Roman

« Miss Islande» de Audur Ava Olafsdottir

miss islandeJe garde un excellent souvenir de ma lecture de « Rosa candida », à tel point d’ailleurs que je me souviens exactement où j’étais quand je l’ai lu (ce qui n’est pas toujours le cas vu la quantité de livres que je dévore). J’avais donc très envie de découvrir « Miss Islande » de la même auteure, dont j’avais entendu par ailleurs beaucoup de bien.

Au début des années 1960, la jeune Hekla s’installe à Reykjavik avec le projet de terminer l’écriture de son roman. Elle est repérée pour concourir à Miss Islande, proposition qu’elle rejette immédiatement. Elle est d’abord hébergée par sa meilleure amie, une jeune femme devenue mère de famille et qui a renoncé à tout autre projet qu’être une bonne mère et une bonne épouse. Elle revoit aussi Jon John, son ami homosexuel qui est un peu son alter ego et qui la retrouve entre deux séjours en mer en tant que marin.

J’ai retrouvé le plaisir de lecture d’un récit dans un pays surprenant (l’Islande), même si je n’ai pas toujours su distinguer dans les habitudes de vie ce qui relève particulièrement de la géographie ou de l’époque. Je n’ai pas retrouvé le même charme dans la lecture qu’avec « Rosa candida », mais « Miss Islande » garde ce fil conducteur de faire découvrir des personnages simples, pas du tout romanesques a priori, mais attachants justement dans leur simplicité. Le livre n’est ni joyeux ni triste, les personnages ne sont ni des héros ni des perdants, mais le récit de leurs vies en fait de la littérature – couronnée d’ailleurs par le Prix Médicis étranger 2019.

S 2-3Zulma, 288 pages, 20,50€

Roman

« La terre des mensonges » de Anne B. Radge

terre mensongesMagido dirige une entreprise de pompes funèbres en Norvège. Chaque jour il accueille des familles en deuil, prépare des corps, organise des cérémonies de funérailles.

Tor élève des porcs dans la vieille ferme familiale, qui périclite et où vivent encore ses parents. Son quotidien est entièrement dédié à ses animaux.

Erlend a quitté la Norvège depuis des années, et vit maintenant au Danemark avec son compagnon Krumme. Très créatif, il est chargé de la décoration des plus belles vitrines de Copenhague, et habite un très chic appartement qu’il partage avec Krumme.

Magido, Tor et Erlend sont frères. Ils ne se sont pas vus depuis des années, ne se sont pas donné de nouvelles. Mais alors que leur mère Anne Neshov est hospitalisée, et peut-être sur le point de mourir, les trois frères se retrouvent à la ferme familiale. Ils vont devoir cohabiter, ainsi qu’avec leur père et la fille de Tor, qu’aucun d’eux à part Tor ne connaissait jusqu’ici.

Premier tome de la saga des Neshov, « La terre des mensonges » m’a immédiatement fait entrer dans un univers captivant. Pourtant il ne s’agit pas d’un roman à suspense ; à la page 100 du livre, il ne s’était même pas passé beaucoup d’action. Mais les trois personnages centraux et leurs vies sont décrits avec un tel sens du détail, un tel soin dans la narration de ce que sont leurs vies, que j’ai été captivée. On comprend assez vite que ce premier tome en appelle d’autres, qu’il faudra bien toute une saga pour suivre la vie de cette famille. « La terre des mensonges » se concentre sur un épisode tragique mais hélas classique de la vie d’une famille : la fin de vie de la matriarche de la famille.

Le final du roman est inattendu et flamboyant, et confirme s’il était encore nécessaire l’urgence à lire le deuxième tome de la saga.

S 3-310/18, 352 pages, 8,40€

Roman

« La jeune fille et la nuit» de Guillaume Musso

jeune filleAprès avoir boudé pendant des années les romans de Guillaume Musso (j’avais un vague souvenir d’une lecture, mais je n’en gardais pas spécialement un souvenir enthousiaste), j’ai redécouvert cet auteur. Et j’ai appris à apprécier ses textes.

J’ai commencé « La jeune fille et la nuit » avec juste une crainte : que l’histoire qui se déroule sur deux époques (1992 et aujourd’hui) ne soit une succession difficile à suivre d’allers-retours temporels. Eh bien non ! Le roman est bien construit, bien structuré.

