Roman

« Ravage » de René Barjavel

Pourquoi lire en 2025 un roman d’anticipation écrit en 1943 et se déroulant en 2052 ? Est-ce que cela a du sens ?

Je garde un souvenir assez précis de ma lecture de « La Nuit des temps » du même auteur. J’avais 12 ou 13 ans. C’était, peut-être, mon premier vrai roman de science-fiction, et il m’avait profondément marquée.

C’est le hasard qui m’a mis aujourd’hui « Ravage » entre les mains – ou plutôt, dans les oreilles, car je cherchais un roman en version audio.

Le début m’a beaucoup plu : d’abord parce que c’est toujours amusant de voir comment, en 1943, un auteur pouvait imaginer le futur – pas de voiture volante ou autonome, pas de téléphone portable non plus, les ordinateurs sont absents. En revanche toute la société tourne à l’électricité. Et le jour où celle-ci est complètement coupée, c’est le chaos. La société s’effondre. Les morts, soigneusement conservés depuis plusieurs générations dans des lieux réfrigérés dans les habitations, se putréfient. Le choléra rôde. Toute cette partie résonne dans notre actualité : quand la crise énergétique fait l’actualité ; quand on a vécu une pandémie, capable de révéler tantôt la plus grande humanité, tantôt le plus grand individualisme, il n’est pas difficile de faire des rapprochements !

Ensuite les choses se compliquent : François, le principal personnage, décide de quitter la capitale avec la jeune femme qu’il aime et quelques individus qu’il réunit pour former un groupe. Sur leur chemin qui traverse la France, ils vont croiser la maladie, la mort, la faim, et toutes sortes d’horreurs.

Plus le roman progressait, plus je me sentais mal à l’aise. Tant de noirceur dans quelques heures d’écoute… Bien sûr c’est un classique, et je ne regrette pas de l’avoir découvert. Mais j’ai hâte de passer à une lecture moins pesante.

Le Livre qui parle (épuisé), 7h30 d’écoute. Lu par Bertrand Suarez-Pazos

Biographie·Roman

« Ma mère et moi » d’Anne B. Ragde

J’ai choisi de lire ce livre sur la seule base du nom de son auteure – que je connais par l’excellente saga des «  Neshov » (impossible à résumer ici en quelques lignes, je vous invite à lire mes chroniques sur les différents tomes – et je réalise au passage qu’il existe un sixième tome que je n’ai jamais lu!).

Si l’histoire des Neshov n’a rien de glamour ni de joyeux, j’ai gardé le souvenir d’une écriture précise et sonnant juste. J’ai retrouvé dès les premières pages de ce livre (autobiographique) le talent de l’auteur pour parler de n’importe quel sujet avec une aisance déconcertante.

Le titre laisse supposer qu’elle ne va parler que de sa mère – et peut-être pour régler ses comptes. Le contenu est bien plus fin que cela. Certes, l’auteure raconte beaucoup d’anecdotes autour de se mère, et en particulier autour de leur dernier voyage. Mais elle parle aussi de sa vie, de son métier d’écrivain (avec ses réussites et ses éloges, mais aussi avec ses périodes de nécessaire solitude), de son rapport à l’argent, de ses trois ex-maris… J’avais l’impression de lire le texte d’une copine qui me parlerait de sa vie, naturellement, sans filtre, un peu en vrac parfois. J’ai aimé la sincérité du propos.

« Je me suis parfois dit au cours de ma vie, quand les choses tournaient mal : si je survis à ça, je pourrai écrire là-dessus ». C’est de ce bois-là que sont faits les grands écrivains.

Les Belles lettres, 304 pages, 25€ (reçu en service de presse)

C'est mercredi, on lit avec les petits !·Roman

« La très catastrophique visite du zoo » de Joël Dicker


Avec ce roman, Joël Dicker s’essaie avec succès à la littérature jeunesse (disons à partir de 10 ans), dans un texte construit comme des réactions en chaîne. Tout commence par l’inondation d’une école, qui va entraîner en quelques jours une succession de catastrophes… jusqu’au zoo, lieu final (mais pas du tout central) de l’intrigue. Entre temps, un petit groupe d’élèves se livre à une enquête en bonne et due forme pour découvrir qui a inondé l’école, avec l’aide d’une mamie férue d’énigmes policières.


