reine du crime.

J’ai plutôt bien aimé le démarrage du livre, où l’ambiance est fidèle aux romans d’Agatha Christie (voyage en train, en bateau, huis-clos,…). En revanche, j’ai regretté, pour ceux qui n’ont pas encore lu les romans originaux, que les clés de nombreuses énigmes soient dévoilées au lecteur ! Il me semble qu’une mention au début du roman aurait été une bonne précaution.

Par ailleurs, la fin du roman (soixante-dix / cent pages avant la fin, quand même) part dans une direction complètement bizarre, très décevante, qui va à l’encontre de toutes les « règles » du roman policier. Grosse déception donc pour la fin, qui pourrait bien me décourager de lire le deuxième tome.

S 2-3Ed 10/18, 360 pages, 8,90€

Audio

« Les gardiens du phare » de Emma Stonex

Capture d'écran 2024-03-27 201508Les phares sont un décor intéressant pour une intrigue de roman : l’isolement, la promiscuité de ceux qui y vivent, les conditions météorologiques, sont des ressorts romanesques qui fonctionnement bien. C’est d’ailleurs pour ces raisons que j’ai eu envie de découvrir ce roman. Avoir choisi la version audio m’a permis d’entrer tout de suite dans une ambiance très particulière, cette atmosphère de huis-clos ressentie par des gardiens qui partagent leur quotidien dans ce phare.

En 1972, trois gardiens qui travaillaient dans le phare de Maiden Rock disparaissent mystérieusement. Ce qui s’est passé, nul ne le sait. L’entreprise qui les employait a étouffé les faits ; et les veuves des trois disparus n’ont jamais eu de réponses à leurs questions.

Des décennies plus tard, un écrivain contacte l’une des veuves pour enquêter sur le mystère et en faire un roman.

L’ambiance est fascinante et complètement immersive en ce qui concerne la version audio. J’avais parfois l’impression d’être moi aussi dans le phare ! En revanche j’ai trouvé l’intrigue compliquée, entre les allers-retours sur deux époques, les trois gardiens et leurs trois femmes (j’ai un peu mélangé les prénoms au début…). Il y avait un vrai terreau pour une enquête, pour lancer des fausses pistes à destination du lecteur… mais je me suis un peu emmêlée dans les informations, au point que j’ai eu l’impression à un moment donné d’avoir manqué des informations.

S 2-3Audiolib, 9h30 d’écoute, 23,45€ en version CD. Lu par Christine Braconnier et Guillaume Orsat

Cosy mystery·Policier

« Les enquêtes d’Hannah Swensen (tome 10) : Meurtres et choux à la crème » de Joanne Fluke

9782749177335ORICe dixième tome de la série de cosy mysteries pâtissiers (comprenez : d’enquêtes dans dans un contexte où l’héroïne est une pâtissière) est un très bon volume dans la série.

Hannah, aussi gourmande que bonne pâtissière, n’a d’autre choix que de faire un régime : pour le lancement du livre de sa mère, elle doit porter un robe dans laquelle elle ne rentre plus… Avec sa sœur Andrea, elle s’inscrit dans un club de sport et s’astreint à un programme intensif, pendant que Lisa, sa fidèle associée, fait tourner le « Cookie Jar », leur café à cookies.

Mais voilà que Ronnie, la prof de sport, déjà aperçue dans les précédents tomes, est retrouvée morte. Or Ronnie avait la fâcheuse habitude de séduire tous les hommes qu’elle croisait : entre ses anciens amants et les compagnes officielles de ceux-ci, cela fait un paquet de suspects ! D’autant plus que Ronnie n’avait pas la langue dans sa poche…

Hannah est en plein doute : Mike, l’un de ses (deux) prétendants, a souvent été vu en compagnie de la victime. Si elle le croit innocent du meurtre, il n’est peut-être pas innocent dans ses rapports avec Ronnie.

Je dois dire que cela ne m’a pas gênée que Mike soit sur la touche dans ce tome ! Hannah va peut-être enfin choisir entre les deux hommes qui lui font la cour !