En 1992, une lycéenne disparaît mystérieusement. Elle entretenait une liaison avec l’un de ses professeurs, qui a disparu en même temps qu’elle. Pour tous ceux qui les connaissaient, il est évident qu’ils ont fui ensemble.

Sauf que plusieurs lycéens, désormais adultes, savent depuis toujours que cette version n’est pas viable. Et ils ont une bonne raison de ne pas y croire…

Cette plongée dans la vie d’un campus privé des années 1990, puis les retrouvailles vingt-cinq plus tard de lycéens devenus journalistes, écrivains, médecins… est assez plaisante. Ce n’est pas un huis-clos, mais néanmoins le lecteur se retrouve au milieu d’un microcosme, comme un énième lycéen parmi les autres. Et l’on se rend compte qu’aucun de ces anciens lycéens n’a oublié son passé, ni les surnoms des camarades, ni les choix qui ont bouleversé leurs vies.

La lecture est très plaisante, les chapitres s’enchaînent bien. Mais hélas, comme dans « La vie secrète des écrivains », roman que j’ai chroniqué il y a quelques mois, l’histoire s’essouffle dans le dernier tiers du roman. La fin est un peu tirée par les cheveux, plutôt décevante pour moi après une lecture qui m’avait tenue en haleine pendant plusieurs centaines des pages.

S 2-3Le Livre de poche, 544 pages, 8,40€

Roman

« Bienvenue à High Rising » de Angela Thirkell

high risingC’est la couverture enneigée qui a d’abord attiré mon regard vers ce livre, parmi les milliers qui me faisaient de l’œil dans l’incroyable librairie où je m’étais abritée un jour de grand froid (oui, je trouve toujours une bonne raison d’entrer dans une librairie…).

Le roman commence en hiver. Le premier trimestre scolaire achevé, Laura Morland vient chercher son fils au pensionnat, pour partir le temps des fêtes dans leur maison de High Rising. Ils y retrouvent leurs amis, un écrivain passionné d’histoire, qui vit avec son écervelée de fille et une secrétaire maladivement jalouse ; ou encore le médecin du village, la jeune Miss Todd qui est dévouée à sa mère vieillissante…

J’ai aimé ce livre, cette vie ordinaire d’un village anglais dans les années 1930, les petites joies et les petits tracas d’un voisinage sympathique. Côté ambiance, j’ai pensé à la série de romans de la Bibliothèque verte « Bennett » (aujourd’hui introuvables), par les petites blagues du fils de Laura, pensionnaire anglais gentiment taquin ; et aussi aux « Quatre filles du Docteur March », malgré évidemment le décalage de lieu et d’époque, mais pour cette joie sous-jacente dans les échanges entre voisins, ce rythme lent et doux de la vie qui s’écoule.

C’est un roman sans prétention, mais qui fait du bien, sans aucune niaiserie.

S 3-310/18, 288 pages, 7,50€

Roman

« My absolute darling » de Gabriel Tallent

my absoluteJ’ai acheté ce livre à force de lire des avis dithyrambiques sur ce texte. Journalistes, blogueurs, chroniqueurs, m’ont donné envie de percer le mystère de cette couverture colorée plutôt intrigante.

J’ai d’abord été déçue par le début de ma lecture – sans doute troublée par un enthousiasme général trop fort, que je ne ressentais pas dans les premiers chapitres. L’histoire est celle de la jeune Turtle, adolescente mal dans sa peau et sans aucune confiance en elle, qui vit seule avec son père. Le cœur du roman est le quotidien malsain dans lequel évolue Turtle, et cette somme de paradoxes qui donne la nausée au lecteur à force de le faire hésiter entre dégoût et espoir. Finalement j’ai été prise par cette histoire, dans ce décor coupé du monde, presque atemporel, ou seules quelques références à notre monde contemporain (comme Netflix, étonnamment cité) permettent de dater l’histoire.