J’ai vu ce livre partout depuis sa sortie, dans les rayons, sur les réseaux sociaux,… et bien qu’aimant beaucoup les roman de Joël Dicker je ne serais pas allée spontanément vers celui-ci. Au final, j’ai pourtant passé un bon moment de lecture. Le texte est rythmé, les chapitres sont courts et suivent les rebondissements. Bien sûr il faut sans doute être un lecteur beaucoup plus jeune pour apprécier tous les (nombreux) jeux de mots. Mais j’ai noté aussi la volonté de l’auteur d’écrire sur des sujets sérieux. Et ce n’est pas rien de s’attaquer à des thèmes comme la démocratie – je vous laisserai apprécier le vote Brocoli vs Pizza pour illustrer les risques de l’abstention.

Rosie & Wolfe, 256 pages, 19€

Roman

« Une invitée particulière » de Nelle Lamarr

Ce livre est un pur roman psychologique, où tous les personnages ont des choses à cacher, où la tension est permanente, où l’on sait dès le début que l’on va se faire piéger par l’auteure et qu’on en redemande.

Tanya est une adolescente anglaise qui débarque dans la famille de Natalie et Matt pour passer une année aux Etats-Unis. Très vite, la lycéenne se fait détester par Paige et Will, les enfants du couple, tandis que Natalie la mère se comporte avec la plus grande gentillesse avec elle. Tanya a visiblement des secrets dans son passé. Elle ment. Elle manipule. C’est une peste et j’ai adoré la détester. Les autres membres de la famille ne sont pas exempts de mystères, et tout cela forme un sacré nœud à démêler.

Il est assez facile de deviner les grosses ficelles, mais l’auteure manie l’art de l’intrigue avec dextérité. Impossible de lâcher ce roman, je l’ai dévoré très rapidement malgré ses 400 pages. J’ai pensé à Freida McFadden bien sûr, mais aussi à Ruth Ware.

C’est simple, efficace. Un bon moment de lecture.

J’ai lu, 448 pages, 8,60€

Roman

« Le barman du Ritz » de Philippe Collin

« Dehors on traque les juifs, on fusille des gamins au mont Valérien, on meurt de faim, mais un palace se doit d’être irréprochable pour ce qui est des bigoudis. »

C’est toute l’ambiguïté de l’ambiance au Ritz depuis que la Gestapo en a fait un de ses lieux privilégiés de rendez-vous. On se presse autour du bar de Frank Meier, le talentueux barman qui réalise des cocktails comme personne, sait écouter sans intervenir, affiche toujours une mine impassible.

Pourtant Frank cache un secret : lui-même est juif. D’origine autrichienne, il a fait Verdun du côté de la France – et place encore en Pétain les espoirs d’un ancien combattant envers celui qui était encore considéré comme un héros.

La tension monte crescendo dans le roman ; et la légèreté prudente du début se transforme peu à peu en étau au fil des arrestations et de l’avancée de la guerre. D’abord à l’abri derrière son bar, Frank joue de plus en plus avec le feu. Entre ceux qu’il protège et celles qu’il convoite, il côtoie au quotidien des ennemis qu’il s’évertue à servir en affichant une neutralité bien maîtrisée.

L’histoire est inspirée de personnages ayant réellement existé (celui de Frank d’abord, des officiers allemands, mais aussi de plusieurs célébrités de l’époque, Guitry, Chanel,…). Le personnage de Frank est déstabilisant, son sang-froid et son aisance face à n’importe quel interlocuteur mettent parfois mal à l’aise dans la lecture. Et tandis que l’horreur se produit, le champagne et les cocktails coulent à flot…

Quant à Blanche Auzello, que Frank admire en secret, elle est à la fois évanescente, ombrageuse et rebelle, et finalement la seule capable de fendiller l’armure du barman.