Il y a un autre fil rouge dans le roman, la mystérieuse disparition des croquettes du chat… ce qui occasionne des parenthèses bienvenues dans l’enquête, et permet de voir Hannah dans son quotidien.

Et comme toujours, j’aime autant vous prévenir : ce livre occasionne toutes sortes de fringales, depuis la pizza des premières pages jusqu’au brownie revisité !

S 3-3Le Cherche Midi, 390 pages, 15,90€

Roman

« Morts en débit (tome 2) : D’un port l’autre » d’Eric Vernassière

erciSouvenez-vous : dans le premier tome de « Morts en débit », nous avions fait la connaissance de plusieurs personnages hauts en couleurs, ne partageant pas les mêmes convictions mais marquant chacun à leur manière leur volonté d défendre leurs idées. Il y avait d’abord Roger Miremont, nationaliste, prêt à tout pour se faire bien voir de son parti, et follement épris de Suzanne qui lui préfère pourtant le chef du mouvement. Et puis, de l’autre côté, il y a l’inspecteur Fradin, qui n’a de cesse de poursuivre les perturbateurs. On les retrouve là où on les a laissés, et j’ai apprécié qu’il n’y ait pas d’ellipse narrative entre les deux tomes, pour qu’il n’y ait pas de discontinuité dans leurs parcours.

Miremont vient de mettre le feu à l’hôtel de ville de Nice, et a grièvement blessé Fradin avant de s’enfuir. Pour l’un, ce sera donc l’exil pour échapper à la police et à la justice.

J’ai retrouvé dans ce deuxième tome toutes les qualités du premier, un grand sens historique, révélateur de l’intérêt que porte l’auteur à la grande Histoire – et à ceux qui la font. Les personnages sont forts, engagés, et le livre regorge de références aux régions que l’auteur met à l’honneur – par des anecdotes, des recettes culinaires, etc.

Le lecteur parcourt un bout de l’Histoire de France (et de pays voisins) à travers le parcours de personnages truculents, qui portent en eux les splendeurs et les misères de leur époque.

L’écriture est toujours vive, érudite et précise, et les dialogues dynamiques. Ce deuxième tome m’a totalement convaincue, et puisque l’auteur annonce une trilogie, je serai au rendez-vous du prochain opus !

S 3-3Autoédition, 384 pages, 18,99€ en version brochée, 7€ en format Kindle

Roman

« Les gens dans l’enveloppe » d’Isabelle Monnin

Capture d'écran 2024-03-08 173518L’auteure de ce livre a acheté un jour sur internet un lot de photographies familiales. Romancière et journaliste, elle se lance deux défis : d’abord, écrire un roman dont les personnages seront inspirés des photos, de ces « gens dans l’enveloppe » qu’elle a reçue par la Poste ; ensuite, se lancer dans une enquête sur les traces de cette famille.

Dans le roman, elle centre l’histoire autour d’une petite fille, qu’elle décide de prénommer Laurence, et qu’elle imagine abandonnée par sa mère partie rejoindre son amant en Argentine. Cette partie-là est assez classique. J’imagine que c’était très amusant pour l’auteure de chercher des détails sur les photos autour desquels inventer une histoire (une peinture, un rôtissoire à poulet… sont autant de pistes sur lesquelles bâtir des anecdotes).

Mais la partie la plus intéressante du livre est l’enquête menée pour découvrir qui étaient les personnes présentes sur les photos. Je ne vous donne pas plus d’informations, pour vous laisser partir vous aussi sur leurs traces.

On ne comprend qu’à la toute fin du livre comment ces photos se sont retrouvées vendues sur internet (ça m’a travaillée pendant toute la lecture, ce n’est pas habituel de vendre un lot de photos familiales).

Ce livre m’a fait penser à « Je suis le carnet de Dora Maar », qui a aussi pour point de départ un objet acheté par hasard sur internet, et qui ouvre la voix à un récit original.