Turtle, enfant vive et intelligente, mais rongée par la certitude d’être une moins que rien, ne cherche pas à s’enfuir ni à rompre avec son quotidien ; mais elle trouve sur sa route des professeurs, des copains, et même son grand-père, qui chacun à sa manière va éveiller sa conscience. S’exprimant tour à tour avec érudition ou en n’utilisant que des insultes, Turtle et son père forment un duo dérangeant et malsain ; ces personnages forts, originaux, marquants, laissent un goût de lecture âpre dont on n’a pas envie de se souvenir mais qui marque sans doute longtemps.

S 2-3Gallmeister, 480 pages, 11,70€

Roman

«Les bois de Sawgamet» de Alexi Zentner

sawgametQu’ils sont froids, les bois de Sawgamet ! Dans ce village du Grand Nord canadien, les bois ont toujours eu une place à part, comme la rivière Sawgamet autour de laquelle des chercheurs d’or ont bâti le village.

La saison se prête bien à ce type de lecture, si vous aimez lire bien au chaud des romans où il fait froid, et entendre le vent dehors souffler en même temps que dans le roman. Soyez prévenus : ce roman est assez sombre, dur comme le bois et robuste comme les habitants du village. Le récit se construit alors que le narrateur, Stephen, est au chevet de sa mère mourante. Pendant toute la nuit, il va la veiller et se remémorer l’histoire de sa famille. Le récit est troublant, et transporte le lecteur dans un univers à la fois froid et humide (la rivière et les bois sont des personnages à part entière), peuplé de créatures dont on ne sait pas si elles existent réellement ou sont issues d’un imaginaire collectif perturbé par la rudesse du climat…

Assurément c’est un livre déroutant, qui reste en mémoire après l’avoir terminé.

S 2-3Le Livre de poche, 312 pages, 6,90€

Roman

« Les adultes » de Caroline Hulse

adultesIl est bien connu que les festivités de Noël, au-delà de la convivialité de circonstance, peuvent aussi se transformer en règlements de comptes en famille ou en petites disputes entre amis. Mais si ces petits inconvénients liés sans doute à un excès de consommation de bûche sont parfois imprévisibles, certaines personnes ont l’art de les provoquer. C’est le cas de Matt et Claire, parents d’une petite Scarlett, et séparés depuis plusieurs années. Alors qu’ils ont refait leur vie chacun de leur côté, et sont en couple respectivement avec Alex et Patrick, ils décident de passer ensemble les vacances de Noël, et louent un chalet dans un complexe hôtelier au milieu de la forêt.

Ce qui est particulièrement réussi dans ce livre, c’est ce dosage bien équilibré entre la bienséance que chacun cherche à afficher et une tension inévitable qui monte progressivement au fil des pages. On comprend vite que le week-end ne va pas (du tout) se dérouler comme prévu, et l’auteure nous conduit avec détermination et élégance jusqu’au bout de ce séjour mouvementé.

Les personnages sont sympathiques, tous les quatre, en dépit de leurs défauts manifestes (Matt est un vrai gamin, Patrick un narcissique…). Je ne voudrais surtout pas passer les fêtes avec eux, mais j’ai adoré les regarder évoluer dans leur petit monde, voir leurs petits secrets révélés au grand jour, et leurs bassesses mises à nu devant le reste de la famille.

Loin des romances de Noël, ce livre caustique et assez amusant est une lecture parfaitement de saison ! On pourrait craindre les clichés sur la famille recomposée, mais l’histoire est menée intelligemment. Tout en jouant sur les festivités de fin d’année, il aborde l’air de rien des thèmes de société : famille recomposée, relation de couple, parentalité. Je vous le recommande !

S 3-3Fleuve éditions, 408 pages, 19,90

Roman

«Aimez-vous Brahms ? » de Françoise Sagan

sagan bouquinsOn revient toujours aux textes de Sagan.

Je me souviens, il y a dix ou quinze ans, avoir lu à la suite plusieurs romans d’elle, fascinée déjà par ces textes qui mêlent littérature et oralité. J’aime cet art du textes aux mots accessibles et pourtant toujours justes.