Albin Michel, 416 pages, 21,90€

Roman

« Les Royaumes de feu (tome 1) – La prophétie » de Tui T. Sutherland

Je n’aurais jamais cru me passionner pour une histoire de dragons… et pourtant j’ai adoré ce roman ! Ce qui l’a fait sortir du lot dans les rayonnages, c’est d’abord la magnifique édition collector pour les 10 ans de la sortie du roman (il y a eu 16 autres tomes depuis !), avec sa couverture brillante et son jaspage, qui donnent envie d’ouvrir le livre juste pour le plaisir de regarder et toucher un bel objet.

L’histoire est celle de cinq jeunes dragons, Argil, Tsunami, Comète, Gloria et Sunny, élevés hors de leurs clans respectifs depuis leur naissance. Il faut dire que ces cinq dragonnets ont une particularité : ils sont des élus, ceux qui ont été identifiés pour réaliser une prophétie et ramener la paix entre des clans en guerre depuis des années.

Ce premier tome place Argil au centre de l’histoire ; dans l’interview de l’auteure reprise en fin d’ouvrage, elle explique que chacun des cinq premiers tomes met en avant l’un des dragonnets. Mais les autres ne sont pas pour autant absents de l’histoire ; au contraire, leurs aventures se vivent en groupe, avec la solidarité naturelle de ceux qui traversent des épreuves communes, mais aussi avec des tensions et des désaccords.

Chaque lecteur pourra ainsi préférer le caractère fougueux de Tsunami, la gentillesse d’Argil, ou compatir avec Gloria qui cherche sa légitimité… L’univers dans lequel évoluent les personnages n’est pas tendre, il y a des combats dans l’arène, des affrontements à la vie à la mort, et l’auteure ne prend pas de pincettes quand il faut sacrifier des personnages. L’éditeur conseille la lecture pour les 9-12 ans, ce qui me paraît bien, même s’il faut quand même être un lecteur motivé si tous les tomes de la saga comptent 400 pages ! Quant aux lecteurs adultes, ils ne seront pas déçus par ce roman qui crée tout un univers, des personnages attachants et aux caractères complexes, sans oublier quelques rebondissements et une petite point d’humour qui allège l’ambiance.

Gallimard jeunesses, 416 pages, 25€ pour l’édition collector, 17€ pour la version classique.

Cosy mystery·Policier·Roman

« Le club des amateurs de romans policiers (tome 6) – Meurtre en famille » de C.A. Larmer

J’aime beaucoup cette série de cosy mysteries où les enquêteurs amateurs sont une bande de lecteurs fans d’Agatha Christie. Même si Alicia et Lynette, les deux sœurs qui ont fondé le club de lecture, sont un peu plus présentes que les autres personnages, il en ressort un effet de « troupe » assez sympathique – qui me rappelle d’ailleurs un groupe de lecteurs dont je faisais partie, composé de personnalités différentes mais toutes adorables et complémentaires.

Ronnie, l’une des membres du club, fête son anniversaire dans la magnifique propriété qu’elle a héritée de son mari. Tous ses amis sont invités, et leur présence va s’avérer hélas nécessaire puisque la petite amie du neveu de Ronnie est retrouvée morte sur le cours de tennis. La police, bien sûr, ne s’en sortira pas sans l’enquête parallèle des détectives amateurs…

On s’éloigne de l’univers d’Agatha Christie, contrairement aux premiers tomes où les références étaient très présentes. C’est un peu dommage, mais maintenant que la mayonnaise a pris, le groupe se suffit à lui-même et le club de lecture est devenu un prétexte pour lier des personnages très différents. Il y a évidemment plein de fausses pistes, des personnages détestables, des histoires de famille, d’héritage… La vie privée des membres du club est évoquée en pointillés, mais elle est assez peu présente – ce qui me va bien, je préfère quand il n’y a pas trop de digressions dans l’enquête.

La couverture, comme toutes celles de cette collection, est très mignonne, avec quelques dessins à l’intérieur ; encore une jolie série dans ma bibliothèque…

Le Cherche Midi, 464 pages, 15,90€ (service de presse)

Policier·Roman

« La Psy » de Freida McFadden

Comme beaucoup d’entre vous, j’ai lu « La femme de ménage ». Comme beaucoup, j’ai aussi lu le deuxième volet, « Les secrets de la femme de ménage ». Et puis je me suis arrêtée là, j’ai choisi de ne pas lire les tomes suivants, par crainte de lire « l’histoire de trop » construite sur le même modèle.