Pour être exhaustive, il y aussi une troisième partie sous forme d’un CD avec des musiques originales proposées par Alex Beaupain, et des reprises. Pour ma part, je l’ai laissé de côté mes temps de lecture de ce livre ne se prêtaient pas à une écoute simultanée du CD, et je n’ai pas eu envie d’y revenir une fois le livre refermé.

S 3-3JC Lattès, Livre + CD 22€

Essai / Document

« Agriculteurs – Témoignages 1900-2023 », réunis et présentés par Hélène Parisot

9791090566590.MAIN_L’Association pour l’autobiographie et le Patrimoine Autobiographique (APA) collecte et conserve toutes sortes d’écrits personnels (journaux intimes, correspondances etc). C’est dans ses locaux, à Ambérieu-en-Bugey, que l’auteure a consulté, rassemblé, coordonné et commenté les récits de huit agriculteurs. Chacun, à travers son histoire familiale et personnelle, raconte un pan de la transformation de l’agriculture qui s’est opérée en France depuis plus d’un siècle. Les textes sont assez courts (les passages ont été sélectionnés), mais condensent l’essentiel des messages que chacun veut porter : sa vision de la principale transformation qui a eu un impact sur l’exploitation familiale, ses envies et ses renoncements face à une agriculture qui évolue à toute vitesse, les paradoxes du monde agricole.

Les témoignages montrent parfois une vision désabusée de l’agriculture (ou du moins : du système agricole des dernières décennies), mais toujours un amour du métier qui vient souvent de l’enfance et d’un enracinement régional. L’introduction de chaque témoignage permet de comprendre le contexte autour du récit sélectionné. La préface d’Hélène Parisot, ainsi que l’entretien avec un agriculteur de 2023, permettent aussi de mieux cerner la démarche de rassemblement de ces textes.

Nul besoin d’être un expert du monde agricole, ni d’avoir le projet de reprendre une exploitation : le livre s’adresse à un large public qui s’intéresse tout simplement à l’évolution d’une profession souvent méprisée, quoique indispensable.

S 3-3Ed Mauconduit, 144 pages, 13€. Reçu dans le cadre d’une « masse critique ».

Cosy mystery·Policier

« La cuisine mortelle de Tita Rosie (tome 1) : L’art meurtrier du lait de coco » de Mia P. Manansala

9782749178776ORIJ’ai un goût prononcé pour les « cosy mysteries », ces romans à enquête qui ont été remis à la mode avec la déferlante « Agatha Raisin ». Plusieurs séries que j’ai lues ont la particularité de combiner enquête et contexte culinaire : bien sûr il y a les « Enquêtes de Hannah Swensen » (déjà 10 tomes publiés en France) mais aussi « Les thés meurtriers d’Oxford » (je n’ai lu que les deux premiers).

Mais dans cette nouvelle série publiée par le Cherche-Midi (qui a décidément de belles trouvailles en ce moment en matière de cosy mysteries), il n’est question ni de cookies, ni de scones : Lila, une jeune Américaine célibataire, revient dans sa ville natale auprès de sa grand-mère et de sa tante, qui tiennent ensemble un restaurant de spécialités philippines. Mais l’ex petit-ami de Lila, devenu un détestable critique gastronomique, meurt empoisonné dans le restaurant tenu par la famille de Lila, qui devient aussitôt la principale suspecte.

L’enquête démarre vite et bien : comment le jeune homme a-t-il été empoisonné ? Qui avait un intérêt à le mettre définitivement hors d’état de nuire à la réputation de tous les restaurants de la ville ? Autant de questions auxquelles Lila se donne pour mission de répondre elle-même.