L’histoire d’ « Aimez-vous Brahms ? » est somme toute horriblement banale : Paule, bientôt quarante ans, est la maîtresse de Roger. S’ils se veulent un couple libre, dans les faits c’est surtout Roger qui profite de cette liberté, tandis que Paule l’attend. Jusqu’au jour où elle rencontre Simon, un jeune homme de vingt-cinq ans, qui tombe fou amoureux d’elle. Entre un homme qu’elle aime mais qui ne pense qu’à lui, et ce jeune homme qui l’adule et ne veut que son bonheur, Paule est partagée.

Roman court (environ 150 pages) de ces histoires croisées, « Aimez-vous Brahms ? » est un petit bijou de récit sur fond d’émancipation des femmes (le roman a été publié en 1959), avec pour décor le Paris éternel.

Lisez, relisez Sagan.

Et choisissez pourquoi pas comme moi la jolie collection « Bouquins » chez Robert Laffont, qui réunit plusieurs titres parmi les plus célèbres pour piocher vos lectures au fil de vos envies.

S 3-3Robert Laffont, collection « Bouquins » (9 romans et 1 pièces réunis), 1500 pages, 30€

Roman

«Les petites robes noires » de Madeleine St John

petites robes noiresC’est un simple post-it collé sur le livre dans une librairie qui m’a donné (très très) envie de découvrir ce roman. L’histoire des « Petites robes noires » se déroule dans les années 1950 à Sydney. L’auteure nous plonge dans les coulisses d’un grand magasin, et plus précisément au milieu des rayons dédiées aux robes de cocktail ou à la lingerie. Dans cet univers très féminin s’affairent des femmes de tous âges, conseillères et vendeuses.

On pourrait s’attendre à un récit façon « crêpage de chignon » (et pardon pour le cliché) mais l’histoire est loin de ça. Nulle animosité exacerbée entre les vendeuses, et assez peu de clichés contrairement à ce que l’on pourrait craindre dans un roman sur un tel sujet : juste le quotidien de plusieurs femmes, plus ou moins heureuses, qui se croisent dans ce magasin où il n’est pas question de vocation mais juste de travail. On suit notamment le quotidien de Lisa, une étudiante innocente et un peu rêveuse ; ou encore celui de Patty, malheureuse en couple.

J’ai pensé à « Au bonheur des dames » de Zola, par l’ambiance et le décor.

Le livre m’a plu, sans pourtant que l’histoire soit particulièrement originale ni qu’il y ait des rebondissements, mais simplement parce que le récit est bien mené, avec simplicité mais talent.

« Elle vivait pour la première fois ce coup de foudre qui frappe généralement les femmes bien plus tôt dans leur existence, mais que toutes connaissent tôt ou tard : la certitude soudaine qu’une robe particulière est non seulement jolie, qu’elle est non seulement seyante, mais qu’au-delà de ces attributs indispensables, elle répond à l’idée la plus intime que l’on a de soi. »

S 3-3Albin Michel, 288 pages, 19€

Roman

«Six ans à t’attendre» de Delphine Giraud

six ansRachel n’en revient pas : lors d’une visite à Paris, elle croise par hasard Vincent, l’homme qu’elle aime depuis toujours… et qu’elle croyait mort depuis six ans. C’est impossible, et pourtant Rachel est sûre de le reconnaître.

Qui va la croire parmi ses proches ? Sa sœur, son cousin, dont elle est si proche, ne vont-ils pas la prendre pour une folle ? Et, si Vincent est vraiment en vie, que s’est-il passé il y a six ans quand tout le monde l’a cru mort ?

Premier roman d’une auteure découverte d’abord sur Librinova avant d’être publiée de façon plus « traditionnelle », « Six ans à t’attendre » est un roman assez agréable à lire. Il a quelques défauts d’un premier roman, notamment quelques longueurs et phrases inutiles qui nuisent au rythme de l’histoire, et quelques maladresses dans l’écriture. Mais l’ensemble du roman reste plaisant : Rachel, sa sœur et leur cousin vont se transformer en enquêteurs amateurs et plonger dans le passé de Vincent. Les personnages sont sympathiques, assez marqués mais pas trop caricaturaux, et l’histoire réserve plusieurs rebondissements. Au final, malgré les longueurs (surtout à la fin), j’ai passé un bon moment de lecture et je suivrai avec intérêt les prochains romans de Delphine Giraud.

S 2-3Fleuve éditions, 360 pages, 17,90€