Quand on m’a prêté « La Psy », j’ai quand même accepté le roman. Lecture facile, qui ne m’engageait à rien.

C’est un roman psychologique, comme « La femme de ménage » de la même auteure, mais construit différemment. Tricia et Ethan, deux jeunes mariés, sont coincés par le brouillard et la neige dans une maison inhabitée qu’ils devaient visiter avec leur agent immobilier. Cette maison a appartenu à une célèbre psychiatre, disparue sans laisser de trace, et que les policiers croient morte – même s’ils n’ont jamais trouvé les preuves de la culpabilité de son petit ami.

Mais la maison va révéler bien des secrets au jeune couple qui la visite… Je ne vous dis rien de plus sur l’histoire ; ce serait dommage car tout l’intérêt de ce genre de livre est de se laisser berner, de faire des découvertes et de pousser des « oh » de surprise.

J’ai passé le premier quart du livre à me laisser porter par le début de l’intrigue, puis une bonne moitié à penser que j’avais « tout deviné », je me suis cru maline, j’ai recoupé des indices qui collaient « forcément » avec ma théorie… jusqu’au dernier quart du livre, où j’ai compris que je m’étais fait avoir !

Et c’est très bien ainsi.

C’est donc un roman qui se lit facilement (400 pages mais avec une police assez grande et des interlignes très espacés), des rebondissements réguliers, et une fin qui ne déçoit pas. Me voilà prête à lire les prochains livres de cette auteure !

J’ai lu, 416 pages, 8,60€

En anglais·Roman

« The restaurant of lost recipes » de Hisashi Kashiwai


A Kyoto, Nagare et sa fille Koishi tiennent un restaurant d’un genre particulier ; à la demande de ses clients, le chef recrée des recettes oubliées, vecteurs de souvenirs. Nori Ben, ramen, ten don… au total, six recettes font l’objet de recherches dans ce roman (qui est en réalité le deuxième tome, mais nul besoin d’avoir lu le premier pour comprendre l’histoire). Le rituel est bien rodé : accueillir le visiteur, le mettre en confiance en lui proposant un bon repas ; puis écouter son histoire, la recette qu’il veut redécouvrir, et surtout les raisons pour lesquelles il cherche à retrouver les sensations provoquées par cette recette. Car derrière un plat, c’est avant tout un souvenir que les client du restaurant veulent faire revivre – et bizarrement, malgré la complexité de certaines demandes, le chef Nagare n’échoue jamais !

On a tous des recettes d’enfance ou qui sont capables de réveiller des souvenirs – évidemment j’ai pensé à Proust et à sa madeleine, à la capacité qu’un aliment ou un plat peut avoir de nous faire revivre des souvenirs marquants.

Ce sont souvent les recettes les plus simples qui font revivre les souvenirs les plus forts, parce que ce qui compte c’est la personne qui les a préparées, ou le lieu où on les a découvertes.

J’ai acheté ce livre dans une librairie londonienne, et c’est donc en anglais que je l’ai lu (traduit du japonais). Je n’ai pas toujours réussi à traduire en détail les composants des bentos ni les ingrédients spécifiques de la cuisine japonaise, certains termes m’ont résisté… mais j’ai compris l’ensemble, et au passage j’ai appris à dire « anguille » et à nommer quelques poissons (« Hamo eel » est une sorte d’anguille typique de Kyoto ; « Ayu sweetfish » un poisson à la chair sucrée…).

Les chapitres sont en fait des nouvelles (1 client = 1 chapitre), qui peuvent se lire séparément ou avec des pauses. L’ensemble est sympathique, le concept de « détectives culinaires » est amusant et aurait même pu être développé encore plus.

Pan Macmillan, 200 pages, 14£99

Policier·Roman

« Les assassins de l’aube » de Michel Bussi

Direction la Guadeloupe pour ce roman de Michel Bussi qui vient de sortir en format poche. La police locale est à cran : un meurtrier s’en prend à des touristes ; trois d’entre eux ont été tués avec un harpon dans le coeur et un message politique comme signature. Valéric, à la tête de l’enquête, est un… Lire la suite « Les assassins de l’aube » de Michel Bussi