Comme souvent dans ce type de roman, ce sont aussi toutes les petites histoires à côté de l’enquête qui font le plaisir de lecture. Les retrouvailles avec sa meilleure amie, un triangle amoureux qui se profile (j’espère qu’il ne durera pas aussi longtemps que celui des Hannah Swensen…), mais aussi les interrogations d’une jeune femme partagée entre sa loyauté pour ses origines, et l’envie de s’émanciper de sa famille. Je n’ai pas trop compris pourquoi le titre de la série est centré sur « Tita Rosie » (la tante de Lila), alors que Lila est le personnage principal et que sa tante a un rôle très secondaire. Peut-être cela se précisera-t-il dans la suite de la série…

J’ai découvert plein de plats et de traditions culinaires des Philippines, et c’est clairement la grande originalité de ce roman. Il faut cependant prendre le temps de consulter le glossaire en début de roman pour bien comprendre de quels plats il est question ! Il y aussi quelques recettes à la fin du roman, mais les recettes ne tiennent pas autant de place que dans les « Hannah Swensen ». J’ai passé un bon moment de lecture, dans une ambiance dépaysante, et je lirai le prochain tome avec plaisir.

S 3-3Le Cherche-Midi, 432 pages, 15,90€

Audio·Roman

« Les petites reines » de Clémentine Beauvais

Capture d'écran 2024-02-27 205609On choisit parfois un livre sur le seul nom de son auteur. Et parfois, on choisit un livre audio sur le nom de son lecteur – en l’occurrence ici, une lectrice, l’excellente Rachel Arditi, que j’avais déjà entendue dans « Les dames de Marlow ».

J’avais aussi lu quelques chroniques très enthousiastes sur « Les petites reines », roman qui a aussi été adapté en bande dessinée.

Bref, j’avais deux bonnes raisons d’écouter ce livre audio !

Le bilan de mon écoute est très positif. L’histoire, d’abord, a un point de départ qui interpelle : Mireille, Hakima et Astrid ont été élues « boudins de l’année » par l’un de leur camarade. Avec la viralité des réseaux sociaux, il y a de quoi déprimer… Mais Mireille n’en est pas à sa première élection, et prend cela désormais avec beaucoup de recul. Elle rallie à sa défense les deux autres « boudins », et elles partent toutes les trois à vélo, destination Paris, pour y porter chacune une revendication qui lui tient à coeur.

C’est aussi drôle que sensible, aussi bouleversant que léger. Il y a de tout dans ce roman vif et intelligent. Le message est optimiste, montre que les insultes et le harcèlement ne doivent jamais être banalisés ; et aussi qu’il y a de la place pour la révolte et la résilience, que la honte peut changer de camp.

Quant à la lecture de Rachel Arditi, elle est juste parfaite : d’ailleurs c’est moins une lecture qu’une incarnation. La voix de l’actrice porte le texte avec une incroyable justesse, le juste rythme, le bon choix d’enthousiasme ou de silence.

Ce roman est publié comme un roman jeunesse, mais il peut être lu par des adultes autant que par des collégiens.

S 3-3Audiolib, lu par Rachel Arditi, 6h15 d’écoute, 19,20€ en version CD

Biographie·Roman

« Danser encore » de Charles Aubert

Danser-encoreJ’aime bien quand les livres me font découvrir des univers qui ne me sont pas familiers, et bousculent mes a priori. Un livre sur un boxeur ? Sans doute serais-je passée à côté (à tort) s’il ne m’avait pas été conseillé.

Ce roman biographique entraîne le lecteur dans l’univers de la boxe, et pourtant il porte le doux titre de « Danser encore », tant Rukeli (Johann Trollman) avait une technique qui ne ressemblait à aucune autre.

Si vous ne connaissez rien à la boxe, et même si vous n’aimez pas les sports de combat, que cela ne vous empêche pas de découvrir ce texte, qui va bien au-delà du sport. Il raconte le parcours de Rukeli, boxeur tsigane au style jugé trop atypique dans une Allemagne en pleine montée du nazisme. Le rayonnement du champion, sa vie modeste et ordinaire, bousculée d’abord par les succès sportifs, puis rattrapée par les préjugés raciaux et par la guerre, font de ce livre un combat entre ombre et lumière.

Les chapitres, présentés comme des « rounds » se lisent facilement. L’écriture est accessible et efficace, avant tout au service de l’histoire.

S 3-3Istya & Cie, 172 pages, 20€